Deux composants
Les dépôts amyloïdes sont constitués essentiellement de deux composants protéiques, la protéine SAP, structure de base commune à toutes les amyloses, et la protéine caractérisant le type d'amylose. Ces protéines sont nombreuses et ont toutes en commun leur faible masse moléculaire. Leur conformation ß plissée et leur capacité de s'assembler en fibrilles leur donnent un caractère insoluble et résistant aux enzymes protéolytiques. Le tableau ci-joint présente les principales protéines amyloïdes et leur précurseur chez l'homme. Les amyloses systémiques sont des maladies rares dont la prévalence est en Europe de l'ordre de 3 pour 10 000.
Quatre tableaux
Il y a quatre principaux tableaux cliniques caractérisant les amyloses systémiques :
1) Amyloses AL
Il s'agit habituellement d'un sujet de plus de 50 ans ayant un composant monoclonal, parfois une simple chaîne légère isolée dans le sang ou dans les urines. Il s'y associe ou non un myélome. Les quatre principaux modes de révélation en sont :
- la survenue d'un syndrome néphrotique puis d'une insuffisance rénale avec des reins de taille longtemps conservée et protéinurie persistante souvent > 10 g/24 h, malgré l'installation de l'insuffisance rénale ;
- l'installation progressive d'un tableau d'insuffisance cardiaque liée à une cardiomyopathie hypertrophique restrictive à l'échocardiographie avec un aspect caractéristique brillant du septum et des parois ventriculaires ;
- l'apparition d'un purpura ecchymotique spontanée ou sur les zones cutanées de frottement ;
- plus rarement, il s'agira d'un tableau de polyneuropathie sensitivomotrice.
2) Amylose AA
Il s'agit d'un patient suivi pour une maladie inflammatoire chronique ; en France, le plus souvent il s'agit de la polyarthrite rhumatoïde, mais de nombreuses autres maladies inflammatoires peuvent être en cause (encadré 1). Tous les patients ont un taux élevé de protéines SAA dans le sérum (protéines de la réaction inflammatoire au même titre que la C-réactive protéine. L'amylose se révèle habituellement par une protéinurie inexpliquée.
3) Amyloses héréditaires à transthyrétine :
La neuropathie amyloïde familiale, ou amylose à transthyrétine, se révèle quant à elle habituellement après 30 ans, parfois après 60 ans, par une neuropathie sensitive puis motrice des membres amenant en quelques années à un état grabataire. Cette amylose systémique héréditaire est liée à une mutation génétique de la transthyrétine fabriquée presque exclusivement par le foie. Cette amylose prédomine dans certains pays, notamment au Portugal, Suède et Irlande, mais est ubiquitaire. Il s'agit d'une amylose à transmission autosomale dominante liée le plus souvent à une mutation Met 30, mais l'expression de la mutation est variable, elle peut rester silencieuse tout au long de la vie dans environ 20 % des cas. Le diagnostic est confirmé par le test génétique.
4) Amyloses à ß2-microglobuline
Chez les patients insuffisants rénaux en hémodialyse, la survenue d'atteinte articulaire ou d'un syndrome de canal carpien doit faire évoquer l'apparition d'une amylose à ß2-microglobuline. Dans cette forme particulière, la rentabilité diagnostique de la biopsie de glandes salivaires accessoires et de la biopsie de graisse périombilicale est moindre.
Maladies inflammatoires
Les principales maladies inflammatoires pouvant se compliquer d'amylose AA sont par ordre de fréquence décroissante :
- polyarthrite rhumatoïde,
- spondylarthrite ankylosante,
- infections pulmonaires chroniques (tuberculose, suppuration bronchique récidivante),
- maladies inflammatoires de l'intestin,
- maladie périodique,
- ostéomyélite chronique,
- abcès récidivant,
- maladies auto-inflammatoires (maladie de Still, autres fièvres récurrentes génétiques).
Rappel : comment faire le diagnostic d'amylose
- Biopsie d'un organe atteint (pas toujours facile et risque hémorragique).
- Biopsie systématique de préférence, biopsie de glandes salivaires accessoires ou biopsie de graisse périombilicale.
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Les différentes protéines amyloïdes et leurs précurseurs chez l'homme |
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Protéine amyloïde | Précurseur | Diffusion | Syndromes ou tissus atteints |
AL | Chaîne légère d'Ig (k, l) | G, L | (Primitive) isolée ou associée au myélome |
AA | (Apo) SAA | G, L | (Secondaire) infection, inflammation chronique, tumeur, FMF, syndrome de Muckle et Wells |
ATTR | Transthyrétine mutée Transthyrétine normale |
G G |
Héréditaire Sénile |
Aß2M | ß2-microglobuline | G | Associée à l'insuffisance rénale chronique terminale |
AH | Chaîne lourde d'IgG | G, L | Isolée |
AApoAI | Apolipoprotéine AI | G L |
Héréditaire Aortique |
AGel | Gelsoline | G | Héréditaire |
ALys | Lysozyme | G | Héréditaire |
AFib | Fibrinogène | G | Héréditaire |
ACys | Cystatine C | L | Hémorragie cérébrale héréditaire de type islandais |
Aß | Précurseur de la protéine Ab : (AbPP) |
L | Maladie d'Alzheimer, trisomie 21, angiopathie amyloïde cérébrale, héréditaire ou sporadique |
AprPsc | Protéine prion | L | Encéphalopathies spongiformes |
ACal | (Pro) calcitonine | L | Cancer médullaire de la thyroïde |
AANF | Facteur atrial natriurétique | L | Amylose auriculaire isolée |
AIAPP | Amyline | L | Ilots de Langerhans du diabète de type 2, insulinome |
Ains | Insuline | L | Iatrogénique |
APro | Prolactine | L | Prolactinome, hypophyse sénile |
ALact* | Lactoferrine | L | Dystrophie cornéenne sous-épithéliale |
G : amylose généralisée ; L : amylose localisée ; FMF : fièvre méditerranéenne familiale |
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