LES ESPRITS se sont, semble-t-il, un petit peu apaisés à propos de la réforme de l'allocation supplémentaire de vieillesse (ASV), programmée par le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (Plfss) pour 2006.
Le texte, qui vient de passer à l'Assemblée nationale en première lecture, laissait présager une reprise en main réglementaire de cet avantage social conventionnel qui représente environ 39 % de la retraite moyenne des médecins libéraux. Or le gouvernement s'est efforcé de calmer le jeu devant les députés. Philippe Bas, ministre délégué à la Sécurité sociale, a assuré que le gouvernement allait « travailler en étroite concertation avec les représentants des professionnels et des caisses », avant toute réforme de l'ASV (« le Quotidien » du 31 octobre).
Surtout, les députés ont adopté un amendement du gouvernement qui garantit, en une ligne, la participation des caisses à la nouvelle cotisation d'ajustement (créée par le Plfss), dans les mêmes conditions que la cotisation forfaitaire actuelle, c'est-à-dire à hauteur des deux tiers, pour les médecins du secteur I. Cette précision avait été réclamée à la fois par la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf) et par MG-France.
« On a maintenant les outils législatifs pour aller plus loin », note le Dr Michel Combier, président de l'Unof-Csmf, qui tient cependant à préciser que l'on « n'a pas sauvé l'ASV pour autant ».
« Il faudra se mettre autour d'une table et discuter, poursuit-il. Il y a beaucoup de projections à faire avant de savoir où l'on va. Ce n'est pas parce que le problème de l'ASV est urgent qu'il faut se précipiter. »
« Il est important de préserver cet avantage social par rapport au contrat conventionnel car c'est la contrepartie des honoraires opposables » pour les médecins libéraux de secteur I, conclut le Dr Combier.
Lettre au ministre.
Au Syndicat des médecins libéraux (SML), le Dr Dino Cabrera pense aussi qu'il est « hors de question que ce régime disparaisse ». L'amendement du gouvernement a permis, selon lui, de « lever toute ambiguïté » sur le maintien de la participation des caisses aux cotisations ASV des médecins, bien qu'à ses yeux « il ne pouvait en être autrement ».
La Fédération des médecins de France (FMF) semble elle aussi rassurée sur ce dossier après avoir été reçue par des conseillers de Xavier Bertrand. Dans une lettre adressée au ministre de la Santé, la FMF indique notamment qu'elle a « enregistré avec satisfaction l'éventuelle perspective d'un "Grenelle" de l'ASV, comme celle d'une possible concertation préalable » à la réforme prévue par le Plfss. En revanche, la FMF, qui compte dans ses rangs le Dr Gérard Maudrux, président de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (Carmf), n'est pas du tout sur la même longueur d'onde que les autres syndicats médicaux au sujet de l'avenir de l'ASV. A l'instar du président de la Carmf, la FMF « a opté pour la solution de la fermeture (du régime) avec maintien des droits acquis et participation de l'Etat à hauteur des dépenses qu'il a lui-même ordonnées ». Cette solution, explique son président, le Dr Jean-Claude Régi, « semble être, à terme, la moins chère pour le pays, tout en respectant les retraites des médecins ».
La FMF argumente sa position en dénonçant dans sa lettre à Xavier Bertrand « l'abus de confiance » dont seraient victimes les médecins libéraux, auxquels on « demande d'assumer, pour le moins, les négligences passées de l'Etat ». Le syndicat souligne « l'incapacité à prévoir des gouvernements successifs », illustrée à la fois par la « démographie médicale catastrophique » (qui pèse sur la situation financière de tous les régimes de retraite) et par la gestion même de l'ASV. Ce régime, rappelle la FMF, « a été géré exclusivement par l'Etat à l'inverse de tous les régimes professionnels », d'où « des interventions électoralistes », comme les « points gratuits accordés par M. Barrot [ex-ministre des Affaires sociales] à deux reprises ».
« Cette gestion hasardeuse s'est faite contre l'avis étayé des élus de notre caisse de retraite, comme en témoignent ses multiples mises en garde durant toutes ces années », poursuit la FMF. La Fédération écrit au ministre que « les médecins, dans leur majorité, ne sont pas opposés à la fermeture de l'ASV avec maintien des droits acquis », citant le référendum organisé à l'initiative du Dr Maudrux en 2002 (1). Elle suggère donc à Xavier Bertrand d' « étudier cette possibilité » afin d' « éviter une crise de confiance profonde entre l'Etat et les médecins, en mal de cicatrisation des séquelles d'un certain plan Juppé ».
(1) 36 % des médecins cotisants et retraités affiliés à la Carmf avaient participé à ce « référendum » ; 73,4 % des votants avaient souhaité que fût « privilégiée une solution de fermeture » de l'ASV. Ce choix descendait à 49,9 % chez les seuls retraités.
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