LES ÉTATS GÉNÉRAUX de l’alcool, qui se sont déroulés dans tout le pays depuis le 7 octobre, ont pris fin le 5 décembre. Ils ont ouvert des perspectives prioritaires pour la prise en compte de ce fléau. A travers l’organisation de 26 forums régionaux et la contribution de 100 000 internautes, «le traditionnel clivage entre producteurs d’alcool et professionnels de santé» a été surmonté, «comme l’avait déjà prouvé la mise en oeuvre du Conseil de la modération et de la prévention», affirme le ministre de la Santé.
Conformément au plan Addictions lancé récemment (« le Quotidien » du 17 novembre), «chaque contact avec le système de santé doit être l’occasion (pour un patient) , si nécessaire, d’entamer un dialogue sur sa consommation d’alcool, avec son médecin traitant, mais également lors d’une hospitalisation». Des modules de formation vont être mis au programme dans les lieux d’enseignement qui forment à un métier de la santé «afin que médecins, infirmières, sages-femmes et kinés puissent être capables de repérer un patient en difficulté avec l’alcool».
Apprendre les bons réflexes.
Plus en amont, en vue de disposer de données actualisées sur le nombre de personnes qui décèdent d’une alcoolisation excessive et sur le coût social de l’alcool, Xavier Bertrand va demander à la Direction de la recherche, des études, des évaluations et des statistiques (Drees) de lui remettre un rapport avant mars 2007.
«Je veux tout d’abord mener une action résolue en direction des jeunes, qui consomment de l’alcool de plus en plus tôt et en quantité de plus en plus importante», précise le ministre. L’interdiction pour les alcooliers de sponsoriser les soirées étudiantes sera appliquée «de manière stricte». Le ministre veut «qu’en aucune façon soient promues les boissons anti-gueule de bois car, sous le prétexte de masquer le taux d’alcoolémie, (elles) sont dangereuses pour la santé, en particulier pour la conduite automobile». Il lui semble «indispensable de faire respecter l’interdiction de vente d’alcool aux mineurs». A cette fin, les représentants de la grande distribution sont invités à élaborer des chartes d’engagement sur les formations à donner à leur personnel pour leur permettre de contrôler l’âge des acheteurs d’alcool. Dans les discothèques, des fontaines d’eau seraient les bienvenues ainsi que des boissons non alcoolisées «vendues moins cher que les alcools».
«Je sais que certains rapports parlementaires s’intéressent à l’apprentissage du goût des vins dès le plus jeune âge. Je préférerais que l’on développe l’apprentissage des bons réflexes et des effets néfastes d’une consommation excessive de vin sur la santé», déclare Xavier Bertrand.
Le code du travail modifié.
Il faut aussi sortir l’alcool «du tabou dans lequel il est tenu actuellement» dans le milieu du travail. Les ministres Borloo et Larcher sont sollicités pour «voir comment réformer sur ce point un code du travail devenu obsolète». Le rôle des médiateurs de santé est à «renforcer» et des formations spécifiques sont à proposer aux médecins du travail «afin que soient plus vite et plus facilement repérés et pris en charge les salariés qui ont un problème avec leur consommation d’alcool». De façon générale, il est suggéré de mieux informer les consommateurs sur leur usage de l’alcool et sur les risques. Malgré 40 ans de baisse de la consommation d’alcool en France, le pays reste dans le peloton de tête des buveurs avec 13,1 l par an et par personne, soit trois verres standards par jour (10 g d’alcool par verre). Il en coûte annuellement 3,7 milliards d’euros, soit 600 euros par Français, pour 5 millions de personnes avec des difficultés médicales ou psychologiques liées à l’alcool, 2 à 3 millions de dépendants et de 700 à 3 000 enfants atteints d’un syndrome d’alcoolisation foetale grave. L’alcool, c’est aussi un marché de 13 milliards d’euros, qui emploie directement 420 000 personnes.
Ce que savent les Français
Selon une enquête de l’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) menée en novembre, un Français sur quatre connaît le seuil de consommation à risque pour les hommes (3 verres par jour) et un sur trois celui des femmes (2 par jour). Trois sur cinq pensent qu’un verre de whisky (2,5 cl) contient plus d’alcool que 25 cl de bière contre deux sur cinq qui savent que les deux renferment la même quantité d’alcool pur, à savoir 10 g. Un Français sur trois croit que les accidents de la route sont la principale cause de mortalité liée à l’alcool ; or, ce sont les cancers qui font le plus grand nombre de victimes, suivis de loin par les maladies cardio-vasculaires, les pathologies digestives et les accidents.
L’Académie prône l’unité alcool
Dans un avis du 28 novembre, l’Académie de médecine demande d’en finir avec le «consommer avec modération» et le «verre standard». Les messages devraient exprimer les limites de consommation en « unités alcool », une unité correspondant à 10 g d’éthanol. L’étiquetage devrait de même indiquer le contenu des boissons en unités alcool..
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