EN PLEIN EXAMEN du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS 2008), les sénateurs ont fait une pause pour se pencher ensemble sur la démographie médicale et, plus particulièrement, la liberté d'installation. L'occasion pour Roselyne Bachelot de rappeler que, si les pouvoirs publics sont «garants de (cette) liberté d'installation», ils doivent aussi «garantir l'accès de tous à des soins de qualité». Une apparente quadrature du cercle que résume la ministre de la Santé dans une formule : «Nous ne résoudrons pas le problème de la démographie médicale par la mise en oeuvre de mesures incitatives ou coercitives, mais en engageant une réflexion globale sur notre système de santé.» Roselyne Bachelot assure que les mesures incitatives «doivent être privilégiées», mais dit aussi que «les débats doivent être ouverts aux propositions les plus innovantes. (...) Nous conduirons cette réflexion sans tabou, animés par le seul souci de trouver des réponses concrètes aux préoccupations des Français».
Comment innover dans le domaine de la répartition des médecins sur le territoire. Roselyne Bachelot a cité quelques pistes tracées il y a peu par le sénateur (UMP) du Puy-de-Dôme, Jean-Marc Juilhard, dans un rapport consacré à l'offre de soins (« le Quotidien » du 12 octobre) : «Le recensement des besoins, la valorisation et l'évaluation des dispositifs en place et l'information des plus jeunes, la poursuite de la simplification administrative, le développement des centres de santé, l'évolution de l'examen classant national et la valorisation des maîtres de stage.»
Une politique aux « faibles résultats ».
Second intervenant de ce débat, Alain Vasselle, rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat. Le sénateur (UMP) de l'Oise a rappelé pour sa part que les «résultats de la récente politique d'incitation» menée par le précédent gouvernement étaient «faibles». Plus grave encore, il a mis l'accent, tout comme le faisait le rapport Juilhard, sur «le manque d'information sur ces dispositifs, y compris dans les services de l'Etat». Pour Alain Vasselle, «le ministre en charge (du dossier) n'a pas suffisamment secoué ses services pour obtenir une traduction concrète des mesures législatives, notamment en matière d'aménagement du territoire».
De son côté, Nicolas About, sénateur (UC-UDF) des Yvelines, président de la commission des affaires sociales du Sénat, note que «le problème n'est pas tant la pénurie que le temps médical, celui que le médecin consacre à l'examen de ses patients». Et propose quelques solutions, comme la délégation de tâches, la simplification administrative, ou encore les maisons de santé pluridisciplinaires chères au sénateur Juilhard.
Pour François Autain (groupe communiste républicain et Citoyen, Loire-Atlantique), «les gouvernements, depuis cinq ans, ont multiplié les mesures brouillonnes, superposées, sans concertation ni stratégie». Avant de citer «l'excellent rapport Juilhard», et notamment ses préconisations sur les maisons de santé pluridisciplinaires.
Quant à Muguette Dini (groupe Union centriste-UDF, Rhône), elle juge que le nombre important de praticiens exerçant dans les zones surdotées en offres de soins pose un problème financier aux caisses, car cette densité provoque «une envolée des soins». Muguette Dini n'a pas peur des mots et lâche ceux qui fâchent : les aides à l'installation donnant des résultats très décevants, assure-t-elle en substance, «faut-il envisager des mesures coercitives» ? A cette question, elle répond toutefois par la négative. Car Muguette Dini cite l'exemple de l'Allemagne où, depuis 1993, le conventionnement à l'installation est limité dans les zones où la densité médicale est supérieure de 10 % à la moyenne nationale, tandis que, inversement, l'installation est encouragée dans les zones à faible densité médicale. «Cette politique, estime Muguette Dini, a détourné les étudiants des études médicales au profit d'autres filières universitaires, et aucune amélioration dans la répartition géographique n'a été enregistrée.» Si bien que la sénatrice du Rhône milite pour une politique qui rende les territoires ruraux attractifs pour les médecins et leurs familles, et pour «le transfert de nouvelles compétences médicales à des professionnels paramédicaux».
Enfin, pour Jean-Pierre Godefroy (groupe socialiste, Manche), «les préconisations du rapport Juilhard nous conviennent, mais il faut aller plus loin: la régulation de l'installation nous semble indispensable à terme».
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature