LA TENSION MONTE d’un nouveau cran entre le ministre de la Santé et deux importants intersyndicats de praticiens hospitaliers : pour défendre l’indépendance de la profession, la CPH (Confédération des praticiens des hôpitaux) et l’Inph (Intersyndicat national des praticiens hospitaliers) appellent à la grève demain ; considérant au contraire que les mesures que prépare Xavier Bertrand «vont dans le bon sens», deux autres organisations, la CMH (Coordination médicale hospitalière) et le Snam-HP (Syndicat national des médecins des hôpitaux) ne participeront pas au mouvement.
La grève commence ce soir à 18 h 30 et se terminera vendredi à 8 h 30. Ceux d’entre les PH qui la rejoindront – et à elles deux, la CPH et l’Inph rassemblent aussi bien des anesthésistes que des psychiatres, des biologistes, des obstétriciens... ou encore les urgentistes de l’Amuf (Association des médecins urgentistes de France) – ne travailleront que sur réquisition ; des assemblées générales seront organisées dans les hôpitaux ; des délégation se rendront dans les ARH (agences régionales de l’hospitalisation) ; la presse locale sera alertée. Demain à midi, une minute de silence sera observée dans tous les hôpitaux «en hommage au statut des PH». La suite – grève du codage dans toutes les spécialités dès le 12 mai, grève du zèle en psychiatrie avec multiplication des bilans de santé... – est déjà prévue au cas où une seule journée de mobilisation ne suffirait pas à faire plier le ministre de la Santé.
Dans la ligne de mire des PH mécontents : d’abord la réforme de leur statut et en particulier les dispositions révisant leurs modes de nomination et d’affectation (« le Quotidien » des 6 et 20 avril). Pour les deux syndicats sur le pied de guerre, il n’est pas question que la procédure d’affectation des PH soit locale. «Cela aboutira à la précarisation du statut et à la perte de l’indépendance professionnelle au détriment de l’attractivité des carrières et de l’organisation des soins pour le service public», insiste le président de la CPH, Pierre Faraggi. Son syndicat et l’Inph réclament également la poursuite des négociations sur la retraite (Ircantec) des PH, le statut des temps partiels et les astreintes – ils sont rejoints ici par la CMH et le Snam, qui estiment que « le combat syndical n’est pas terminé» sur ces dossiers, qu’il est indispensable de régler si l’on veut «restaurer la confiance des praticiens hospitaliers en poste et donner envie aux jeunes générations d’intégrer l’hôpital public».
Négociation par e-mails.
Par ailleurs, la méthode employée par le ministère de la Santé pour faire avancer les textes réformant le statut des PH continue de hérisser les principaux intéressés. Il s’agit «d’une parodie de concertation », déclare sans ambages le Dr Rachel Bocher, présidente de l’Inph. «On négocie avec nous par mails ou par SMS, en nous envoyant des textes où deux mots et une virgule ont été changés! Pour moi, et je l’ai écrit à Xavier Bertrand, les projets que l’on nous soumet sont une agression caractérisée –et gratuite. Un gouvernement qui méprise à ce point les syndicats obtient une réponse inévitable: la grève.» Le Dr Faraggi renchérit : «Depuis que les préavis de grève sont déposés, nous n’avons aucune nouvelle du ministère. Nous sommes face à un déficit de dialogue social sidérant. Les pouvoirs publics prennent des dispositions qu’ils font approuver par 20% de la profession, sans plus se préoccuper des 80% restants.»
Arrivés à ce point de non-retour dans l’absence de dialogue, l’Inph et la CPH considèrent aussi que la grève de demain peut être un moyen de «renouer le contact» avec le ministère. Lequel ministère fait le dos rond en attendant que passe l’orage. Mais, inquiète de voir l’hôpital s’agiter, l’UMP agirait en sous-main. Décidément pompier de dernier recours, le Dr Bernard Accoyer (président du groupe UMP à l’Assemblée nationale) serait une nouvelle fois envoyé au front, comme dans la crise du CPE, pour tenter de calmer les ardeurs des PH en colère.
> KARINE PIGANEAU
Les révisions statutaires programmées
Les révisions statutaires à l’étude au ministère de la Santé découlent du « relevé de décisions » signé il y a un an par deux syndicats (la CMH et le Snam-HP) et le ministre de l’époque, Philippe Douste-Blazy. Elles concernent, pour l’instant, le mode de recrutement des PH (nomination sur un poste par le ministre, affectation locale sur un pôle sur proposition conjointe du responsable de pôle et du président de la CME), la composition de la commission statutaire nationale, celle des commissions régionales paritaires et définition des missions de chacune, la modification du concours national de PH, l’introduction d’une part variable dans le salaire des PH.
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