La XIIe Conférence internationale sur le SIDA et les maladies sexuellement transmissibles en Afrique (CISMA), à Ouagadougou (Burkina), s'est achevée sur un appel à la communauté internationale pour qu'elle subventionne l'accès aux antirétroviraux et soutienne la production locale de génériques. Mais si l'avenir reste sombre, d'autant que certains dirigeants politiques du continent tardent à s'engager, il est possible de contenir l'épidémie, comme le montre l'exemple du Sénégal, où la prévalence de l'infection est depuis 1988 contenue autour de 1,4 %.
De notre envoyée spéciale
Sur 28 millions de personnes infectées par le VIH actuellement en Afrique, seulement 30 000 bénéficient d'un traitement antirétroviral. Mais, depuis quelques mois, l'espoir d'un changement notable a été entretenu par la baisse du coût des médicaments - à la suite des négociations avec l'industrie pharmaceutique - et à l'arrivée des molécules génériques.
L'accès élargi aux traitements antiviraux est une condition nécessaire pour la mise en place de programmes réalistes de prévention par le dépistage. En effet, en Afrique subsaharienne, nombre d'habitants sont réticents à la pratique des tests sanguins quand la perspective d'une séropositivité ne s'accompagne que d'une stigmatisation, en l'absence d'accès à une prise en charge médicale.
Grâce au programme ACCES, les trithérapies vendues par l'industrie pharmaceutique ont un coût annuel de 300 à 360 dollars. Mais le prix de revient total d'une prise en charge individuelle sur douze mois reste de l'ordre de 1 200 dollars, en grande partie à la charge du patient. Ce surcoût correspond à la pratique d'examens biologiques et aux frais de délivrance, de consultations et de soins infirmiers.
Dans les pays du Nord, des techniques biologiques permettent d'estimer le moment où le traitement antirétroviral doit être mis en place et d'en surveiller l'efficacité. Elles s'appuient sur un comptage des lymphocytes CD4 par une technique dont le prix de revient, après achat d'un cytomètre de flux à 100 000 dollars, est de 30 dollars environ. Si l'on ajoute que le suivi biologique fait aussi appel à des mesures de la charge virale (100 dollars environ), on conçoit qu'il est urgent de développer des outils spécifiques de dosages et des calendriers optimisés de pratique de ces mesures.
Selon plusieurs études, les dosages de lymphocytes CD4 sont suffisants pour décider de la mise en route du traitement. Des techniques alternatives sont disponibles depuis une dizaine d'années, mais elles sont restées jusqu'à présent peu utilisées.
L'étude HNRS 1226, dont les résultats ont été rendus publics pour la première fois à la CISMA, avait pour objectif de confirmer, sur le terrain, l'intérêt d'une technique alternative de comptage des CD4, commercialisée sous le nom de DYNABEADS (société norvégienne Dynal, brevet français, université technique de Compiègne). Le prix d'achat du matériel est de 1 000 dollars et le coût du test, actuellement de 1,5 dollar, pourrait être réduit à 0,15 dollar dans le cadre d'une distribution à large échelle. L'étude a été menée dans cinq pays d'Afrique de l'Ouest (Burkina Faso - 2 centres, Côte-d'Ivoire, Mali, Sénégal, Togo). « Quarante-trois techniciens de laboratoire ont été formés dans des sessions de soixante-douze heures, organisées localement par des référents du centre MURAY de Ba a Niaoulasso », explique le Dr Serge Muergbouga, l'immunologiste du centre. Les chercheurs ont comparé les résultats obtenus sur 370 prélèvements en utilisant les deux techniques. La corrélation entre les deux mesures et la concordance étaient très élevées (90 %). Dans les 10 % de cas où les résultats divergeaient, il n'a pas été possible de conclure à la supériorité d'une technique par rapport à l'autre.
« Il s'agit d'un premier pas vers la mise à disposition d'un test démocratique et décentralisé à un moindre coût s'appuyant sur les ressources locales. Il pourrait aussi constituer un moyen de pression sur les industriels du secteur de la biologie, dans le but d'une réduction généralisée des coûts de suivi », continue le Dr Diagbanga.
Par ailleurs, des expériences pilotes sont en cours pour évaluer l'intérêt du Light Cyber, un matériel de mesure de la charge virale à moindre coût (1,5 dollar contre 100 dollars).
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