A situation exceptionnelle, prise en charge d'exception. Pour rembourser les soins des victimes de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse, le 19 septembre 2001, la caisse primaire d'assurance-maladie de Haute-Garonne a reconduit jusqu'au 31 décembre prochain le principe du remboursement à 100 % des prestations, en particulier des soins, dans le cadre d'un tiers payant généralisé, au titre d'une couverture-maladie exceptionnelle. Ces mesures dérogatoires donnent lieu, deux ans après, à un bilan sur les conséquences à moyen et long terme, de la catastrophe.
Parmi les paramètres analysés par l'assurance-maladie, l'indemnisation pour réduction de la capacité de travail (incapacité permanente) : sur 2 363 accidents du travail, 1 986 ont perçu une indemnisation ; les 377 autres victimes ne peuvent encore faire l'objet d'une évaluation de leurs séquelles en raison de la poursuite des soins dont ils bénéficient.
Dans plus de 80 % des cas, les incapacités permanentes ne dépassent pas le seuil des 9 %. Les séquelles ne sont donc pas jugées « particulièrement lourdes », pour la très grande majorité d'entre elles.
A 46 %, elles sont oto-rhino-laryngologiques (ORL). 55 % de celles-ci correspondent à des acouphènes, 36 % à une baisse de l'acuité auditive et 6 % à une surdité bilatérale appareillée.
Les séquelles psychiatriques concernent 40 % des personnes indemnisées. Parmi elles, 57 % présentent des lésions liées à une anxiété post-traumatique, 32 % à un stress post-traumatique et 7 % à un syndrome anxiodépressif.
Ces conséquences de l'explosion sur l'état de santé psychologique des victimes étaient décelables très tôt en observant la consommation des anxiolytiques, hypnotiques et antidépresseurs. Dans les six semaines qui ont suivi le 19 septembre, 3 813 nouveaux traitements supplémentaires par anxiolytique ou hypnotique étaient dénombrés en Haute-Garonne, avec, pour un tiers d'entre eux, un antidépresseur. Mais, dès le 20 septembre, on enregistrait le doublement du nombre de nouveaux traitements et, le 21 septembre, on constatait leur triplement.
Six mois plus tard, 19 % des victimes se voyaient prescrire des antidépresseurs. Un traitement qui, sept fois sur dix, avait commencé dans les trente jours suivant le début d'un traitement par anxiolytique ou par hypnotique.
A noter encore des séquelles ostéo-articulaires, à hauteur de 8 % des séquelles totales : lésions des membres supérieurs et inférieurs, lésions du tronc (thorax, rachis, abdomen).
Les études se poursuivent
L'assurance-maladie est loin d'en avoir fini avec l'évaluation épidémiologique d'AZF. Elle poursuit sa collaboration avec l'Institut de veille sanitaire (InVS), pour étudier les symptômes irritatifs et pulmonaires liés aux produits rejetés dans l'atmosphère lors de l'explosion ou ultérieurement (ammoniac, dioxyde d'azote, particules, chlore, protoxyde d'azote, acide nitrique). Selon le rapport d'étape publié au printemps dernier sur les conséquences environnementales de l'explosion, le niveau d'exposition de la population par voie aérienne a pu provoquer des effets irritatifs respiratoires et oculaires transitoires sans caractère de gravité (« le Quotidien » du 28 mars 2003).
D'autres investigations à très grande échelle épidémiologique se poursuivent simultanément. L'une a débuté l'an dernier, avec 50 000 autoquestionnaires adressés aux sauveteurs et aux salariés qui travaillaient dans les lieux les plus proches de l'explosion.
Une autre enquête a été lancée par le comité scientifique de suivi épidémiologique que préside le Pr Thierry Lang (InVS), en collaboration avec l'INSEE, pour étudier 2 206 foyers tirés au sort dans la ville, avec une représentation plus importante de ceux qui résident à proximité du site ; cette enquête vise à mesurer les conséquences de l'explosion à la fois en termes de santé et de conséquences matérielles, familiales, professionnelles et sociales. Les conclusions en sont attendues pour le début de l'année prochaine (« le Quotidien » du 16 janvier 2003). AZF restera sans doute la catastrophe la plus « investiguée » dans les annales épidémiologiques françaises.
Commissions pour usines à risque
Soixante commissions locales d'information réunissant industriels et riverains des usines les plus dangereuses ont déjà été créées et 67 autres doivent voir le jour d'ici à la fin de l'année, annonce le ministère de l'Ecologie.
La création de ces commissions avait été proposée par l'ancien ministre Vert de l'Environnement, Yves Cochet, en novembre 2001, quelques semaines après la catastrophe d'AZF. L'idée a été reprise par Roselyne Bachelot et inscrite dans la loi sur la prévention des risques technologiques et naturels du 30 juillet 2003.
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