PREVUE PAR LA LOI TEULADE de 1993, qui met en place les unions régionales, confirmée un an plus tard par la loi Veil de janvier 1994, la disposition permettant aux médecins libéraux de transmettre à l'union régionale des médecins libéraux dont ils dépendent, tous les renseignements ayant trait à leur activité, est enfin parue au « Journal officiel » du 24 février 2004.
Enfin, diront certains, qui regrettaient que les données médicales qu'ils transmettaient régulièrement aux caisses d'assurance-maladie, ne soient toujours pas à la disposition des unions comme la loi et la réglementation le prévoyaient pourtant.
Le décret est particulièrement important puisqu'il permettra désormais aux unions de disposer des mêmes informations que les caisses d'assurance-maladie et de faire leurs propres analyses du fonctionnement du système de sant - concernant du moins la médecine libérale - et d'en tirer parfois des conclusions différentes. « C'est la fin de la pensée unique », dit un syndicaliste, qui se réjouit de cette parution.
Utile à tout le monde.
Sans aller jusqu'à croire que tout sera différent selon que l'on soit de l'assurance-maladie ou de la médecine libérale, on peut toutefois penser qu'effectivement les interprétations et les analyses ne seront pas tout à fait identiques. Ce qui ne peut être profitable au système. C'est ce que pense, d'ailleurs, le président de l'Union nationale des omnipraticiens français (Unof, qui rassemble les généralistes de la Csmf), le Dr Michel Combier, qui estime que cette diversité sera utile à tout le monde. « Aux caisses d'assurance-maladie qui pourront s'enrichir d'une analyse différente parfois de la leur. Aux unions de médecins qui se voient confier ainsi une mission d'importance et primordiale dans la perspective des débats qui ne manqueront pas d'avoir lieu dans les prochains mois et les prochaines années », dit-il.
Cette opinion n'est pas unanimement partagée. Ainsi, le Dr Dinorino Cabrera, président du SML, sans remettre en cause le principe même de cette innovation, estime que les unions ne sont pas capables aujourd'hui « de recevoir et de traiter les 500 millions de feuilles de soins qui seront concernées par ce décret, d'autant que la plupart des unions n'ont ni le matériel ni le personnel adéquat compétent pour le faire ».<\!p>Alors que l'assurance-maladie, poursuit-il, « a un département de statistiques et d'informatique de tout premier ordre, de toute première qualité, avec des informaticiens qui sont absolument rompus à ce genre de démarche ». En clair, dit en substance le Dr Cabrera, il n'y a pas photo entre ce que peuvent faire les caisses et ce que peuvent réaliser les unions. Pour lui, « il aurait mieux valu s'entendre, comme l'a toujours préconisé le SML, avec l'assurance-maladie qui regrouperait, compacterait l'ensemble de ces informations, sans les traiter, avant de les transmettre aux unions ». Faute de quoi, si on l'en croit, les unions seront rapidement noyées sous la masse de dossiers qui leur arriveront chaque jour. Et la réforme aura manqué son but.
Cahier des charges.
C'est sans doute pour éviter ce sérieux inconvénient que les modalités techniques de transmission des informations devront obéir, selon les termes du décret, « à un cahier des charges élaboré conjointement par une instance constituée à cette fin par la conférence nationale des présidents des unions régionales, et par le groupement d'intérêt économique », mis en place par les caisses d'assurance-maladie. Ce cahier des charges sera soumis à la commission Informatique et Libertés et devra en particulier prévoir un dispositif permettant de préserver l'anonymat des patients et des médecins émetteurs.
Mais le décret est important aussi pour l'évaluation des pratiques professionnelles (EPP) des médecins libéraux. Se pose d'ailleurs, à ce niveau, le problème de l'anonymat du médecin. Certes, le code de la santé publique dans son article L. 4134-4 prévoit que l'anonymat du médecin qui participe à l'EPP peut être levé. Encore faut-il que cela se fasse avec toutes les précautions voulues. Le décret, qui vient de paraître au « Journal officiel », précise qu'il ne peut être levé qu'avec « l'accord exprès du médecin concerné » et dans des conditions qui seront précisées dans le cahier des charges mentionné plus haut et soumis à la Cnil. Une façon de rassurer tout le monde.
Mais le plus difficile commence maintenant pour les unions régionales qui devront réussir, faute de quoi une réforme essentielle que chacun attendait avec impatience pourrait rapidement rater son but et surtout décevoir son monde.
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