Avis spécialisé
Deux situations cliniques seront à distinguer :
– BAV dans un contexte d’oeil rouge et douloureux ;
– BAV sur un oeil blanc et indolore.
Un avis spécialisé sera indispensable :
– pour affirmer le diagnostic par un examen à la lampe à fente, une mesure de la pression oculaire et un contrôle du fond de l’oeil ;
– pour assurer la prise en charge thérapeutique.
Sur un oeil rouge et douloureux
1) Les kératites infectieuses
Les kératites infectieuses (infection de la cornée) sont une cause très fréquente de BAV sur oeil rouge et douloureux. Elles peuvent être d’origine virale, bactérienne, ou plus rarement mycosique et amibienne. L’interrogatoire recherchera des antécédents d’herpès, de port de lentilles et de traumatisme oculaire. L’examen montre une rougeur oculaire, un larmoiement avec sécrétions, un blépharospasme et une photophobie. Un abcès de cornée peut se voir sous la forme d’une lésion blanchâtre sur la cornée. Un ganglion prétragien homolatéral peut être associé. Il est nécessaire de demander un avis spécialisé pour effectuer des prélèvements bactériologiques avant tout traitement.
2) Glaucome aigu
C’est une hypertonie oculaire d’installation brutale entraînant rougeur, douleur et baisse d’acuité visuelle. L’hypertonie est liée à la fermeture de l’angle iridocornéen par la racine de l’iris sur des yeux prédisposés hypermétropes. Le tonus oculaire sera apprécié et comparé à l’oeil adelphe par un palper bidigital. La douleur peut être associée à des nausées ou à des vomissements. La pupille est fixée en semi-mydriase. La palpation oculaire donne la sensation d’une bille de verre et le tonus oculaire est souvent supérieur à 50 mmHg. C’est une urgence ophtalmologique majeure mettant en jeu le pronostic visuel. La prise en charge doit être rapide pour éviter l’ischémie du nerf optique. Le traitement est symptomatique par hypotonisant et iridectomie périphérique. Cette dernière sera réalisée sur l’autre oeil de manière préventive.
3) Traumatisme oculaire
Les brûlures oculaires par agent chimique (base ou acide), de diagnostic évident et potentiellement gravissimes pour le globe oculaire, nécessitent dès la réception du patient des lavages oculaires abondants et répétés avant l’orientation vers un milieu spécialisé.
Les contusions oculaires peuvent entraîner des hémorragies et des inflammations intraoculaires, des luxations du cristallin et la perte de sa transparence, des oedèmes du pôle postérieur ou des hypertonies oculaires nécessitant un traitement adapté à chaque situation.
Les plaies du globe avec ou sans corps étranger intraoculaire représentent une urgence chirurgicale afin de rétablir l’intégrité du globe et éviter les infections oculaires dans un premier temps, puis extraction du corps étranger le plus souvent, dans un deuxième temps, après avoir déterminé sa nature et son siège pour espérer une récupération visuelle correcte.
Les plaies de paupières nécessitant une prise en charge en ophtalmologie sont les plaies du bord libre et les plaies avec une atteinte des voies lacrymales.
4) Endophtalmie postopératoire
Une BAV brutale avec douleur et rougeur chez une personne aux antécédents de chirurgie oculaire de moins d’un mois doit faire évoquer le diagnostic d’endophtalmie postopératoire. Il s’agit d’une infection bactérienne intraoculaire grave. La prise en charge doit être rapide en milieu spécialisé pour éviter la perte fonctionnelle du globe oculaire.
5) Uvéite antérieure
L’uvéite antérieure est une inflammation de l’uvée, tunique nourricière de l’oeil. Une cause locale ou générale peut être à l’origine de cette inflammation. C’est pourquoi l’interrogatoire occupe une place importante dans la recherche d’anomalies extra-oculaires et de maladies de système (maladie articulaire, maladie de Behçet, sarcoïdose). Le tableau clinique regroupe une baisse visuelle, une rougeur, une douleur oculaire et une photophobie importante. Le diagnostic positif se fait à la lampe à fente par l’ophtalmologiste. Le traitement ophtalmologique repose sur des collyres et pommades anti-inflammatoires associés à un traitement étiologique lorsqu’une cause générale ou locale est retrouvée.
