Les règles ICH (Inter-national Conference of Harmonization) de bioéquivalences sont approuvées par la FDA, l’EMEA et les instances nationales européennes. « Nous nous appuyons sur l’hypothèse fondamentale et scientifiquement fondée qu’à même profil d’évolution des concentrations sériques correspond un même profil d’effet et un même rapport bénéfice/ risque », développe le Pr Philippe Lechat, directeur de l’évaluation des médicaments et des produits biologiques de l’Afssaps. Afin de juger l’équivalence du principe actif d’un générique par rapport à son princeps, deux critères majeurs sont étudiés : l’exposition, définie par l’aire sous la courbe de la concentration sérique (l’une expérimentale, l’autre extrapolée à l’infini) et la concentration sérique maximale (Cmax). Or cette dernière est liée de façon très intime avec le Tmax. Plus le médicament est absorbé rapidement, plus le Tmax est court et donc plus la Cmax est élevée.
Le Tmax est bien pris en compte mais considéré comme secondaire, car extrêmement difficile à mesurer avec précision, du fait des prélèvements discrets effectués. Il est, de ce fait, parfois impossible d’obtenir un Tmax – vrai – situé entre deux prélèvements. « Nous essayons de minimiser cette imprécision, explique le Pr Georges Houin, cinéticien, responsable du laboratoire de Pharmacocinétique et de Toxicologie clinique, hôpital Rangueil-Larrey (Toulouse), membre du groupe « génériques » de l’Afssaps. Les futures guidelines européennes, attendues pour juillet 2009, prévoient notamment de renforcer la fré-
quence de prélèvements ».
Excipients à effets notoires
Pour les molécules à marge thérapeutique étroite, l’intervalle autorisé de variation de la Cmax est réduit, à +/-10 % du princeps au lieu de +/20 % (80-125 %) pour les autres molécules.Quant aux excipients à effet notoire, la polémique semble close, d’autant qu’ils sont présents aussi dans les princeps. Quid cependant de l’équivalence supposée en sels, esters, éthers et les isomères ? « D’une part, ces derniers (sels, esters, éthers) sont scindés dans l’organisme au cours de l’absorption, détaille Georges Houin. « D’autre part, la molécule active n’est pas le sel, l’ester ni l’éther, mais plutôt l’acide ou la base correspondante ». Il arrive cependant que certains sels (deux ou trois en tout) puissent avoir une activité différente par eux-mêmes, en raison de la nature de la base ou de l’acide ajouté, auquel cas les experts peuvent être amenés à les prendre en compte. Concernant les énantiomères, « pour le générique, comme pour des princeps, explique le Pr Houin, nous testons l’exposition du ou des isomères actifs. Pour les principes actifs à cinétique non linéaire, nous réalisons chaque dosage du générique par rapport au princeps ».
Enfin, concernant le dossier pharmaceutique, le générique est logé à la même enseigne que le princeps.
La qualité du principe actif, celle des excipients, l’étude des impuretés, puis le développement galénique… ces tests sont identiques à ceux que subissent les princeps.
Variabilité intra et interindividuelle
L’autorisation de mise sur le marché est basée sur cette bioéquivalence, « obtenue en moyenne, pointe le Pr Lechat. La différence en moyenne entre princeps et générique est inférieure à la fluctuation inter et intra-individuelle. Par ailleurs, lorsqu’on annonce à un patient qu’il va se soigner avec un générique, sa perception vis-à-vis de son médicament s’en trouve modifiée. Les personnes épileptiques sont très sensibles à cette anxiété anticipative. On peut alors observer des variations à titre individuel. Cependant, aucune étude scientifique n’a à ce jour pu mettre en évidence de différences d’effets thérapeutique ou indésirables suite à une substitution par un générique, en dehors d’observations individuelles. »
De manière générale, il n’existe aucun problème à choisir le générique, assure Louis Merle, de qualité égale au princeps. « Ce qui pose problème, en revanche, c’est la substitution comme source de malobservance. Un chevauchement de traitement peut se produire si l’on substitue alors que l’ancien trai-tement se poursuit. Pour des produits à index thérapeutique étroit, s’engage le Pr Merle, il me semble qu’il vaudrait mieux éviter la substitution. Cependant, pour revenir aux antiépileptiques, traiter avec un générique ne pose aucun problème, à condition de ne pas changer de générique. Cela crée autant de soucis de passer du générique A au générique B que du traitement de référence à un générique ».
Quelle libération pour le générique ?
Pour moi, réfute George Houin, « si le générique a son AMM, c’est que la preuve a été apportée dans le dossier que la libération est la même. S’agissant d’une formulation prolongée, le dossier est particulièrement exigeant puisque cette preuve doit être apportée en dose unique à jeun, en dose unique avec un repas et en administration répétée. » « Un intervalle encore plus restreint ne gommerait pas la variabilité interindividuelle, ajoute Philippe Lechat. Pour les molécules à ITE, nous nous aidons souvent du suivi pharmacologique (?drug monitoring?). Il n’y aucune raison de ne pas s’en servir avec un générique ».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature