« MON TRAVAIL n’a rien à voir avec les graffitis. C’est de la peinture », se défendait un jour Basquiat. Et comme il avait raison ! En 1977, l’artiste de Brooklyn, d’origine portoricaine et haïtienne, commence à signer ses dessins du nom de SAMO, accompagné d’une couronne et du sigle du copyright. Il appartient à la génération des graffiteurs qui a brusquement émergé à New York à la fin des seventies. Déjà, son style, identifiable entre tous, apparaît dans toute sa singularité : coulures de peintures, ratures, fougue et parfois rage du pinceau ou du crayon, facture naïve et enfantine…
Basquiat exprime une contre-culture urbaine, une philosophie de la rue. Il utilise des moyens d’expression violents et anarchiques, mélanges syncrétiques de légendes vaudoues et d’épisodes bibliques, émaillés ça et là de références à la bande dessinée, à la boxe et au base-ball, au jazz, à la publicité et aux médias, à la mort, à l’histoire des afro-américains, à la « mémoire culturelle » du continent noir. Basquiat peint sur des supports traditionnels (des toiles), mais aussi sur des éléments trouvés dans la rue (portes, fenêtres, planches..). Les couleurs qu’il utilise sont comme des effusions de joie, de vie et de jouissance. Il laisse parler ses impulsions, ses fantasmes, ses obsessions et ses rêves pour donner vie à un ballet de sigles, de symboles, de griffures, d’éclaboussures, d’écritures automatiques, de tracés abstraits, indéchiffrables, d’ébauches raturées.
Quelle est la signification de ces poèmes picturaux, agités et instinctifs ? On n’en connaît pas la plupart du temps le sens caché et l’exposition n’en donne pas vraiment les clefs. Ce qui n’a finalement aucune importance, car l’œil, littéralement hypnotisé par ce langage créé de toutes pièces, ne doit pas être encombré par quelque raisonnement que ce soit. L’art de Basquiat est vierge de toute culture artistique et à mille lieues de la conceptualisation. Et pourtant, son acte pictural est fort. Basquiat ne fait pas de hiérarchie entre le dessin, l’écriture, le collage, la peinture et le « griffonnage ». Il passe de l’une à l’autre de ces pratiques avec une innocence et une spontanéité déconcertantes. Son « expressionnisme primitiviste » est fascinant. Sa peinture est parfois et souvent plus vivante que la vie même.
Jusqu’au 30 janvier 2011 au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, 16e, tél. 01.53.67.40.00. www.mam.paris.fr. Tlj sauf lundi, de 10 à 18 heures (jeudi jusqu’à 22 heures). Catalogue, éd. Paris Musées, 256 p., 34 euros ; « le Dernier jour de Jean-Michel Basquiat », d’Anaïd Demir, éd. Anabet, 160 p., 12 euros.
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