C' EST à la suite d'une forte « épidémie » de crises d'asthme, un soir d'octobre 1997, dans une île du sud de l'Australie, qu'une association avec un violent orage a été faite. Le soir de l'orage et le lendemain matin, 215 personnes se sont présentées aux urgences avec une crise d'asthme, dont 41 ont été hospitalisées. Presque toutes avaient un asthme allergique au seigle. Cet événement, et plusieurs observations identiques dans d'autres villes du sud de l'Australie, ont poussé une équipe de pneumologues de l'université de Sydney à reconsidérer le rôle de l'orage dans le déclenchement de crises d'asthme et à rechercher les mécanismes mis en jeu.
Un balayage des pollens
Ces spécialistes ont émis l'hypothèse que les orages et les courants d'air froid auxquels ils sont associés provoqueraient un balayage des pollens et des particules suivi d'une concentration dans une étroite bande d'air, proche du sol, qui constitue une zone de reflux (car l'air froid est piégé au sol). Au printemps et en début d'été, les personnes allergiques aux graminées inhaleraient après l'orage de fortes concentrations d'allergènes susceptibles de déclencher des crises d'asthme.
Pour valider l'hypothèse, l'équipe du Dr Marks a tout d'abord étudié le nombre de passages aux urgences pour asthme dans six villes du sud-est de l'Australie et les conditions météorologiques : orage dans un rayon de 80 km, courants d'air froid et fronts froid (la différence entre les deux étant définie par la durée de l'événement). La vitesse du vent, ses changements de direction et ses accélérations, l'humidité, la température étaient également consignés.
Pour chaque ville, les concentrations de pollens ont été mesurée en zone semi-rurale de proximité, 3 mètres au-dessus du sol, les pollens étant différenciés selon leur état (entiers ou fragmentés, pleins ou vides) et leur nombre (m3/heure).
Un lien entre la présence de courants d'air accompagnant l'orage et l'augmentation des consultations pour crise d'asthme a été retrouvé dans toutes les villes étudiées, association d'autant plus marquée de la fin du printemps jusqu'au début de l'été. Les périodes de recrudescence d'asthme étaient, dans 48 % des cas, survenues des jours d'orage, contre 8 % pour les autres jours. Quand l'orage n'a pas entraîné de mouvement d'air (n = 14), le nombre de sujets en crise d'asthme se présentant aux urgences était comparable à celui des autres jours (10/14). Les fronts froids n'ont pas eu d'incidence sur les mécanismes allergiques. Après l'orage, une forte concentration des pollens, à la fois intacts et rompus (comme après la pluie), a été retrouvée.
Au total, la moitié des épidémies de crises d'asthme avait été précédée d'un orage venté durant la période des pollens (et un tiers sur l'ensemble de l'année).
L'hypothèse des chercheurs semble donc validée : la recrudescence des asthmes allergiques printaniers est fortement liée aux courants d'air froid qui accompagnent l'orage, plutôt qu'à l'activité électrique ou la pluie. Fort de ce constat, peut-on prévoir les pics épidémiques ? Non, répondent les météorologues, car si l'on sait prédire les orages, on ne peut en revanche pas savoir lesquels seront suivis de mouvements d'air froid et de nombreuses fausses alarmes seraient forcement à déplorer.
G B Marks et coll., «Thorax» 2001 ; 56:468-471.
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