Bernard Kouchner se fâche : « Arrêtez de dire que le système français de santé et protection sociale a des faiblesses. C'est un des meilleurs au monde. Preuve en est que les Anglais viennent de nous demander de les aider. »
Bernard Kouchner se réjouit : « Nous avons créé en dix ans, avec l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, un outil remarquable, un modèle d'expertise de très haut niveau qui fait référence en Europe. »
Bernard Kouchner a des regrets : « Le gouvernement, les hommes politiques, les élus n'ont pas voulu, n'ont pas été capables de tirer tous les enseignements de la politique de réévaluation du service médical rendu (SMR) par le médicament. » (Comprenez : n'ont pas voulu dérembourser les spécialités pour lesquelles la commission de la transparence avait jugé le SMR insuffisant.)
Bernard Kouchner est franc : « Il n'y a aucune chance pour que les industriels de la pharmacie soient, demain, moins mis à contribution qu'aujourd'hui. C'est beaucoup plus simple de vous pressurer (vous, l'industrie pharmaceutique) que de supprimer des hôpitaux ou de procéder à des regroupements entre établissements. »
Quelques phrases prononcées par le ministre délégué à la Santé devant des auditeurs parfois approbateurs, plus souvent surpris, voire médusés.
La réunion organisée par l'Association des cadres de l'industrie pharmaceutique (ACIP) aura eu, en tout cas, le mérite de faire comprendre aux industriels qui, sans doute, ne se faisaient guère d'illusions à cet égard, que les taxes qui les frappaient régulièrement année après année n'étaient pas près de disparaître.
« Les dépenses de médicaments croissent de 8 % en moyenne chaque année, a encore expliqué le ministre. Si ça continue sur ce rythme, ce sera toujours vous qui paierez les pots cassés. » Et pas les prescripteurs. Clair.
Et pourtant, le ministre s'est largement félicité de l'accord sectoriel signé avec l'industrie pharmaceutique et qui doit être renouvelé cette année. « C'est un texte important, et cet accord constitue sans doute la principale avancée, s'agissant des relations entre les pouvoirs publics et le monde industriel du médicament, s'est réjoui Bernard Kouchner. Et malgré ses imperfections, personne aujourd'hui ne songe à le remettre en cause. » Voire, disait à la sortie de cette réunion un chef d'entreprise, agacé de constater qu'aucune nouvelle proposition n'avait été faite pour encourager l'investissement, la recherche, l'innovation.
Mais pour le ministre, les financements manquent. « Tout le monde, s'écrie-t-il, demande à bénéficier d'avantages nouveaux, de revalorisations, de prix plus substantiels. Trouvez l'argent, donnez-moi les crédits et je finance tout. » La salle se fige.
Gestion élargie
« Il est quand même incroyable, poursuit-il, qu'on se félicite chaque année de l'augmentation du budget de l'Education nationale et que l'on n'accepte pas que les crédits consacrés à la santé suivent la même courbe. Il faut savoir que la part des dépenses de la santé dans le PIB sera de plus en plus importante, 10 % demain, 13 % dans dix ans. C'est cela la réalité, et ce sera bien pour la santé et bien pour notre système qui reste un des meilleurs du monde. »
Les faiblesses de notre système, poursuit le ministre, tant montrées du doigt par certains « sont des triomphes par rapport à ce qui se passe ailleurs, même s'il est vrai qu'il faut encore œuvrer pour qu'il soit plus performant ».
Et à cet égard, Bernard Kouchner préconise une gestion élargie des crédits avec la participation des professionnels de santé et des associations de malades. « Tout le monde doit se sentir concerné et pas seulement les syndicats de salariés et les patrons. »
Enfin, on retiendra de cette intervention que le ministre est déçu par les génériques qui ne percent toujours pas. « J'avais proposé, dit-il, de mettre en place un tarif de référence par groupe générique. (C'est-à-dire que les génériques de la même molécule seraient remboursées selon un tarif unique, quel que soit leur prix). J'étais certain que cela aurait pu marcher. Mais j'étais seul face aux autres membres du gouvernement. Devinez qui a gagné. » Il n'est pas facile d'avoir raison contre tout le monde.
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