DANS LE ronronnement à peine perceptible de ses moteurs, le « Road To Mandalay » glisse lentement sur les eaux lisses et jaunâtres d'un étroit chenal enserré de dunes de sable avant que les rives ne s'élargissent soudain en un véritable bras de mer large de plusieurs kilomètres. Au loin, à perte de vue, émergent les silhouettes des temples et des pagodes aux dômes dorés ou éclatants de blancheur. Paysans, commerçants et pêcheurs empruntent chaque jour cette souveraine route fluviale, qui, des pentes de l'Himalaya au delta de la baie du Bengale, traverse le Myanmar.
Depuis 1996, le « Road To Mandalay » sillonne le fleuve, pour des croisières entre Mandalay, l'ancienne capitale de la Birmanie, jusqu'à Pagan, l'un des sites archéologiques les plus magiques d'Asie.
Propriété du groupe Venice Simplon - Orient-Express – qui exploite également le train Eastern & Oriental Express reliant Bangkok à Singapour –, ce luxueux bateau de croisière, véritable « 5-étoiles flottant » d'une centaine de mètres de long, peut accueillir un maximum de 108 passagers privilégiés.
Chacune des 58 cabines (singles, doubles et doubles luxe) avec douche, coffre-fort, télévision (par satellite), possède, pour jouir des paysages, de vastes hublots panoramiques ouverts sur le fleuve, pont observatoire à ciel ouvert, avec bar et piscine, et pont principal, où se trouvent bar, salon, boutique et restaurant.
La cuisine, d'inspiration asiatique, mettant à l'honneur les saveurs birmanes, mais aussi de jolis plats européens du jeune chef vendéen Yannis Martineau, est exquise, aussi bien au snack de plein air que servie dans la luxueuse salle à manger, où, pour le dîner, la veste, assortie de préférence avec une cravate, est naturellement de rigueur.
Un rêve d'or et de pierre.
Au lever du soleil, tel un phare brillant, apparaît soudain le dôme d'or en forme de cloche de la pagode Swezigon, le lieu le plus sacré de Pagan (rebaptisé Bagan), l'ancienne capitale des rois birmans. Classé patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco, le site de Pagan rivalise de beauté avec celui d'Angkor, au Cambodge. Du XIe au XIIIe siècle, les monarques birmans firent construire à tour de bras des milliers de pagodes et de temples en brique cuite, décorés de bas-reliefs en stuc, ornés de peintures murales polychromes et recouverts de plaques d'or. Sur les cinq mille monuments bouddhiques érigés sur le site de plus de 40 km2, deux mille pagodes et stupas ont été recensés. Des fastueux palais du grand roi guerrier Anawratha, vainqueur des Môn en 1057, il ne reste rien. Invasions mongoles, inondations et tremblements de terre sont passés par là.
Outre le Swezigon, le plus vaste, qui abrite deux reliques de Bouddha – sa clavicule et une dent – et les statues des trente-sept « Nat » – les malicieux ou méchants petits génies prébouddhiques –, on peut admirer l'un des temples les mieux conservés de Pagan, le monumental Ananda (57 mètres de haut) et ses quatre statues géantes de Bouddha en or massif.
Après Pagan, passé le pont Ava, seul et unique pont enjambant le fleuve, se dressent, derrière la rive gauche de l'Irrawaddy, les collines de Sagaing, dont les flancs sont littéralement couverts de pagodes blanches aux flèches dorées, de temples et de monastères.
Sagaing, grand centre spirituel et de pèlerinage, compte plus de 600 édifices religieux. Mêlé aux moines, moinillons et nonnettes en robe carmin psalmodiant leurs prières, tous et toutes le crâne rasé et poli comme une coquille d'oeuf, on escaladera bravement pieds nus les raides escaliers de la pagode Soon U Ponya Shin aux parois incrustées d'éclats de miroirs, pour admirer le panorama grandiose de la forêt d'édifices religieux se découpant devant la courbe du fleuve.
A quelques kilomètres en amont de Mandalay, on accoste à Mingun, ancienne cité qui possède la plus grande pagode inachevée du monde (150 mètres de haut). Sortie du rêve du roi dément Bodaw Phaya, la construction titanesque dura trente ans, avant d'être arrêtée à la mort du monarque en 1819. Partiellement détruit par un tremblement de terre, le monument s'élève encore à plus de 50 mètres au-dessus du fleuve.
