S'il n'y avait, en fin de semaine dernière, aucune preuve d'un lien entre les attentats du 11 septembre et les trois cas de contamination par la bactérie du charbon en Floride, la piste criminelle était privilégiée et les autorités américaines se déclaraient préoccupées.
Un homme de 63 ans est mort, un homme de 73 ans et une femme de 35 ans ont été contaminés, tous trois travaillant dans le même immeuble de Boca Raton qui abrite le siège du groupe de presse American Media Inc. (AMI). Donnée rassurante, les sept cents tests préliminaires réalisés sur des employés et des visiteurs de l'immeuble sont négatifs. L'analyse de la bactérie a mené les enquêteurs vers un laboratoire d'Ames, en Iowa, mais la souche en question, isolée dans les années cinquante à l'université de l'Etat, a depuis été envoyée pour étude à des laboratoires du monde entier. Le directeur du groupe AMI, lui, n'a pas hésité à affirmer : « C'est une agression contre tout le pays (...) c'est la première attaque bioterroriste contre les Etats-Unis. » Les habitants de la région de Boca Raton se sont rués sur les antibiotiques. « Si la bactérie a été volée, a expliqué l'un des acheteurs, les terroristes doivent toujours l'avoir. Et les autorités ne peuvent rien y faire. »
La psychose ne se limite pas à la Floride. Dans le monde entier, les fausses alertes se sont multipliées. Et les mesures de prévention ont été renforcées. En Californie, les autorités sanitaires ont présenté à des médecins les agents biologiques qui pouvaient être utilisés par des terroristes et la manière de les reconnaître et, à Los Angeles, la sécurité des systèmes d'approvisionnement en eau a été renforcée. Le Mexique a mis en place un système de lutte contre la maladie du charbon et a lancé des contrôles dans les hôpitaux pour détecter d'éventuelles contaminations.
Et l'Europe ? Selon des médecins britanniques spécialistes d'hygiène et de médecine tropicale (« British Medical Journal » du 13 octobre), le système européen de détection et d'enquête sur les épidémies est « insuffisant » et nombre de systèmes de surveillance nationaux « doivent être renforcés ». Pour preuve : quand la nouvelle souche mortelle de virus de la grippe, H5N1, a été détectée à Hong Kong en 1997, « moins de la moitié des pays avaient mis en place le plan qui devait les préparer à une pandémie de grippe et aucun plan commun à l'UE n'était alors sur pied ». Un éditorial du journal propose la création d'un centre européen des maladies infectieuses, une « petite structure qui pourrait jouer un rôle de coordination ».
Si la France a renforcé le plan Biotox (« le Quotidien » du 8 octobre), l'Allemagne manque de vaccins, affirme le président de l'institut de recherche médicale Robert-Koch de Berlin ; l'institut abritera la structure de recherche sur les maladies liées aux attaques biologiques que le conseil des ministres allemands a décidé de créer la semaine dernière. L'Italie a adopté, pour sa part, un plan d'urgence, avec un Numéro Vert mis à la disposition des citoyens, des informations pour les médecins et les pharmaciens et la désignation de deux centres de référence en cas d'attaque.
Enfin, au Japon, le gouvernement a demandé à tous les centres de recherche de renforcer leurs mesures de sécurité et de signaler s'ils possèdent des virus ou bactéries dangereux. Les spécialistes rappellent que la secte Aoum avait fait des expériences sur le bacille du charbon et qu'il est facile de se le procurer et de le transporter. « Pour quelqu'un qui a des connaissances en bactériologie, ce n'est pas difficile de le répandre », a expliqué à l'AFP le directeur du Centre national de surveillance des maladies infectieuses.
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