FACE À DES organisations syndicales unanimement remontées contre son projet de confier l’affectation des praticiens hospitaliers (PH) aux directeurs d’établissement (« le Quotidien » du 10 avril), le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, fait, dans les termes à tout le moins, un pas en arrière.
A l’occasion d’un comité de suivi de l’accord statutaire du 31 mars 2005, il vient en effet de soumettre aux syndicats participants – la CMH (Coordination médicale hospitalière), le Snam-HP (Syndicat national des médecins des hôpitaux publics) et l’Uccmsf (Union collégiale des chirurgiens et médecins spécialistes français) – un texte dans lequel les directeurs passent à la trappe. «Le praticien (...) sera affecté dans un pôle sur proposition du responsable de pôle et du président de la commission médicale d’établissement. L’affectation locale sera enregistrée par le Centre national de gestion lorsqu’il y a accord local. En cas d’avis divergents, l’affectation sera prononcée par arrêté du ministre chargé de la Santé après avis de la commission statutaire nationale», indique, précisément, le ministère dans un communiqué. Pour la CMH et le Snam, qui adhèrent à cette proposition, cela ne fait pas un pli : «Les directions administratives locales n’interviennent à aucun moment. C’était la condition pour respecter l’indispensable indépendance professionnelle et éviter un inutile conflit.» Il s’agit donc d’une «victoire syndicale», d’un «amendement essentiel», selon les termes du Dr François Aubart, président de la CMH, même si la «vigilance» reste de mise lors de l’entrée en vigueur de ce dispositif.
Pour d’autres – et l’union syndicale constituée il y a quinze jours vole ainsi en éclats –, rien n’a changé. L’Inph (Intersyndicat national des praticiens hospitaliers) et la CPH (Confédération des praticiens des hôpitaux), de toute façon hostiles à une déconcentration des modalités d’affectation des PH propre à créer des «potentats locaux», ne décèlent aucun progrès dans la procédure arrêtée par Xavier Bertrand. Le Dr Rachel Bocher, présidente de l’Inph, attaque bille en tête : «C’est une manière jésuite, hypocrite, de réécrire la version précédente. On essaie d’embrouiller les gens.» Le président de la CPH, le Dr Pierre Faraggi, renchérit : «Le directeur avance masqué mais il est toujours là.» Où ? A l’étape précédant immédiatement l’intervention du centre national de gestion, estiment à la fois les détracteurs du projet et, à mots plus que couverts, certains directeurs d’hôpital qui se gardent bien d’ajouter ouvertement de l’huile sur le feu dans ce dossier délicat. Pour ceux-là, le centre national de gestion sera cantonné à un rôle de «greffier» ou de «chambre d’enregistrement» de l’affectation des PH mais, juridiquement, ce ne peut être que le directeur, représentant légal de l’établissement, qui affecte localement les candidats à un poste. En tournant une petite fois sa langue dans sa bouche puis en faisant disparaître sur le papier la mention de la responsabilité des directeurs, qui ne serait plus qu’implicite, le ministre aurait donc trouvé une astuce permettant de rallier le plus d’acteurs hospitaliers possible à ses plans. Qui a tort , qui a raison ? Difficile de trancher tant que ne sont pas parus les textes statutaires encadrant la nouvelle procédure. Mais l’Inph et la CPH ne les attendront pas pour organiser, le 11 mai, une journée de grève. L’occasion, expliquent les deux intersyndicats, de défendre « l’indépendance professionnelle » des PH mais aussi de dénoncer l’« autoritarisme » du gouvernement.
(1) Ndlr – A la suite d’une erreur de transmission, cet article, correspondant au titre de la première page du «Quotidien» du 18avril, avait été rempacé dans cette édition par une Carte blanche. Nous le reproduisons donc aujourd’hui en priant nos lecteurs de bien vouloir nous excuser.
La réforme du statut continue
Au cours des quatre heures qu’a duré la dernière réunion statutaire au ministère de la Santé, le sujet de l’affectation n’a pas été le seul évoqué. Les dossiers de la part variable complémentaire du salaire des PH, de la simplification du concours de PH, de la commission statutaire nationale et des commissions régionales paritaires ont également été abordés avec à la clef, pour la plupart, une validation des textes en projet. Reste en suspens la question des retraites, qu’il s’agisse de celles des PH ou des hospitalo-universitaires. Pour ces derniers, une réunion a tourné court il y a dix jours au ministère et des arbitrages de Matignon sont attendus.
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