Mandalay, capitale artistique.
Mandalay, la dernière capitale du royaume du Myanmar (1871-1885) avant l'arrivée des Anglais, et aujourd'hui deuxième ville du pays, a encore de beaux restes en dépit du béton des immeubles modernes.
En 1858, le bon roi Mindon inaugurait la « Cité d'or », un colossal palais, en faisant, suivant la coutume, enterrer vifs dans ses fondations quelque cinquante infortunés choisis par ses astrologues.
Du palais royal original protégé par de larges douves, il ne reste que des remparts crénelés et des tours de guet. Les bâtiments construits en teck et couverts d'or ont été détruits durant la Seconde Guerre mondiale.
Les autorités en ont fait rebâtir à l'identique plusieurs, dont la salle du trône, mais l'endroit n'a guère d'intérêt. En revanche, on resterait des heures au monastère Shwe Nandô tout proche, unique construction en bois de teck sculpté de l'époque royale.
Capitale artistique de la Birmanie, Mandalay a gardé le charme d'une ville provinciale, avec ses artisans batteurs de feuilles d'or, orfèvres, bijoutiers (on y trouve les plus beaux jades et rubis du pays), sculpteurs et tailleurs de marbre et de bois, tisseurs de soie et de coton, brodeurs d'or et de paillettes, tapissiers et marionnettistes.
A douze kilomètres de Mandalay, Amarapura fut un temps capitale royale, avant d'être démantelée par le roi Mindon. Elle a gardé un curieux et spectaculaire pont, long de plus d'un kilomètre et demi, datant de 1849. Entièrement construit en teck, il franchit un lac pour accéder à une pagode ornée de délicates peintures murales du XIXe siècle.
A Rangoon, aujourd'hui rebaptisée Yangon, se trouve le plus célèbre monument de Birmanie, la pagode Shwedagon, dont le stupa d'or de 98 mètres de haut domine la ville.
« Swe » signifie « or » en birman, et l'or ne manque pas dans cet ensemble religieux de temples et de pagodes, mélange de Lourdes pour la ferveur religieuse et de Disneyland pour la décoration kitsch et clinquante.
Au XVe siècle, une reine offrit son poids en or pour recouvrir le dôme du grand stupa, et ses successeurs l'imitèrent. On y incrusta aussi des milliers de pierres précieuses. Le résultat est saisissant lorsque les premiers rayons du soleil frappent l'énorme émeraude placée au centre du dôme et font éclater l'ensemble de mille et mille feux.
Le centre-ville reste l'un des plus exotiques d'Asie, avec ses anciens bâtiments publics datant du « raj » britannique. Longtemps préservés, ces édifices victoriens rappelant les grandeurs de l'empire des Indes (la Birmanie en faisait partie) ont tendance à se dégrader quelque peu depuis que les administrations publiques ont été déplacées de la capitale.
S'il y a belle lurette que les majors moustachus et les images victoriennes de la « Old Burmah » chère à Kipling ont disparu, Yangon garde partout les traces de son passé. Sur Strand Road où trône l'hôtel du même nom, superbement restauré, on a gardé l'habitude de prendre le thé après la sieste et de jouer au billard. Mais, dans les rues de la ville, rares sont les passants habillés à l'occidentale. Tout le monde ici porte le « longyi », une sorte de jupe que l'on drape sur les hanches et qui descend jusqu'aux chevilles. Les Birmans le nouent sur le devant et les Birmanes, sur le côté.
Faut-il aller au Myanmar ?
En Birmanie, rebaptisée Myanmar en 1989, la liberté d'expression et les droits de l'homme n'ont toujours pas droit de cité, même si la junte militaire au pouvoir s'est quelque peu assouplie depuis l'ouverture du pays au tourisme. Faut-il pour autant, comme le demandent certains avec insistance, refuser de se rendre dans ce pays merveilleux ouvert aux étrangers après près de trente ans d'isolement ?
A ce compte, il faudrait aussi, en bonne logique, s'interdire de visiter et, donc, de connaître tous les pays totalitaires, quelle que soit la couleur de leur régime. A commencer par la Chine, le Vietnam et Cuba, qui, malgré une politique d'ouverture commerciale et touristique, restent les derniers bastions de dictatures communistes pures et dures. A chacun donc de faire son choix ; tout en gardant à l'esprit que visiter un pays ne cautionne en aucune façon le régime en place.
