La réforme de l’assurance maladie et de l’offre de soins, votée en 2005 et 2006 par les Pays-Bas, continue de monter en puissance. En 2012, c’est au tour des hôpitaux universitaires d’entrer dans la danse. Aux Pays-Bas comme en France, la logique a consisté à passer d’un budget global et fixe à un budget lié à l’activité. Les Hollandais ont donc eux aussi leur T2A. Mais ils sont allés bien plus loin, puisque les hôpitaux se trouvent mis en concurrence par les acteurs de l’assurance maladie obligatoire, lesquels ont un statut privé (lire ci-après, « Une délégation aux assureurs privés de l’assurance maladie obligatoire »).
Il ne s’agit pas d’une caricature de libéralisme
Toutefois, il ne faudrait pas céder à la tentation de la caricature. Les Pays-Bas n’ont pas purement et simplement libéralisé le marché de l’assurance maladie ni celui des soins hospitaliers. Confrontés à un grave problème de files d’attente qui, selon les études réalisées au début des années 2000, coûtait annuellement au pays près de 3,2 milliards d’euros, ils ont tenté de dynamiser les acteurs en s’appuyant sur la logique de concurrence. Mais dans le même temps, ils ont renforcé l’encadrement du marché de l’assurance maladie, lequel est devenu, pour les acteurs privés, paradoxalement moins libre.
Concernant les soins hospitaliers, la réforme de 2006 s’est traduite par la création du diagnosebehandelingcombinatie (DBC), système basé sur un répertoire de 30 000 actes différents, classés en segments A ou B. Le segment A reste encadré sur le plan tarifaire, tandis que le B est ouvert à la négociation entre assureurs et hôpitaux. Et la part des soins librement négociés est passée de 10 % en 2005 à 34 % en 2009. L’objectif, y compris pour les centres hospitaliers universitaires (CHU), est d’atteindre les 70 % en 2012 (lire p. X, « Un financement hospitalier tourné vers la performance et la qualité »).
Des acteurs sous la contrainte des assureurs
La réforme est jugée positive concernant la maîtrise des dépenses puisque après trois ans de mise en application, les prix ont baissé de 1,3 % et les coûts des soins se sont stabilisés à 1,31 % du PIB. En outre, il semble que le problème chronique des files d’attente commence également à se résorber. La réforme a en effet permis la constitution rapide de véritables filières de prise en charge intégrées. Des filières qui permettent aux assureurs de mettre en place des parcours de soins de haute qualité, mobilisant notamment des professionnels prestigieux. Ces filières deviennent d’ailleurs des arguments concurrentiels pour les assureurs.
Les Pays-Bas auraient-ils trouvé la formule magique ? Pas sûr. Les mécanismes mis en place par la réforme s’accompagnent en effet de leurs lots de mauvaises surprises. Les frais administratifs des assurances augmentent car qui dit concurrence, dit politique publicitaire et de promotion. Par ailleurs, certains hôpitaux commencent à avoir des problèmes financiers et la dépendance des acteurs de soins vis-à-vis des assureurs dans le cadre des filières commence à faire débat. Entre optimisation du système et confiscation, par les assureurs, du débat public sur l’offre de soins et les priorités de santé publique, la frontière est ténue. À titre de comparaison, la France a fait un autre choix en maintenant une régulation publique symbolisée aujourd’hui par les ARS. Plonger dans le système hollandais est comme faire une excursion à Londres. C’est à la fois proche et on ne peut plus exotique.
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