LE LUPUS érythémateux disséminé (LED) est une affection auto-immune systémique (atteinte multiviscérale), caractérisée par la production d'anticorps antinucléaires, une activation du complément et de l'interféron et une destruction tissulaire. Son étiologie complexe met en jeu une interaction de facteurs génétiques de susceptibilité et environnementaux.
Etudes de liaison et de gènes candidats.
Durant les vingt dernières années, de nombreuses études de liaison et de gènes candidats ont permis d'identifier des gènes ou loci, dont des variants confèrent une susceptibilité au LED.
Jusqu'ici, six gènes de susceptibilité au LED étaient confirmés :
– HLA-DRB1 (chr. 6p21) ;
– FCGR3A et FCGR2A (récepteurs de basse affinité pour les IgG, ou FcgammaR ; chr.1q23) ;
– PDCD1 (Programmed Cell Death 1 ; chr. 2q37) ;
– IRF5 (IFN Regulatory Factor 5 ; chr. 7q32) ;
– PTPN22 (Protein Tyrosine Phosphatase N22; chr. 1p13).
Un autre gène de susceptibilité, STAT4 (Signal Transducer and Activator of Transcription 4), a été identifié récemment.
Quatre nouvelles études publiées cette semaine (trois dans « Nature Genetics », une dans le « New England Journal of Medicine ») allongent cette liste et confirment des gènes déjà signalés, dont STAT4.
L'étude peut-être la plus importante est celle du consortium international SLEGEN, dirigé par les Drs John Harley (Oklahoma) et Carl Langefeld (Caroline du Nord). Il s'agit d'une étude génomique d'association de cas-témoins, suivie d'une vaste étude de réplication. Elle porte sur environ 6 700 femmes d'origine européenne.
Dans l'étude génomique d'association, environ 300 000 marqueurs SNP ont été évalués chez 720 femmes atteintes de LED comparées à 2 337 femmes témoins. Les SNP trouvés associés au LED dans cette étude cas-témoins ont été testés ensuite dans deux autres séries indépendantes de 1 846 cas et 1 825 témoins.
Femmes d'origine européenne.
Leurs résultats révèlent quatre nouveaux gènes ou loci de susceptibilité au lupus chez les femmes d'origine européenne :
– ITGAM (integrine alpha M ; chr. 16p11.2) ;
– KIAA1542 (chr. 11p15.5) ;
– PXK (chr. 3p14.3) ;
– rs10798269 (chr. 1q25.1, région dépourvue de gène).
De plus, ils confirment cinq associations connues (HLA étant la plus forte, IRF5, STAT4, FGRG2A, PTPN22) et identifient au moins neuf autres loci peut-être associés au LED, dont le loci BLK (chr. 8p23).
Indépendamment, par une approche de gènes candidats, Nath (Oklahoma), Harley et coll. ont identifié une association entre le gène ITGAM et le LED. En effet, ils ont étudié dix gènes candidats dans la région 16p12-q13 (connue pour être liée au LED) chez environ 3 800 cas-témoins d'origine européenne. L'association avec ITGAM a été répliquée ensuite dans des populations d'origine africaine (deux séries de cas-témoins).
Le gène ITGAM encode l'intégrine alpha M, exprimée sur des cellules myéloïdes (cellules dendritiques, macrophages, monocytes, neutrophiles) ; en se combinant à l'intégrine bêta 2, elle permet l'adhésion notamment des neutrophiles et des monocytes à l'endothélium. Le gène ITGAM implique ainsi la voie d'adhésion intégrine alpha M-bêta 2 dans la survenue du LED.
Kozyrev, Alarcon-Riquelme (Upsala, Suède) et une équipe internationale ont conduit une étude génomique d'association chez des cas-témoins suédois (n = 800), en utilisant 85 000 SNP. Une association avec le gène BANK1 (B-Cell Scaffold Protein with Ankyrin Repeats Gene) a été identifiée puis répliquée dans quatre séries indépendantes de cas-témoins (allemande, italienne, argentinine et espagnole).
Hyperactivité des cellules B.
Le gène BANK1 offre ainsi un nouveau gène de susceptibilité au LED, avec des variants qui affectent les sites régulateurs ou des domaines fonctionnels. Les variants liés au lupus pourraient contribuer à un signal prolongé du récepteur des cellules B et à une hyperactivité des cellules B caractéristique de la maladie.
Une équipe américaine et suédoise, dirigée par le Dr Timothy Behrens (Genentech, San Francisco), a conduit une étude génomique d'association chez des Américains d'origine européenne (1 311 cas et 3 340 témoins), en utilisant 500 000 SNP. Les loci les plus fortement associés ont été testés ensuite dans une cohorte suédoise de réplication (n = 1 650 cas-témoins).
Ils identifient ainsi deux nouveaux loci de susceptibilité : des variants dans la région des gènes ITGAM et ITGAX ; un variant en amont du gène BLK (encodant la tyrosine kinase lymphoïde B) et du gène C8orf13 de fonction inconnue (chr. 8p23). Les chercheurs pensent que, dans ces deux loci, ITGAM et BLK sont probablement les gènes de susceptibilité.
Il est intéressant de noter que les protéines encodées par ITGAM, BLK et BANK1 ont toutes une fonction dans le système immunitaire.
« Nature Genetics », 21 janvier 2008, Nath et coll. DOI : 10.1038/ng.71, Harley et coll. DOI : 10.1038/ng.79, Kozyrev et coll. DOI : 10.1038/ng.81 et « NEJM » Horn et coll.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature