Question
La principale question qui se pose face à une balanite est de savoir si celle-ci est d'origine infectieuse, inflammatoire ou précancéreuse.
Ce sont les modalités évolutives qui permettent de répondre à cette question : les balanites aiguës sont infectieuses ou inflammatoires, les balanites chroniques sont inflammatoires ou précancéreuses.
Balanites aiguës récentes
Les balanites aiguës récentes font discuter la localisation génitale d'une dermatose, une cause locale ou une cause infectieuse.
Parmi les dermatoses, il convient d'insister sur les toxidermies qui peuvent se traduire par une bulle unique au niveau du gland (toxidermie bulleuse) ou par une inflammation qui laissera une pigmentation arrondie. C'est le classique érythème pigmenté fixe, aspect pathognomonique de toxidermie. Il peut se voir entre autres avec les cyclines, les salicylés, les sulfonamides...
Les causes locales sont, quant à elles, représentées par : l'allergie au latex (rare et grave), une irritation au chlorure de benzalkonium des spermaticides, l'allergie aux ammoniums quaternaires.
Parmi les causes infectieuses, la primo-infection herpétique est très aiguë, très inflammatoire, microvésiculeuse, puis micro-érosive.
Les primo-infections à HSV1 (30 % des cas) ont des récurrences moins nombreuses que les primo-infections à HSV2. Un traitement d'épreuve par valaciclovir per os peut se justifier en cas de doute. Les traitements locaux spécifiques ne sont pas très utiles.
La balanite à Candida n'est probable : que si la balanite est très inflammatoire, rouge, œdémateuse, avec sécrétions blanchâtres ; il existe des pustules en périphérie, la notion de rapports non protégés récents avec une partenaire ayant ou étant sujette à de fréquents épisodes de vulvovaginite candidosique ; ou que s'il existe un diabète. La présence de levures au prélèvement est banale (15 % des hommes sains) et seul un nombre élevé de colonies est évocateur de candidose. Aucun traitement antifongique ne doit être prescrit sans certitude suffisante. En effet, en l'absence d'infection fongique, il est mal supporté, pérennise les lésions et brouille leur analyse sémiologique. Il est préférable de prescrire un antifongique per os (hors AMM).
Les autres balanites infectieuses sont dues à de nombreux germes, mais seuls le streptocoque bêta-hémolytique, Staphylocoque aureus et le Pseudomonas sont réellement pathogènes. En fait, dans la majorité des cas, il n'est pas nécessaire de faire une antibiothérapie. Une bonne toilette à l'eau et au savon suffit généralement même pour le Pseudomonas.
Balanites chroniques
Les balanites chroniques se divisent en balanites récidivantes et en balanites permanentes.
Les balanites récidivantes évoluent par poussées et rémissions et font surtout discuter :
1) un herpès récurrent, avec son évolution stéréotypée (prodrome, vésicules en bouquet, microérosions et guérison spontanée en cinq à huit jours). Le traitement local spécifique n'est pas très utile. Le traitement général n'a d'intérêt que prescrit dans les douze premières heures, ce qui est rarement possible. L'échec d'un traitement au long cours par valaciclovir permet d'éliminer une origine herpétique aux balanites récidivantes ;
2) le psoriasis génital : il est rarement la localisation unique d'un psoriasis. Il se traduit par une tache rouge, fixe, peu ou pas squameuse, extrêmement sensible à la corticothérapie locale, mais avec fréquentes récidives ;
3) la balanite érosive : c'est une étiologie très fréquente de balanite récidivante ; elle se traduit par une tache rouge, très discrètement érosive, parfois un peu suintante, assez bien limitée, en un ou plusieurs endroits du gland et de la face interne du prépuce. Elle résiste à tout traitement (antifongique, cortisone locale). Son origine est probablement infectieuse. Elle ne se rencontre que chez les sujets non circoncis, souvent à prépuce long et qui couvre la totalité du gland. Cela constitue, si l'hygiène n'est pas très rigoureuse (sujet d'un certain âge), un bon milieu de culture. Là encore, la toilette doit être faite à l'eau et au savon, puis tamponnement au nitrate d'argent à 0,5 % suivi de l'application de crème type Aloplastine. Ce traitement permet d'obtenir une guérison, mais la récidive est fréquente, nécessitant une circoncision qui sera la seule solution. Toutes ces lésions guérissent, même par intermittence, ce qui est fondamental pour éliminer un état précancéreux, qui reste l'obsession des balanites permanentes.
Les balanites permanentes sont représentées essentiellement par le lichen scléroatrophique, la balanite scléro-inflammatoire et par le carcinome in situ. Le lichen scléroatrophique (aspect pâle, blanchâtre et scléreux) nécessite un dépistage précoce et une corticothérapie locale.
Un autre aspect sémiologique est inquiétant : il s'agit d'une tache rouge, bien limitée, indolente, située au niveau du gland et parfois de la face interne du prépuce. D'aspect très anodin, car sans infiltration et sans relief, cette lésion doit alerter par sa fixité. Cet aspect clinique univoque peut en effet traduire soit une simple balanite inflammatoire chronique, soit un cancer in situ, encore appelé maladie de Bowen ou érythroplastie. Une biopsie doit donc être réalisée pour préciser la nature inflammatoire, précancéreuse ou déjà cancéreuse de la lésion.
Entretiens de Bichat. Communication du Pr P. Morel (hôpital Saint-Louis, Paris).
Toujours, jamais, rarement...
Une balanite a besoin :
- toujours : d'eau et de savon ;
- jamais : d'antifongiques locaux (sauf en cas de quasi-certitude qu'il s'agit d'une balanite candidosique) et de corticoïdes locaux (sauf psoriasis, lichen ou lichen scléro-atrophique) ;
- rarement : d'antiseptiques locaux et d'antibiothérapie générale ;
- pratiquement jamais : d'antiherpétiques locaux.
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