> J. C.
Religions et coutumes
Majoritairement bouddhistes, les Birmans sont très religieux et très respectueux des coutumes et des traditions. Respecter les coutumes : se déchausser avant d'entrer dans un monument ou une maison ; ne pas pointer du doigt une personne, une statue de Bouddha ou un hôtel religieux ; ne pas toucher la tête d'un enfant, d'un adulte ou celle d'une statue de Bouddha ; pas de poignée de main ni de « laï » comme en Thaïlande, joindre ses deux mains étant réservé aux moines et aux occasions formelles ; éviter de marcher dans l'ombre d'un moine.
Pour partir
TRANSPORTS:
- Thaï Airways International propose des vols quotidiens Paris-Yangon (Rangoon) via Bangkok, à partir de 695 euros A/R (HT). Renseignements : Thaï Airways, tél. 01.44.20.70.80.
FORMALITÉS :
- Passeport en cours de validité 6 mois après la date de retour. Visa obligatoire délivré par l'ambassade du Myanmar (25 euros + 3 photos d'identité).
CLIMAT :
- D'octobre à mars, la température varie de 25 à 30 °C, et il ne pleut pas.
SANTÉ :
- Aucun vaccin obligatoire ni de traitement antipaludéen conseillé. Eau non potable partout, eau minérale à disposition dans les cabines du « Road To Mandalay ».
DÉCALAGE HORAIRE :
- + 5 h 30 par rapport à la France en hiver et + 4 h 30 en été.
MONNAIE :
- Le kyat (tchat) monnaie nationale. 1 euro = 1 150 kyats. Le dollar américain est accepté partout (1 dollar américain = 1 050 kyats).
LANGUES :
Le birman et l'anglais.
SÉJOURS-CROISIÈRES :
Orient-Express Voyages propose des forfaits-croisières à bord du « Road To Mandalay » au départ de Yangon, comme « Les trésors de l'Irrawaddy », avec 2 nuits à Yangon et une croisière de 7 nuits, à partir de 1 930 euros (Yangon-Mandalay-Bagan-Ava-
Maymyo-Yangon) ; « Les temples dorés », avec 2 nuits à Yangon et une croisière de 4 nuits, à partir de 1 675 euros (Yangon-Bagan-Mandalay-Mingun-Yangon) ; « Les secrets de l'Irrawaddy », avec 1 nuit à Yangon et une croisière de 11 nuits, à partir de 2 180 euros (Yangon-Mandalay-Mingun-Kyaukmyaung-Katha Shwegu- Zinbon-Bhamo-Khata-Tigyaung-Mandalay-Bagan-Mont Popa-Yangon) ; et le forfait « Joyaux du Myanmar », avec 2 nuits au Strand Hotel, visite privée de Yangon, une croisière de 3 nuits en cabine supérieure et 1 nuit au Governor's Residence, à partir de 2 017 euros.
Tous les prix hors aérien Paris-Paris comprennent l'hébergement avec petit déjeuner à Yangon, la pension complète à bord du « Road To Mandalay », les transferts et les visites guidées, ainsi que les vols domestiques Yagon-Mandalay A/R.
HOTELS :
- The Strand Hotel, 92 Strand Road Yangon. Tél. (951) 243377. E-mail : info@thestrand.co.
En plein centre de Rangoon, l'un des palaces mythiques d'Asie, avec le Raffles à Singapour et l'Oriental à Bangkok. Service à l'ancienne, excellent restaurant et une boutique de souvenir superbe.
- The Governor's Residence (Pansea Orient-Express Hotel),
35 Taw Win Road, Dagon Township Yangon. Tél. (951) 229860. E-mail : yangon@pansea.com. (A Paris, tél. 01.42.27.54.31 et e-mail : svasquez@pansea.com.)
Somptueuse ancienne demeure en teck du quartier des ambassades nichée dans un jardin luxuriant. 45 chambres et 2 suites.
RENSEIGNEMENTS :
- Ambassade-consulat du Myanmar, 60, rue de Courcelles, 750017 Paris. Tél. 01.56.88.15.90.
- Venice Simplon-Orient Express Voyages. Tél. 01.55.62.18.00 et www.orient-express.com.
Voir aussi les brochures Asia et Voyageurs du monde.
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