RÉALISÉ en collaboration avec l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) lié aux accidents de radiothérapie à Epinal fait état de «défaillances que l'on ne croyait plus possibles dans la gestion de la crise» au niveau local. C'est également l'ensemble des «différents maillons de la chaîne sanitaire» qui ont «tous successivement lâché». «Au lieu d'être correctement appréciés, les effets de l'accident ont été constamment minimisés», poursuivent les auteurs du rapport. «Les personnels hospitaliers concernés ont considéré que tout malade dont on n'avait pas de nouvelle allait forcément bien et que, lorsqu'ils étaient informés d'une complication, il n'y avait plus rien à faire», soulignent-ils.
Traités par radiothérapie à l'hôpital Jean-Monnet d'Epinal pour un cancer de la prostate entre le 6 mai 2004 et le 1er août 2005, 23 patients ont fait l'objet de surdosage, dont quatre sont aujourd'hui décédés. Dix présentent «une complication (...) sévère» et neuf subissent une «atteinte modérée». La direction de l'hôpital a développé «une approche plus compassionnelle qu'organisée» et «ne s'est pas donné les moyens de répondre à la crise», observent l'Igas et l'ASN, qui regrettent que les autorités nationales «n'(aient été) alertées qu'en juillet 2006». Le rapport met en cause l' «absence d'information» des malades, restés «livrés à eux-mêmes, sans organisation sanitaire d'ensemble». En conséquence, certains patients ont été exposés à «des errances diagnostiques ainsi qu'à des examens inutiles, voire formellement contre-indiqués». Dix patients ou leur famille ont déposé plainte pour homicide involontaire ou blessures involontaires à la suite de l'accident de radiothérapie.
Renforcement de la sécurité des pratiques.
«Afin de tirer toutes les leçons de l'accident de radiothérapie survenu à Epinal», le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, a décidé de prendre des mesures de «renforcement des processus de sécurisation des pratiques de radiothérapie», qui devront s'appliquer à tous les centres sur l'ensemble du territoire. La dosimétrie invivo sera désormais obligatoire dans chaque service de radiothérapie. «Ces mesures auront lieu systématiquement à la première séance, si besoin à la deuxième et à chaque changement de technique entraînant un nouveau calcul de temps d'exposition», précise-t-on au ministère. Le déploiement de ce dispositif, qui est immédiatement effectif, sera finalisé avant la fin de l'année.
Le ministère doit réunir, avec l'Institut national du cancer (Inca), un groupe de travail associant l'ASN, l'Institut de radioprotection et sûreté nucléaire (Irsn), l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), l'Institut de veille sanitaire (InVS), la Société française de radiothérapie oncologique (Sfro) et la Société française de physique médicale (Sfpm).
Ce groupe de travail devra faire, dans les prochaines semaines, des propositions sur «les moyens humains et techniques optimaux de radiothérapie et de dosimétrie, le contrôle de qualité, l'information et le suivi des patients, ainsi que sur le signalement des événements graves et la radiovigilance».
Pour améliorer la situation démographique présente et future des professionnels de la radiothérapie, le ministre de la Santé a demandé à la Sfro, en lien avec les syndicats professionnels concernés, de faire des propositions chiffrées d'ici à la fin du mois d'avril. «La coopération entre l'ASN, les agences et services de l'Etat, les sociétés savantes et les syndicats professionnels devra être mieux précisée», ajoute-t-on au ministère. Xavier Bertrand souhaite que les modalités de cette coopération soient formalisées dans un document commun. Les oncologues-radiothérapeutes libéraux seront reconnus comme des établissements ayant les mêmes obligations et droits que ceux des établissements de santé.
Ils devront dorénavant «se soumettre à une procédure d'autorisation et de certification visant à vérifier et à contrôler l'accessibilité, la planification, la sécurité, le suivi et l'évaluation de chaque service». Enfin, le décret relatif à l'autorisation d'activité de soins de traitement du cancer devrait permettre la mise en réseau de tous les centres de traitement de cancer «afin d'améliorer encore la prise en charge globale des patients».
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