POUR PHILIPPE MAZURIER, généraliste à Tinténiac (Ille-et-Vilaine), le parcours de soins est plutôt une bonne chose, «même si cela entraîne une surcharge de travail, car on devient un peu distributeur de tickets».
Le médecin traitant, c’est aussi, selon ce médecin qui exerce depuis dix-sept ans, le moyen de mieux suivre ses patients. Exemple concret à l’appui : «Une patiente vient de me parler de troubles de la mémoire. Je l’ai orientée vers un neurologue. Elle me dit qu’un collègue l’avait déjà fait plus de deux ans auparavant. Cette fois-ci, je vais attendre le compte rendu et m’assurer qu’elle est bien allée le consulter.»
D’autres praticiens sont plus sévères. «La réforme du médecin traitant a causé une désorganisation dans la gestion du cabinet, estime Jean-Yves Le Goff, médecin généraliste à Saint-Brieuc (Côtes d’Armor). Désormais, beaucoup de patients considèrent qu’avoir choisi leur médecin généraliste leur donne un accès libre. C’est comme si on leur avait octroyé un droit à consommer. Hier encore, sept personnes sont venues sans rendez-vous.»
Il considère que le nouveau système de prise en charge (selon l’accès de l’assuré via ou hors parcours) a parfois perturbé la relation intime médecin/patient «qui n’était pas basée sur le niveau de remboursement».
Aux parcours de soins, pas toujours lisibles, s’ajoutent les surprises de la nouvelle nomenclature. «Samedi, j’ai laissé tomber mes patients pour un AVC. Selon la nouvelle classification, qu’il m’a fallu éplucher –578pages–, je facture 48euros. Auparavant, c’était 70,60euros. Comment peut-on travailler correctement?»
Inquiétudes pécuniaires également dans le cabinet de rhumatologie de Florence Finance, à Vannes (Morbihan). «Il y a une baisse notable de l’activité que j’évalue à au moins 10%, explique-t-elle. Le parcours de soins est désormais tellement complexe que même les employés de la Cpam ne renseignent pas bien.»
Claire Lemoigne, gynécologue à Lanester, n’a pas noté d’évolution de son activité depuis la mise en oeuvre de la nouvelle convention. Mais elle émet une réserve devant la «très légère baisse» du nombre de rendez-vous depuis le 1er janvier, c’est-à-dire depuis l’application de pénalités en cas de non-respect du parcours de soins. En revanche, elle constate des modifications dans le comportement et les questions de ses patients. «Beaucoup de gens nous demandent par téléphone quel sera le niveau de leur remboursement. On nous sollicite pour rédiger des courriers destinés à un autre spécialiste. Dernièrement, on m’a demandé une ordonnance pour une radio des cervicales...»
> OLIVIER QUARANTE
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