SANS FAIRE de promesse ferme, la ministre de la Santé se montre favorable, dans le contexte actuel, à une prochaine hausse du C. «Je note avec satisfaction qu'il n'y a pas de dérapage des dépenses, a déclaré Roselyne Bachelot lors d'une conférence de presse organisée par l'AJIS (Association des journalistes de l'information sociale). Les conditions sont réunies pour porter le tarif de la consultation à 23euros dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale.» (LFSS 2008). Le rappel du «cadre» par la ministre n'est évidemment pas anodin : la revalorisation est donc soumise à l'absence d'intervention du comité d'alerte. En outre, il y aura un «délai de six mois», a-t-elle rappelé, entre la signature de l'accord tarifaire conventionnel et la date de son entrée en vigueur, au mieux à la fin 2008.
Une fois de plus, Roselyne Bachelot a pointé du doigt les «2milliards d'euros» de dépassements d'honoraires, dont «1,5milliard en médecine de ville». Elle a distingué cependant la «médecine de premier recours, où les dépassements sont peu élevés», et l'hôpital public, où sont pratiqués des tarifs allant «parfois jusqu'à 40 fois le tarif opposable». Si la ministre adopte une «démarche volontariste» en matière de transparence tarifaire (obligations d'affichage et de devis renforcées), elle ne s'immiscera pas dans la négociation à venir sur le secteur optionnel, qui doit favoriser le remboursement de compléments d'honoraires par les complémentaires. La ministre «prendra (ses) responsabilités», une fois la discussion «terminée» entre syndicats médicaux, complémentaires et assurance-maladie, si possible «pour l'été».
Confortée au sein du gouvernement Fillon après les élections municipales, la ministre de la Santé est revenue sur les grandes réformes qui l'attendent dans les mois à venir. Les états généraux de l'organisation de la santé (EGOS) feront leur «atterrissage le 9avril», mais «rien n'est ficelé» d'avance, a assuré Roselyne Bachelot, pour démentir les accusations de certains syndicats médicaux. En tout cas, elle constate déjà «un consensus sur un certain nombre de pistes», telles que les pôles de santé libéraux pluridisciplinaires dans les zones sous-médicalisées.
De même, avant la remise du rapport Larcher au début avril, elle a relevé dans le débat à Bordeaux (« le Quotidien » du 25 mars) «des avancées intellectuelles intéressantes». L'idée de développer des contrats privés entre médecins et hôpitaux (soutenue par la Fédération hospitalière de France et les directeurs de CHU) en fait partie, «même si tout cela doit relever du volontariat», a nuancé Roselyne Bachelot. Elle souhaite aussi que chaque «projet élaboré par la communauté médicale» soit placé «au coeur» de la gestion de l'établissement et que «le directeur ait les moyens de le mettre en oeuvre». Enfin, la ministre voit la création des «établissements de santé territoriaux» comme «l'une des propositions les plus prometteuses» du rapport Larcher, à condition qu'elle soit «portée par la volonté des acteurs».
La gestion du risque pour les ARS ?
A propos des agences régionales de santé (ARS), Roselyne Bachelot a confirmé qu'elle envisage de leur confier l'organisation des soins et la gestion du risque maladie, sans toucher toutefois au maillage des caisses primaires. La ministre revendique clairement le pilotage national des ARS, tandis que ces dernières pourront passer des «conventions avec l'assurance-maladie sur la prévention ou la maîtrise médicalisée des dépenses». Les directeurs d'ARS, nommés en conseil des ministres, devront «avoir une légitimité forte», qu'ils soient hauts fonctionnaires de l'Etat, issus de l'assurance-maladie ou du secteur privé.
Les pistes de réformes dégagées par les EGOS et la mission Larcher pourront se concrétiser à l'automne dans le projet de loi de modernisation de la santé, voire le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2009, car celui-ci «fera l'objet, comme le PLFSS 2008, de mesures importantes sur l'organisation des soins», a souligné Roselyne Bachelot.
Une réforme du financement en 2009.
La ministre a sorti de son chapeau un troisième projet de loi «sur les questions de financement de l'assurance-maladie» qui serait présenté «peut-être au premier semestre 2009», avec des «premières annonces» dès le mois de juillet prochain. Ce projet de loi inclurait éventuellement des mesures sur les recettes (sachant que le PLFSS est plus apte à modifier le mode de financement de la protection sociale en général). Il devrait surtout revoir «la structuration des dépenses» de santé, entre ce qui relève respectivement de l'assurance-maladie et des complémentaires santé.
En termes choisis, la ministre a clairement fait comprendre que le bouclier sanitaire préconisé par Martin Hirsch n'était ni fait ni à faire. Ce dispositif de plafonnement des restes à charge (RAC) en fonction du revenu «nettoie les forfaits, les tickets modérateurs, les franchises et les ALD», a expliqué Roselyne Bachelot, et a le défaut de ne tenir compte ni des RAC à l'hôpital ni des dépassements d'honoraires. De plus, a-t-elle ajouté, «le bouclier sanitaire vient percuter en plein le pacte social conclu à la Libération» (selon lequel chacun paye selon ses moyens et reçoit les prestations de la Sécu selon ses besoins). Il n'y a «pas de consensus politique sur cette affaire» et «la réforme des ALD ne me paraît pas passer par le bouclier sanitaire». La ministre envisage pour les affections de longue durée une révision des droits et des dépenses (respect des ordonnances bizones), ainsi qu'une «amélioration des parcours de soins», mais elle «ne veut pas tuer la notion d'ALD».
FMC et PDS : la ministre rassure les médecins
Bien que la première version de son texte ait été retoquée par le Conseil d'Etat, Roselyne Bachelot a «toujours l'ambition de sortir un décret sur la FMC avant l'été». En cas de «difficultés» juridiques, elle a reconnu que la mise en place de la FMC obligatoire nécessitera une disposition législative, et donc un nouveau report. En attendant, la ministre rappelle que «l'ensemble des crédits de formation accumulés par les médecins seront apportés à leur compte quand les textes réglementaires sortiront».
Après les remous provoqués par la sectorisation des gardes, elle a tenu de même à rassurer. N'étant «pas insensible aux difficultés de terrain», elle lance une «mission d'appui» pour aider les préfets à organiser la permanence des soins. Objectif fixé, «2000 secteurs à fin 2008» (au lieu de 2 300), avec des modulations locales.
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