Sur un oeil blanc et indolore
1) Atteinte du nerf optique (NO)
La neuropathie optique ischémique antérieure aiguë (Noiaa) se voit chez le sujet âgé. Il s’agit d’une ischémie brutale des artères irriguant la tête du NO. La BAV est brutale et souvent très profonde. L’oeil est calme. Une altération du réflexe photomoteur peut être retrouvée. Le diagnostic se fait au fond d’oeil par l’observation d’un oedème de la papille. Les causes sont multiples : la maladie de Horton, l’artériosclérose, les vascularites.
La neuropathie optique rétrobulbaire (Norb) se voit chez le sujet jeune. Il s’agit d’une atteinte inflammatoire du nerf optique. La BAV est brutale, plus ou moins profonde, associée classiquement à des douleurs à la mobilisation de l’oeil et à un réflexe photomoteur aboli. Le fond d’oeil est normal, sans oedème de la papille. La cause la plus fréquente est la sclérose en plaques.
2) Pathologie vitréo-rétinienne
• Le décollement de rétine est une cause fréquente de BAV brutale. Il se définit par la séparation du neuroépithélium de l’épithélium pigmentaire rétinien. Soit la baisse de la vision est totale si le décollement intéresse la macula (région centrale de la rétine), soit elle est localisée. Le patient décrit ainsi un scotome positif dans le territoire de la rétine décollée. Les patients sont le plus souvent myopes.
Le traitement est chirurgical en urgence pour espérer une bonne récupération visuelle, associé au traitement préventif par laser des lésions prédisposantes au décollement de rétine de l’oeil adelphe.
• L’hémorragie intravitréenne (HIV) est une cause brutale de BAV. Le patient décrit une pluie noire ou grise dans le champ visuel de l’oeil atteint. L’HIV étant par définition localisé dans le vitré, l’oeil est blanc, sans hémorragie conjonctivale. Les causes sont multiples (déchirure rétinienne, diabète, drépanocytose). Le traitement dépendra de l’étiologie et la chirurgie sera envisagée si la résorption du sang ne se fait pas spontanément ou s’il existe un décollement rétinien associé.
• L’occlusion artérielle rétinienne est un accident grave pouvant aboutir à une perte définitive de la vision. La baisse de la vision est associée à une mydriase unilatérale et l’examen du fond d’oeil retrouve une ischémie rétinienne contrastant avec l’aspect rouge cerise de la macula ; les vaisseaux sont grêles et déshabités. Il s’agit d’un accident vasculaire neurologique qui sera pris en charge comme un AVC. Le bilan étiologique vise à rechercher les facteurs de risque cardio-vasculaires. Cet accident peut toucher une branche de l’artère centrale de la rétine donnant une amputation du champ visuel du territoire touché par l’occlusion.
• L’occlusion veineuse rétinienne donne une BAV brutale. Elle survient le plus souvent chez les patients suivis pour glaucome, HTA, artériosclérose, prise de contraception orale ou hémopathies. Le diagnostic se fait au fond d’oeil et retrouve des veines dilatées et tortueuses, des hémorragies rétiniennes en flammèches et des nodules cotonneux. Les traitements sont multiples et adaptés à chaque cas.
• Plusieurs pathologies touchant la macula sont responsables de BAV brutales. Cette baisse est associée classiquement à des métamorphopsies et à des micropsies. Chez le sujet âgé, se méfier d’une complication de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (Dmla). Chez le sujet jeune, les choriorétinites toxoplasmiques et séreuses centrales sont les atteintes maculaires les plus fréquentes, responsables de BAV. La choriorétinite toxoplasmique se traduit au fond d’oeil par un foyer choriorétinien blanchâtre dans l’aire maculaire. L’évolution sans traitement se fait vers une cicatrice atrophique de la rétine. La choriorétinite séreuse centrale est un décollement séreux du neuroépithélium de la région maculaire survenant chez l’homme jeune avec notion de stress. L’hypermétropie croissante et acquise est le signe dominant et l’examen du fond de l’oeil met en évidence une bulle maculaire qui régresse généralement sans traitement.
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