ESTIMANT que le niveau des honoraires en médecine de ville peut être un frein à l'accès aux soins – au même titre que l'absence de couverture complémentaire –, la ministre de la Santé a donné le la de sa politique tarifaire cette année.
Lors de la présentation du nouveau «chèque santé» à la caisse primaire d'assurance-maladie de La Garenne-Colombes, dans les Hauts-de-Seine, Roselyne Bachelot a en effet annoncé que la plate-forme téléphonique « Infosoins » de la Sécu allait se développer en 2008 pour «enrichir ses informations» à l'intention des assurés.
Généralisé à la France entière depuis début 2007, le service Infosoins des caisses répond aujourd'hui, selon la ministre, à «plus de 20millions de questions par an» sur les tarifs médicaux, le conventionnement des praticiens, leur secteur d'exercice, le niveau de remboursement ou encore l'utilisation de la carte Vitale. Courant 2008, Infosoins devrait renseigner aussi les patients sur les soins dentaires (à partir d'avril), les tarifs des actes techniques les plus fréquents (imagerie, chirurgie…, à compter du mois de septembre), et, plus tard, sur les montants des frais de séjour des établissements de santé.
Le respect de l'affichage.
En outre, l'assurance-maladie réfléchit, en concertation avec l'Ordre des médecins, à l'ajout d' «éléments qualitatifs» relatifs aux praticiens libéraux, fondés par exemple sur des attestations de formation professionnelle conventionnelle (FPC), de formation médicale continue (FMC) ou d'évaluation des pratiques professionnelles (EPP). La Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) compte mettre en ligne sur Internet l'ensemble des informations fournies par la plate-forme téléphonique Infosoins à l'horizon 2009.
Par ailleurs, Roselyne Bachelot veut mieux faire respecter les obligations d'affichage des tarifs dans les cabinets médicaux et contrôler davantage les dépassements d'honoraires, qui restent «légitimes» dès lors qu'ils sont pratiqués «avec tact et mesure», a-t-elle nuancé.
La ministre mise sur l'application des nouvelles mesures incluses dans la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS pour 2008, entrée en vigueur le 21 décembre) et, en particulier, sur le fameux devis prévu par l'article 39. Décrié par les syndicats médicaux, le dispositif exige des médecins et des chirurgiens-dentistes une information écrite préalable sur les tarifs des actes lourds et les dépassements facturés, à partir d'un seuil d'honoraires fixé ultérieurement par arrêté ministériel. Toute entorse à cette nouvelle obligation sera sanctionnée par une pénalité financière de 5 546 euros au maximum (soit deux fois le plafond mensuel de la Sécurité sociale).
Le même article 39 de la LFSS 2008 renforce l'obligation d'affichage des tarifs qui avaient été instaurées en 1996 sous le gouvernement Juppé. Il l'étend aux dépassements d'honoraires et prévoit, là encore, des sanctions en cas de non-respect de cette obligation d'affichage (selon des modalités précisées par un décret en préparation).
Enfin, la ministre a déploré qu' «un trop grand nombre d'assurés (soient) victimes de refus de soins par certains professionnels de santé». Roselyne Bachelot constate que ce phénomène de refus de soins vis-à-vis des bénéficiaires de la CMU est «très minoritaire», mais trouve «impensable qu'une population défavorisée soit dans l'incapacité de se faire soigner».
Des chèques santé pour l'aide à la complémentaire
Roselyne Bachelot a remis à des assurés les tout premiers « chèques santé » destinés à couvrir environ la moitié du coût d'acquisition d'une complémentaire. D'un montant de 100 à 400 euros (en fonction de l'âge et de la situation familiale de l'assuré), le nouveau chèque santé vise à faciliter les démarches des 2 millions de personnes qui peuvent bénéficier en théorie de l'aide à l'acquisition d'une complémentaire (ACS). L'ACS est censée gommer en partie l'effet de seuil de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C, sous conditions de ressources). Cette aide est donc destinée aux personnes dont les revenus mensuels dépassent le plafond de la CMU-C (606 euros), mais qui restent inférieurs à 727,25 euros. Or, jusqu'à présent, seulement 500 000 assurés ont réclamé la demande d'attestation nécessaire à l'ACS et 300 000 en ont effectivement bénéficié. La faute à «un manque de notoriété» de l'ACS, note le directeur de l'assurance-maladie, Frédéric Van Roekeghem.
Pour promouvoir les chèques santé, un nouveau formulaire (imprimable sur www.ameli.fr) est diffusé. Les divers organismes de Sécurité sociale vont aussi se mobiliser pour contacter les publics concernés, notamment les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) et du minimum vieillesse.
Pour le CISS (collectif de patients et d'usagers), le nouveau dispositif «s'apparente à une opération de communication destinée à faire oublier l'effroyable régression que constitue la mise en place des franchises médicales». Les chèques santé ne résolvent, selon le CISS, ni «les effets de seuil des dispositifs CMU-C et ACS», ni le problème des «revenus d'existence» des malades chroniques, ni celui des «garanties moyennes ou faibles» des contrats complémentaires souscrits au moyen de l'ACS.
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