L 'ENJEU sanitaire et économique que représente la santé animale pour l'homme via l'alimentation (listériose, encéphalopathie spongiforme bovine) a conduit à la création récente de l'Agence de sécurité sanitaire alimentaire. Pour autant, il ne faudrait pas oublier les risques que font peser sur l'homme les zoonoses non alimentaires. L'an dernier, des experts ont été réunis par l'Institut de veille sanitaire (InVS) afin d'améliorer la connaissance, la prévention et le contrôle des zoonoses non alimentaires. Douze maladies ont été déclarées prioritaires : grippe, brucellose, échinococcoses alvéolaire et uniloculaire, leptospirose, maladie de Lyme, mycobactérioses typiques (tuberculose) et atypiques, rage, toxoplasmose, infection à virus West Nile, psittacose. La réflexion du groupe de travail se poursuit et, dans les semaines qui viennent, les priorités d'action seront fixées.
Le sanglier multiréservoir
Les animaux peuvent être le réservoir (et/ou le vecteur) de nombreux pathogènes pour l'homme. Ces animaux peuvent être sauvages (oiseaux, rongeurs, carnivores), d'élevage (ovins, caprins, bovins) ou encore de compagnie, classiques (chats, chiens, oiseaux) ou plus exotiques (tortues, singes, serpents, etc.).
Plusieurs zoonoses éradiquées en France sont de retour, incitant à une vigilance accrue pour une bonne prévention. La brucellose des bovins a disparu grâce à une politique sanitaire rigoureuse observée en France mais pas toujours dans certains pays limitrophes. L'histoire n'est pas terminée pour autant (voir « le Quotidien » du 4 mai). Des foyers de brucellose ovine persistent dans le Sud-Est (mélange des troupeaux lors de la transhumance) ; la brucellose du chien, qui se contamine à partir des rongeurs, est observée, de même que la brucellose porcine (élevage extensif, retour à l'agriculture bio oblige). Les porcs se retrouvent en contact avec des animaux sauvages notamment des sangliers venus des pays de l'Est. Le sanglier, espèce en expansion, est d'ailleurs un « multiréservoir » : brucellose, tuberculose, peste porcine, trichinellose.
La disparition en France de la rage vulpine est le résultat du succès de la vaccination (voie orale) du renard, à la fois réservoir et vecteur du virus rabique. Mais de nouveaux variants apparaissent, dont certains insensibles à la vaccination, seul traitement en postexposition : développement de la rage chez les chauves-souris (voir ci-dessous) et introduction incontrôlée d'espèces animales infectées ou sensibles (chien viverrin importé d'Asie, etc.).
La France est le pays d'Europe de l'Ouest le plus touché par la leptospirose. Une étude française actualise les facteurs de risque : classique situation professionnelle à haut risque mais aussi et de plus en plus souvent activités de loisirs favorisant une contamination à la faveur de brèches cutanées par un contact direct avec des rongeurs sauvages ou chiens infectés ou un contact indirect avec des eaux douces souillées par les urines de ces animaux.
L'échinococcose alvéolaire est sous une surveillance européenne mise en place après la découverte de la maladie humaine et animale dans des régions considérées comme indemnes et l'augmentation des cas dans des zones d'endémie notamment en France (Jura, Alpes, Auvergne). L'augmentation du nombre de renards et le développement dans un contexte urbain de populations de renards infectés font craindre une extension à surveiller. Cette zoonose est transmise à l'homme par ingestion de végétaux sauvages contaminés par les selles de renards ou de rongeurs infectés. Chiens et chats peuvent être parfois infectés dans les régions concernées ; l'homme se contaminerait en les caressant ; d'où l'intérêt d'une décontamination de ces animaux chaque année par praziquantel sirop... et du lavage des mains !
Les oiseaux migrateurs sont de bons transporteurs de pathogènes avec réarrangements génétiques des virus (virus West Nile et grippe).
A noter l'intérêt que portent les caisses agricoles d'assurance-maladie à ces zoonoses : enquête leptospirose, résistance aux antibiotiques chez les porchers, étude sérologique de chlamydia psittaci chez les salariés du secteur avicole, enquête de séro-prévalence de la maladie de Lyme et de l'encéphalite à tique dans l'est de la France.
10e Colloque sur le contrôle épidémiologique des maladies infectieuses, avec les Drs M. Valenciano (InVS, St-Maurice), O. Patay (Villeneuve-St-Georges) et les Prs J. Brugère-Picoux (Maisons-Alfort), J. Beytout (Clermont-Ferrand), G. Baranton (Institut Pasteur, Paris), J.-P. Ganière (Nantes), F. Rodhain (Institut Pasteur, Paris), C. Lafaix(Villeneuve-St-Georges).
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