L E projet de loi de modernisation du système de santé, qui devrait être examiné à l'automne au Parlement, sera l'occasion d'« aller plus loin » dans le développement des filières et réseaux de soins, a promis Bernard Kouchner lors d'un colloque organisé à l'Assemblée nationale par le Dr Jean-Jacques Denis, député PS de Meurthe-et-Moselle, avec la participation du « Quotidien du Médecin ».
Comment le gouvernement envisage-t-il de dépasser le cap de la simple expérimentation des réseau, qu'une ordonnance Juppé a mise en place en 1996 ? Il est encore trop tôt pour le savoir ; le ministre délégué à la Santé et son cabinet sont encore en train d'explorer plusieurs pistes de réflexion.
« La thématique réseau est présente dans toutes les réflexions. On s'y réfugie même, constate Bernard Kouchner. Dès qu'une question se pose, la réponse est réseau, ce qui ne va pas faciliter notre travail. » Il mise sur les réseaux pour répondre à certain nombre de besoins, tels « la continuité des soins »,
« l'éducation santé, mal rémunérée par le paiement à l'acte » ou « la prise en charge coordonnée des maladies chroniques ». Evoquant, une fois de plus, la dichotomie entre la médecine de ville et l'hôpital, Bernard Kouchner a souligné que les réseaux doivent permettre aussi de « relier institutionnellement » la médecine hospitalière et la médecine ambulatoire.
Le ministre délégué à la Santé se demande par ailleurs « quelle place » il faut attribuer aux réseaux : selon le principe de « complémentarité » ou de « substitution ».
Dans un manifeste publié en début d'année (« le Quotidien » du 30 janvier), la Coordination nationale des réseaux (CNR), présidée par le Dr Didier Ménard, posait déjà la question de la place accordée aux réseaux et de la nécessaire reconnaissance des praticiens engagés depuis de nombreuses années dans des expériences de terrain.
Promettant une « démarche souple », Bernard Kouchner a juste précisé qu' « il est probable et souhaitable que cette nouvelle forme d'organisation prenne plus qu'une place symbolique ».
Sur l'encadrement juridique, les formes et le mode de financement des réseaux, le ministre délégué a volontiers reconnu qu'il a « plus de questions que de réponses ».
Il s'est contenté de rappeler quelques principes simples. Ainsi, un article du projet de loi de modernisation du système de santé donne une définition générale des réseaux et prévoit une base de financement dès lors qu'un projet répond à un cahier des charges fixé par décret. Selon Bernard Kouchner, « cela contribuera à mieux asseoir les réseaux sur le plan juridique ». Le ministre délégué ne sait pas encore quels types de réseaux sont à privilégier (réseaux par pathologies, les réseaux ville-hôpital, les réseaux de bassin de vie, etc.), mais prône le « pragmatisme, entre une position technocratique et une position par trop laxiste », qui aboutirait à des structures « dont on ne connaîtrait pas l'impact, les bénéfices attendus ».
Enfin, Bernard Kouchner, comme l'ensemble des intervenants du colloque, estime que « la question du financement des réseaux, de sa mécanique et de son ampleur est déterminante pour l'avenir », même si elle « ne peut pas être un préalable ». Il s'est contenté d'évoquer des options possibles : contrat d'objectifs et de moyens entre le financeur et le réseau, dérogations tarifaires locales ou avec pilotage national.
Une période tourmentée
Il semble donc que le ministère de la Santé reste encore dans le flou alors même que « la période est très tourmentée en matière de réseaux », souligne Rémi Fromentin, directeur de l'Union régionale des caisses d'assurance-maladie (URCAM) du Languedoc-Roussillon et président de la conférence des directeurs d'URCAM. Comme ont pu en témoigner plusieurs intervenants pendant le colloque, la possibilité, pour les réseaux, d'obtenir un financement par les Fonds régionaux d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV), provoque en ce moment un « afflux de dossiers dans les URCAM ».
En outre, Rémi Fromentin a rappelé qu'on attend encore la parution du décret d'application de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001, qui doit décentraliser la procédure d'agrément des projets de filières ou réseaux expérimentaux : « Cela attise l'impatience. » Les multiples interrogations du ministre risquent donc de décevoir ceux qui veulent se lancer aujourd'hui dans les réseaux.
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