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Rappelez-vous, en septembre 1998 : dans « le Sommeil du Monstre », les rayons laser d'une secte intégriste, Obscurantis Order, détruisaient le Chrystal Building et la tour Eiffel. Une image de visionnaire.
Cinq ans après, Enki Bilal publie le deuxième volet de sa trilogie, « 32 Décembre », et l'on se demande quelle catastrophe annoncée risque de se produire bientôt dans la réalité.
On y retrouve Leyla, Nike et Amir, les trois orphelins de Sarajevo mais l'amitié qui les unissait laisse place ici à l'amour - l'amour qui les sauve eux sinon le monde - tandis que le décor, qui dans l'album précédent servait de moteur à l'intrigue, s'estompe devant les héros. Le contexte politique, les rapports de force titanesques, les luttes souterraines pour le contrôle du monde sont passés au second plan. Jusqu'à Warhole, l'odieuse éminence grise d'Obscurantis Order revenue d'entre les morts, qui obéit désormais à des motifs plus personnels plutôt qu'à son aveuglement fanatique.
Enki Bilal en a fait ici un élément central de l'histoire, « un artiste dont le projet artistique est de faire du mal absolu un spectacle à l'échelle du monde ». Est-ce cela que nous réserve le futur, la folie qui s'abat sur le monde va-t-elle forcément, comme le pense l'auteur puisque « l'art est un produit de la guerre, un acte de survie », provoquer des actes artistiques fous ?..
Quant au graphisme, il a également évolué. Une voix off décrit ce qui ne se dessine pas, le texte est devenu la colonne vertébrale de l'album, et, alors que le premier volume était gris, bleu, rouge et ocre, couleurs de sang et de poussière, celui-ci est tâché de vert tendre qui lui confère une certaine fraîcheur.
En attendant le dernier tome de la trilogie - qui racontera les retrouvailles des trois amis, mais dans quel monde ? -, écoutons Enki Bilal : « Cette trilogie est une uvre très cohérente, mon point de vue sur un changement d'époque. Qui montrera quoi au final ? Un cataclysme, Sarajevo 93, une guerre terrible, l'emblème de toutes les guerres, celles qu'on a connues et celles qu'on va connaître. Dans le premier volume, l'obscurantisme, la folie du monde, le 11 septembre, Ben Laden, Warhole... Dans le deuxième, je me suis plus attaché aux personnages, qui continuent à être pris dans la furie du monde, mais qui se débattent et commencent à surnager ».
Les Humanoïdes Associés, 64 p. coul., 13,90 euros
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