De notre correspondant
Les dépenses de pharmacie ont connu en Allemagne (comme en France) une très forte hausse depuis le début de l'année et l'assurance-maladie affiche un déficit de 2,5 milliards d'euros (près de 16,4 milliards de francs) pour les six premiers mois de 2001. Le gouvernement du chancelier Schroeder vient de rendre public un plan d'économies concernant le médicament, qui doit notamment permettre d'éviter de nouvelles hausses de cotisations sociales et d'économiser en année pleine environ 1,5 milliard d'euros, soit près de 10 milliards de francs.
Un plan qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler celui qui a été rendu public en France par Elisabeth Guigou, ministre de l'Emploi et de la Solidarité, en juin dernier.
Privilégier la substitution du pharmacien
La mesure la plus spectaculaire de ce programme d'économies concerne l'encouragement à la substitution par le pharmacien d'un médicament prescrit par le médecin, par un autre moins cher. Certes, ce mécanisme est autorisé depuis plus de dix ans, mais il est très peu utilisé du fait de l'opposition des médecins. En effet, la substitution ne peut être faite par les pharmaciens que si les prescripteurs l'autorisent expressément en cochant une case sur l'ordonnance, ce que font à peine 1 % des médecins allemands.
Avec le nouveau système, les pharmaciens auront le droit de substituer toute prescription, sauf lorsque le médecin s'y opposera formellement, (comme en France) pour des raisons qu'il pourra être appelé à justifier. En clair, le nombre d'ordonnances substituables devrait faire un bond spectaculaire, et le gouvernement espère que cette mesure dégagera entre 250 et 500 millions d'euros d'économies par an (de 1,63 milliard de francs à 3,27 milliards de francs).
Les pharmaciens pourront substituer aussi bien une spécialité qu'un générique par un autre générique moins cher, ce qui augmentera encore la part de ces produits sur le marché : actuellement, le générique représente 46,2 % des prescriptions de médicaments remboursables, soit 31,8 % des dépenses de pharmacie. La majorité des génériques prescrits sont des « génériques de marque » commercialisés sous leur propre nom et mis sur le marché soit par des filiales de grands groupes, soit par des firmes spécialisées.
Baisses de prix des médicaments récents
De plus, les industriels devront baisser de 5 % le prix de leurs spécialités non régies par le système des forfaits de remboursement, c'est-à-dire essentiellement les médicaments les plus récents, pour lesquels il n'existe pas de générique. Cette mesure devrait dégager 175 millions d'euros d'économies (1,14 milliard de francs).
Plusieurs autres mesures concernent le mode de fixation des « rabais » que doivent consentir les pharmaciens aux caisses de maladie sur le prix des médicaments dispensés dans le cadre de l'assurance-maladie (300 millions d'euros d'économies, 1,96 milliard de francs), et les critères économiques de mise sur le marché des nouveaux produits : l'objectif étant d'éviter la commercialisation de produits « redondants ».
Les critiques du corps médical
Le corps médical a vivement dénoncé ce plan qui, selon lui, remet en cause la liberté de prescription des médecins et n'entraînera pas les économies prévues par le gouvernement.
Bien entendu, l'industrie pharmaceutique n'est pas satisfaite de ces mesures et redoute surtout qu'elles n'entraînent une baisse de l'innovation et de la qualité des médicaments. Elle estime que le développement de la substitution poussera les pharmaciens à délivrer les médicaments qui sont les plus avantageux pour eux-mêmes, mais sans que les patients ni l'assurance-maladie ne bénéficient de ces économies.
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