« AUJOURD'HUI, on estime entre 50 000 et 70 000 le nombre de séropositifs ou malades du sida en France concernés par la recherche d'emploi et/ou le maintien dans l'emploi. Près de 50 % des personnes séropositives sont sans emploi, alors que deux personnes sur trois souhaitent reprendre une activité. Près de 30 % des personnes contaminées depuis 1996 ont perdu leur emploi à cause du VIH/sida », affirme Sidaction. Dans le cadre du mois consacré à la lutte contre les discriminations liées au VIH/sida organisé par le collectif Grande Cause nationale, l'association présidée par Pierre Bergé a organisé à l'Ecole nationale de santé publique (Ensp) de Rennes un séminaire, « VIH et Emploi », en partenariat avec la Société française de lutte contre le sida (Sfls) et l'Union nationale des associations de lutte contre le sida (Unals).
Progrès médical, difficultés sociales.
Un état des lieux était nécessaire. Après vingt-cinq ans d'épidémie, l'infection par le VIH est devenue une maladie « au long cours », mais qui reste évolutive. « Nous ne maîtrisons pas encore tous les facteurs de la maladie, notamment en termes d'usure de l'organisme due au virus et/ou aux traitements (vieillissement accéléré, affections cardio-vasculaires, modifications osseuses, etc.) », explique l'association. Ce qui complique le maintien d'une activité professionnelle ou le retour à l'emploi après un inactivité prolongée (de plusieurs années, en général). Pour ceux qui vivaient déjà dans la précarité avant leur contamination ou la découverte de leur séropositivité, le cumul des deux handicaps accentue les difficultés. D'autant plus que « la perception de la maladie et des malades du sida dans le milieu professionnel nécessite encore un travail important d'information et de prévention, aussi bien pour les employeurs, les salariés, les syndicats que pour les médecins du travail », explique l'association.
Si les multithérapies ont apporté un réel espoir aux personnes séropositives qui peuvent de nouveau se projeter dans l'avenir, sur le plan économique et social, elles n'ont pas bouleversé leur vie. Brigitte, séropositive, témoigne : « C'est difficile de vivre avec le VIH, surtout quand on essaye d'avoir une vie positive, mais en parler à qui ? Comment ? Et puis, financièrement, comment on fait avec 436 euros par mois avec un enfant ? J'étais comptable. Après huit ans d'arrêt de travail et 20 kg en moins, allez donc retrouver du travail... »
Le nombre de séropositifs est estimé aujourd'hui à 150 000. L'enquête Vespa réalisée par l'Agence nationale de recherches sur le sida a montré que la plupart d'entre eux sont en âge de travailler : les 30-49 ans représentaient 74,3 % des 2 932 patients interrogés entre décembre 2002 et septembre 2003. Parmi les personnes séropositives depuis 1996 sans emploi, 36,8 % ont accédé à un emploi et 63,2 % sont restés sans emploi. Près de la moitié d'entre elles vivent avec moins de 680 euros.
Un dispositif complexe et non spécifique.
Le dispositif législatif (loi de cohésion sociale de décembre 2004 et loi sur le handicap de février 2005) qui régit l'emploi des personnes atteintes reste complexe et ne répond pas spécifiquement aux besoins des patients. « Il est fréquent de constater un écart entre les besoins sociaux des patients et les critères d'attribution (ou de réattribution) d'une allocation (AAH, allocation adulte handicapé, ou Rqth, reconnaissance de qualité de travailleur handicapé) », constate Sidaction. Surtout, le dispositif - et ce n'est pas son objectif - « ne répond pas aux freins psychologiques des employeurs potentiels ou des futurs collègues de travail ».
En s'appuyant sur les expériences de son propre réseau et celles d'autres associations qui s'occupent de demandeurs d'emploi en difficulté, Sidaction tente de mettre en place des solutions innovantes susceptibles d'accompagner les personnes atteintes afin de les aider à créer leur propre revenu et de les rendre plus autonomes. Un centre de ressources régional VIH et Emploi devrait voir le jour avant la fin de 2005 en Ile-de-France. L'expérience devrait être étendue à Paca, deuxième région de France la plus touchée par l'épidémie. Il s'agira d'une structure collégiale légère aux missions complémentaires à celles de l'Anpe, un guichet unique qui centralisera tous les paramètres de chaque demandeur d'emploi (situation médicale et sociale) et lui proposera un accompagnement permanent et individualisé en vue de créer son propre revenu. Cofinancé par le Fonds social européen, le conseil régional d'Ile-de-France, le conseil général de Paris et Sidaction, le centre constituera la première structure privée en France d'aide au retour et au maintien dans l'emploi des personnes infectées par le VIH/sida.
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