Asthme et virus : les méfaits du dioxyde d'azote

Publié le 09/06/2003
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Plus l'exposition d'un enfant asthmatique au dioxyde d'azote (NO2) est importante et plus la sévérité de ses crises d'asthme induites par une infection respiratoire virale sera grande. C'est ce que viennent de mettre en évidence des scientifiques anglais de Southampton en étudiant l'exposition individuelle et quotidienne d'une centaine d'écoliers asthmatiques à ce gaz polluant.

L'existence d'un lien entre l'exposition au NO2 et certaines pathologies respiratoires a été suggérée il y a déjà presque dix ans. Il avait notamment été noté une association entre l'incidence de l'asthme et l'exposition à ce gaz polluant. Cependant, les mécanismes par lesquels le NO2 semblait provoquer les crises d'asthme n'avaient pas été élucidés.

Moindre résistance aux virus

Diverses données suggèrent que l'exposition au NO2 avant une infection peut réduire la résistance de l'organisme aux virus respiratoires en diminuant l'immunité locale et/ou en augmentant l'expression des récepteurs ICAM-1 sur lesquels se fixent certains virus. Par ailleurs, il est établi que les infections respiratoires virales sont parmi les principaux facteurs provoquant une exacerbation de l'asthme chez les enfants. C'est pourquoi Chauhan et coll. ont supposé que le NO2 pouvait augmenter l'incidence et la sévérité de l'asthme en favorisant les infections respiratoires virales.
Afin de tester leur hypothèse, les chercheurs ont recruté 116 enfants asthmatiques âgés de 8 à 11 ans et vivant à Southampton ou dans les environs. Durant presque un an, les symptômes respiratoires (voies hautes et basses), le débit expiratoire de pointe et l'exposition personnelle au NO2 de chaque enfant ont été enregistrés quotidiennement. A chaque survenue de symptômes respiratoires importants, dans les 48 heures suivant le début des symptômes, une recherche d'infection virale a été effectuée à partir de prélèvements réalisés par aspiration du mucus dans les narines des enfants. Dans 78 % des prélèvements effectués, un ou plusieurs virus ont pu être détectés. Il s'agissait principalement (dans 46 % des cas) de rhinovirus.
Les enfants infectés ont été classés dans trois groupes en fonction de l'importance de leur exposition personnelle au NO2 dans la semaine précédant l'infection (faible : < 7,5 μg/m3, moyenne, ou forte : > 14 μg/m3). Selon les recommandations de l'OMS, l'exposition annuelle moyenne au NO2 ne doit pas dépasser 40 μg/m3. Parmi les enfants suivis, 20 % ont été exposés au moins une fois durant l'étude à une concentration de NO2 supérieure à 100 μg/m3.
Les enfants les plus exposés à ce polluant sont ceux chez qui la cuisinière fonctionne au gaz.
En utilisant l'ensemble des données recueillies, Chauhan et coll. ont recherché une relation entre l'exposition au NO2 dans la semaine précédant l'infection et l'exacerbation de l'asthme des enfants après l'infection.
Il est apparu que plus l'exposition des enfants au NO2 avant l'infection était forte et plus la sévérité des symptômes touchant leurs voies respiratoires basses augmentait. En outre, les enfants ayant respiré l'air le plus pollué avant de tomber malade montrent, la semaine suivant l'infection, les débits expiratoires de pointe les plus faibles.

Peut-être d'autres polluants

Ces données indiquent donc que la sévérité des exacerbations de l'asthme induite par une infection respiratoire virale est majorée par l'exposition à un air pollué par le NO2. Les auteurs n'excluent pas la possibilité que l'effet observé ne soit pas uniquement dû au NO2, d'autres polluant de l'air pouvant participer à ce phénomène. Cependant, ils estiment que des moyens importants devraient être mis en œuvre afin de réduire la pollution de l'atmosphère par le NO2.

A.J. Chauhan et coll., « The Lancet » du 7 juin 2003, pp. 1939-1944.

Elodie BIET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7349