L'équipe de Solveig Gretarsdottir, du centre génétique de CODE à Reykjavik en Islande, décrit cette découverte dans « Nature Genetics ».
L'AVC, on le sait, est la première cause d'invalidité majeure et la troisième cause de décès dans les pays occidentaux. On distingue l'AVC hémorragique (10 à 20 %) et l'AVC ischémique (80 à 90 %). L'AVC ischémique peut être sous-divisé en :
1) maladie occlusive des gros vaisseaux (ou AVC carotidien), généralement due à un processus athéroscléreux ;
2) maladie occlusive des petits vaisseaux, due à un rétrécissement non athéroscléreux des petites artères terminales dans le cerveau ;
3) AVC cardiogénique dû à des caillots sanguins issus du coeur, sur fond de fibrillation auriculaire ou de maladie ischémique.
Toutes les formes d'AVC partagent des facteurs de risque : HTA, diabète, hyperlipidémie et tabagisme.
Un antécédent familial est un facteur de risque
Un antécédent familial d'AVC représente aussi un facteur de risque indépendant, ce qui fait supposer que des facteurs génétiques interagissent avec des facteurs environnementaux.
Les facteurs génétiques dans les formes courantes d'AVC restaient jusqu'ici inconnus.
L'équipe islandaise a réussi, l'année dernière, par une étude de liaison couvrant tout le génome, à localiser sur le chromosome 5 (5q12) un premier locus majeur de susceptibilité à l'AVC (lod score de 4,4).
Dans l'étude actuelle, l'équipe a affiné la localisation de ce locus et testé son association avec l'AVC. L'association la plus forte a été trouvée pour le gène PDE4D. Il code pour la phosphodiestérase 4D, une enzyme qui dégrade l'AMP cyclique.
Le gène PDE4D est surtout associé à deux formes ischémiques d'AVC - l'AVC carotidien et l'AVC cardiogénique -, autrement dit, les formes ischémiques d'AVC qui sont dues à l'athérosclérose. Cette association est indépendante des facteurs de risque connus d'AVC.
Tandis que les chercheurs n'ont pas trouvé, dans le gène PDE4D, des mutations fonctionnelles associées à l'AVC, ils ont constaté que trois isoformes différentes de PDE4D sont exprimées à plus faibles taux chez les individus affectés d'AVC.
Enfin, ils ont découvert que certaines combinaisons de polymorphismes dans les régions flanquant le gène, ou certains haplotypes, sont associés à un risque plus ou moins élevé d'AVC. Les haplotypes peuvent être classés en trois groupes : sauvage, à risque et protecteur.
Comment le gène PDE4D pourrait-il jouer un rôle dans la prédisposition à l'AVC ou dans l'athérosclérose sous-jacente ?
PDE4D est un régulateur important des taux intracellulaires d'AMPc, lequel joue un rôle central dans la transduction du signal et la régulation des réponses physiologiques. Le gène est exprimé dans la plupart des cellules qui jouent un rôle important dans le développement de l'athérosclérose (cellules musculaires lisses des vaisseaux, cellules endothéliales, lymphocytes T et macrophages). Dans les cellules musculaires lisses, de faibles taux d'AMPc majorent leur prolifération et leur migration, tandis que la hausse de l'AMPc réduit la formation des lésions néo-intimales et inhibe la prolifération des cellules musculaires lisses après lésion artérielle. Dans les lymphocytes T et macrophages, l'accumulation d'AMPc est généralement associé à l'inhibition des fonctions immunes.
Athérosclérose
« Nous proposons que le gène PDE4D est impliqué dans la pathogenèse de l'AVC à travers l'athérosclérose », concluent les chercheurs. « L'inhibition de PDE4D, en général, ou plus spécifiquement d'une ou de plusieurs de ses isoformes, par une petite molécule thérapeutique, pourrait peut-être diminuer le risque d'AVC chez ceux prédisposés par leur génotype PDE4D », suggèrent-ils.
Il est à noter que des inhibiteurs de la phosphodiestérase sont déjà utilisés pour traiter l'asthme, l'inflammation et les troubles de l'érection.
L'équipe travaille déjà sur le développement d'un test de dépistage génétique, ainsi que sur le développement de nouveaux médicaments, en partenariat avec Roche.
« Nature Genetics », 21 septembre 2003, DOI : 10.1038/ng1245.
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