De notre correspondante
à New York
L ES femmes qui héritent d'une mutation BRCA1 ou BRCA2 ont de 55 à 85 % de risques de développer un cancer du sein ; elles ont aussi de 15 à 65 % de chances de développer un cancer ovarien.
Chez ces femmes, le risque de cancer du sein commence à s'élever vers l'âge de 25 ans, et leur survie globale après le développement du cancer du sein est similaire à celle du cancer du sein sporadique, soit de 50 % à dix ans.
Certaines femmes, aux Etats-Unis notamment, choisissent de subir une ablation totale des seins, mais d'autres préfèrent les conserver et rester sous une surveillance étroite. On manque d'informations sur l'efficacité de ces options.
Dans la nouvelle étude hollandaise de Meijers-Heijboer, 139 femmes ayant une mutation délétère BRCA1 ou BRCA2 ont été suivies dans un centre hospitalier de Rotterdam ; 76 ont opté pour la mastectomie totale bilatérale prophylactique et les 63 autres pour une surveillance régulière, à savoir autopalpation tous les mois, examen des seins par un médecin deux fois par an, mammographie annuelle ; l'IRM annuelle a été proposée à partir de 1995.
Après un suivi moyen de trois ans, aucun cancer du sein n'a été observé après la mastectomie prophylactique, tandis que 8 des 63 femmes sous surveillance régulière ont développé un cancer du sein. Ce nombre de cancers du sein observé dans le groupe de surveillance est en accord avec l'incidence de cancers du sein qui est décrite chez les femmes porteuses des mutations BRCA1 ou BRCA2.
L'étude montre donc que, à court terme, la mastectomie prophylactique réduit efficacement le risque de cancer du sein.
Des limites
Outre le court suivi, l'étude présente d'autres limites. Plus de femmes dans le groupe mastectomie que dans le groupe surveillance ont aussi subi une ovariectomie prophylactique (58 % contre 38 %), intervention qui réduit le risque de cancer du sein chez les femmes préménopausées porteuses des mutations BRCA1 ou BRCA2. De plus, l'objectif du traitement doit être de réduire non seulement le risque de cancer du sein, mais surtout la mortalité par cancer du sein, ce que n'a pas évalué l'étude.
Etant donné le court suivi, il reste à savoir si le cancer pourrait se développer dans le tissu mammaire résiduel quelques années plus tard. Il semble que non, d'après une étude de Hartmann et coll. Dans cette étude conduite chez 639 femmes ayant une histoire familiale de cancer du sein, la mastectomie prophylactique a réduit le risque de cancer du sein d'au moins 90 % après un suivi moyen de quatorze ans ; le risque de décès était aussi diminué. Tous les cancers du sein se sont développés lorsque la mastectomie n'était pas radicale (« New England Journal of Medicine », 1999). Dans une analyse ultérieure de l'étude, 12 femmes porteuses des mutations BRCA1 ou BRCA2 ont été identifiées parmi 100 participantes et, après un suivi moyen de seize ans, aucun cancer du sein ne s'est développé chez ces 12 femmes.
Ces deux études, déclarent dans un éditorial les Drs Eisen (Mc Master University, Hamilton, Canada) et coll., « suggèrent que, parmi les stratégies visant à réduire le risque de cancer du sein chez les femmes à risque élevé, la mastectomie bilatérale prophylactique est la plus efficace ».
Que faut-il donc recommander aux femmes avec des mutations BRCA1 et BRCA2 ?
Une alternative et des études prospectives
« A présent, répondent les éditorialistes, la mastectomie prophylactique est clairement le bon choix pour certaines femmes. Pour les autres, l'ovariectomie et le tamoxifène conjointement à un dépistage intensif incluant l'IRM représentent une alternative possible. » Mais ils ajoutent que « le plus important est de soutenir les études prospectives en cours et à venir pour définir le rôle de la chirurgie prophylactique, celui des nouveaux agents chimiopréventifs, et les meilleures stratégies de dépistage, ainsi que d'encourager les femmes à participer à ces études ».
« New England Journal of Medicine » du 19 juillet 2001, pp. 159 et 207.
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