Un entretien avec le Pr Jean-Pierre Pruvo*

AVC : l'IRM doit devenir la règle

Publié le 17/12/2003
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Chaque année, en France, 120 000 nouveaux AVC se produisent, entraînant 25 000 décès. Ces accidents sont responsables de séquelles fréquentes, affectant 350 000 personnes, et lourdes, dans la moitié des cas. 80 % des AVC sont ischémiques et principalement dus à une HTA (30 %), à une cause cardiaque de type trouble du rythme ou valvulopathie (20 %) ou à un athérome des vaisseaux cervico-encéphaliques (20 %). Dans les AVC hémorragiques (20 % des AVC), l'HTA est également la cause prédominante. Une hospitalisation rapide des malades dans une unité de soins intensifs neurovasculaire permet d'améliorer le pronostic des AVC. D'où l'importance d'une reconnaissance précoce de ces accidents. Or la diversité des tableaux cliniques peut être un facteur de retard de la prise en charge et une source d'erreurs diagnostiques. L'imagerie a donc une place capitale, non seulement pour le diagnostic, mais également pour l'évaluation de la gravité et la décision thérapeutique (indication d'une fibrinolyse).
Chez les patients qui présentent un déficit neurologique focal brutal faisant suspecter un AVC, trois questions se posent. La première est de savoir si l'AVC est ischémique ou hémorragique. Une interrogation à laquelle le scanner peut répondre de façon satisfaisante, avec, toutefois, des réserves concernant les ischémies récentes, car cet examen est souvent négatif au cours des six premières heures de l'accident ischémique, ainsi que les lésions situées hors du territoire de l'artère cérébrale moyenne. L'IRM présente donc un avantage certain, puisqu'elle permet de différencier l'ischémie de l'hémorragie, et de mettre en évidence très précocement le parenchyme ischémié grâce aux séquences FLAIR (FLuid Attenuated Inversion Recovery) et de diffusion. La deuxième interrogation est celle du diagnostic différentiel avec les tumeurs hémorragiques et les plaques de sclérose. Là encore, l'IRM s'impose, la séance FLAIR permettant d'éliminer une cause non vasculaire. Les séquences de perfusion, quant à elles, révèlent la présence d'éventuelles suppléances, répondant ainsi à la troisième question. En outre, les informations fournies par le couplage des séquences de diffusion et de perfusion sont utiles pour poser les indications de la fibrinolyse. Enfin, la séquence ARM (angiographie par résonance magnétique) permet d'évaluer la qualité de la vascularisation cérébrale. L'IRM doit donc être la règle en cas de suspicion d'AVC. Ce qui n'est pas le cas actuellement, en raison des difficultés d'accès en urgence à cet examen, liées notamment à l'insuffisance du nombre d'appareils et au problème posé par le fonctionnement des équipes. Pour améliorer la situation, il faut augmenter le parc des IRM et le nombre de radiologues hospitaliers, mais aussi leur proposer une formation médicale continue adaptée aux nouveaux besoins et réformer l'organisation de la prise en charge de l'AVC.

* CHU de Lille.

Un critère d'évaluation dans les essais thérapeutiques ?

L'IRM pourrait aussi devenir un outil essentiel pour la recherche thérapeutique dans les AVC aigus. Mais, pour prouver son intérêt dans cette application, il est nécessaire, au préalable, d'évaluer un certain nombre de points concernant, entre autres, la fiabilité des différences entre le volume lésionnel de l'AVC apprécié par les IRM de diffusion et de perfusion en tant que marqueur du tissu à risque d'infarctus, les seuils de quantification du coefficient apparent de diffusion prédisant l'évolution du tissu vers l'infarctus. Tel est l'objectif de l'étude VIRAGE*, retenue dans le cadre du Programme hospitalier de recherche clinique 2000 et lancée en mai dernier. Il s'agit d'une étude prospective menée sous la coordination des Prs V. Dousset et J.-M. Orgogozo (Bordeaux), et à laquelle participent sept centres. Elle inclura trois cents patients admis en urgence dans un délai de moins de douze heures pour un AVC ischémique du territoire de l'artère cérébrale moyenne. Ces sujets bénéficieront, notamment, d'un suivi IRM, à raison de trois examens entre J0 et J45. Les résultats de l'étude sont attendus dans un an.

* Valeur prédictive des paramètres d'imagerie par résonance magnétique précoce dans l'infarctus cérébral aigu.

Dr Catherine FABER

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7449