Si tout le monde connaît l'asthme, il est bien difficile d'en donner une définition autre que « maladie inflammatoire chronique susceptible de provoquer un bronchospasme », a rappelé Göran Tornling, pneumologue attaché au centre de développement de Lund. Pour preuve, les formes cliniques sans bronchospasme et les asthmes non diagnostiqués sont nombreux. Cette imprécision nosologique et étiologique ne facilite pas le travail des chercheurs. En deux siècles, l'asthme a eu successivement le statut de maladie psychiatrique, puis de trouble musculaire, allergique, inflammatoire et, aujourd'hui, immunitaire. L'arsenal thérapeutique dont on dispose résulte du passage par toutes ces étapes de compréhension de la maladie. Mais les faits sont là : on ne guérit pas encore la maladie, d'une part, et on ne s'explique pas l'augmentation vertigineuse de la prévalence de l'asthme dans les pays occidentaux, d'autre part. Le rationnel de la recherche scientifique passe donc par des raisonnements fondés sur des preuves cliniques et économiques : la question est de savoir si l'addition d'un nouveau produit dans l'arsenal thérapeutique répond à un besoin médical et à des répercussions sur le coût de la maladie (médicaments, hospitalisations, absentéisme). Sachant que 75 % des dépenses liées à la maladie sont dues aux 20 % de personnes souffrant d'asthme sévère, on comprend que l'objectif principal de la recherche consiste à prévenir le passage des formes modérées (80 % des patients, 25 % des dépenses) aux formes graves.
Exacerbation : traitement mal suivi
Le premier moyen de satisfaire cet objectif est d'augmenter l'observance, extrêmement médiocre, des asthmatiques. D'après les enquêtes menées sur le sujet, la moitié seulement des patients suivent scrupuleusement leur traitement en phase d'exacerbation ; or il existe un lien direct entre l'observance, les prescriptions d'urgence et les hospitalisations. AstraZeneca a déjà de beaux succès dans ce domaine. On peut citer la conception de l'inhalateur de poudre sèche (Turbuhaler), qui ne nécessite pas d'apprentissage particulier, les corticoïdes inhalés et les bronchodilatateurs à longue durée d'action qui permettent de diminuer le nombre de prises. Le dernier-né de la gamme, Symbicort, est un autre exemple. Ce produit est une combinaison thérapeutique d'un corticoïde inhalé, le budésonide (Pulmicort), et d'un bêtamimétique à longue durée d'action, le formotérol, le tout sous forme de poudre sèche en Turbuhaler. En pratique, une inhalation par jour peut suffire à soulager rapidement un malade souffrant d'un asthme modéré. Outre la rapidité d'action, la dose peut être ajustée en cas d'insuffisance de résultats.
Prophylaxie : les résultats de START attendus pour 2002
La recherche fondamentale étant indissociable de la recherche appliquée, on comprend que la notion de traitement « prophylactique » de l'asthme sévère fasse aussi l'objet d'essais cliniques. L'étude START, dont les résultats sont attendus pour 2002, devrait permettre de savoir si un traitement précoce par corticoïdes inhalés peut ralentir la survenue d'événements aigus. Dans cet essai randomisé, 7 000 asthmatiques peu symptomatiques, âgés de 6 à 60 ans, ont pris pendant trois ans une bouffée de budésonide par jour ( versus placebo).
« Enfin, a rappelé Mark Finney, chimiste, il ne faut pas oublier que sur des dizaines de milliers de molécules produites par chimie combinatoire, modélisation moléculaire ou méthodes spectroscopiques, seules une dizaine d'entre elles seront retenues comme candidat-médicament ; et il faudra de dix à douze ans avant de mettre un nouveau produit sur le marché. Avec de tels délais, la recherche doit plus que jamais s'adapter à la demande des malades. »
Visite du centre de recherche des maladies respiratoires et inflammatoires des Laboratoires AstraZeneca à Lund (Suède), le 2/10/2001.
Une augmentation de prévalence difficile à expliquer
Les chiffres sont édifiants : en trente ans, la prévalence de l'asthme, tous âges confondus, a augmenté de 50 % par décade ; la tranche d'âge la plus touchée étant celle des enfants de moins de 5 ans (+ 160 % en quinze ans). Deux types de facteurs peuvent avoir provoqué une telle augmentation : des facteurs génétiques individuels (atopie, immunité) et/ou des facteurs environnementaux (allergènes et pollution). Malheureusement, quand on reprend point par point les différentes hypothèses étiologiques, on constate qu'aucune n'est véritablement confirmée : la modification de facteurs génétiques individuels nécessiterait plusieurs générations et non pas quelques dizaines d'années, la quantité d'allergènes présents dans l'environnement est maximale à la campagne alors que la prévalence de l'asthme y est moindre, la pollution est plus élevée en Europe de l'Est qu'en Europe de l'Ouest alors que les personnes y souffrent de bronchites chroniques plutôt que d'asthme. Seule la théorie du déséquilibre immunitaire semble se maintenir : les enfants vaccinés et surprotégés feraient plus d'asthme que ceux dont le système immunitaire est sollicité très tôt dans la lutte contre les parasites ou autres agents mettant en jeu les lymphocytes T.
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