En installant le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie, Jean-Pierre Raffarin a fixé le calendrier que « le gouvernement tiendra ».
Le Premier ministre a demandé d'emblée à ce Haut Conseil, présidé par Bertrand Fragonard et composé de 53 membres (représentant les régimes d'assurance-maladie, les complémentaires santé, les assurés sociaux, les employeurs, le Parlement, l'Etat, les professionnels et les établissements de santé, les usagers), de se consacrer dans un premier temps à « l'élaboration partagée du diagnostic » et de lui remettre « (son) premier rapport avant Noël ». D'ores et déjà, le gouvernement « verse au dossier » de cette instance ses propres « éléments de diagnostic » dans un document de 70 pages, a précisé Jean-Pierre Raffarin. Pour le chef du gouvernement, le Haut Conseil « n'est pas un club de réflexion supplémentaire » et il doit « aider les Français à se forger une opinion mieux éclairée sur notre système d'assurance-maladie et ses difficultés », notamment en « éclairant (ses) réflexions des leçons de la comparaison » avec l'étranger. « Sur le fondement de cet état des lieux, le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, engagera au début de l'année 2004 une période de concertation approfondie, puis de négociation », annonce le Premier ministre.
Six pistes
Un « petit nombre » de groupes de travail, « pilotés par le ministre et ses collaborateurs », devront alors plancher « sur les principales pistes » proposées par Jean-Pierre Raffarin, pour que les décisions politiques soient « arrêtées avant l'été » avant d'être « transcrites dans les textes législatifs nécessaires ».
Il a donc cité « six pistes porteuses d'avenir » :« L'absolue priorité (de) l'amélioration de la gestion »(« nous devons déclarer la guerre aux gaspillages »), la clarification des responsabilités respectives de l'Etat et des partenaires sociaux (« sans étatiser ni privatiser » et avec une gestion paritaire « qui retrouve toute sa vigueur et son efficacité »), la généralisation de la couverture complémentaire santé grâce à la création d'une « aide spécifique », le développement des informations publiques de pilotage (« indicateurs d'activité, de qualité et de coût en temps réel »), une meilleure organisation de l'offre de soins (la démographie médicale, sa répartition, et la carte hospitalière étant « des chantiers majeurs »), et, enfin, un mouvement de « responsabilisation » qui doit « concerner tous les acteurs ».
Sur ce point, Jean-Pierre Raffarin estime qu'il y a « des débats à ouvrir » : « Quel est le juste équilibre entre ce qui doit relever du pacte républicain de la solidarité collective et la responsabilité personnelle ? (...) Des mécanismes personnalisés doivent-ils venir renforcer l'assurance-maladie dans sa gestion des mécanismes de solidarité ? », s'interroge le Premier ministre.
Jean-Pierre Raffarin a rappelé des principes « intangibles »(« solidarité », « assurance-maladie pour tous », « liberté de choix du médecin » et « qualité pour tous »), ainsi que les « lourdes menaces » actuelles constituées par « le déficit », « le profond malaise du monde de la santé » et la « déresponsabilisation ». D'où « l'urgence à agir », avec pour « ambition d'assurer l'avenir, de consolider notre système de santé et d'assurance-maladie ». Cependant, ajoute-t-il, il faut le réformer « non pas en surface, mais en profondeur », après l'échec des « 16 plans de sauvetage » précédents. « En raison de cette ambition réformatrice, nous ne privilégions pas l'augmentation des prélèvements obligatoires », a souligné le Premier ministre, car, « décider en préalable qu'on augmente la CSG d'un point ne ferait que reporter le problème ». Quant au PLFSS 2004, vu par certains comme une esquisse d'étatisation, il « ne préjuge des conclusions du processus » ouvert par la mise en place du Haut conseil pour trois ans.
Jospin : le gouvernement a abandonné toute idée de maîtrise
Très sévère pour la politique générale du gouvernement Raffarin et du président de la République, Lionel Jospin, dans une tribune publiée par « Libération » du 13 octobre, critique aussi les choix de son successeur à Matignon, en matière de santé et de protection sociale.
Pour l'ancien Premier ministre, « dès le printemps 2002, le discours tenu au plus haut niveau a été que le temps de la maîtrise était révolu ». Or, insiste-t-il, « on ne peut abandonner toute maîtrise de ces dépenses, sinon, c'est l'assuré social qui, à terme, en fait les frais ». M. Jospin, qui dénonce le déficit de l'assurance-maladie de 11 milliards d'euros en 2003, alors que, écrit-il, « nous avions rétabli les comptes grâce à une politique de croissance économique et une maîtrise de la dépense », craint que le gouvernement actuel ne se serve de cette situation pour « une remise en cause de notre système, un développement du rôle des assureurs dans le domaine de la santé, les déremboursements massifs ou le renoncement à la prise en charge par l'assurance-maladie du petit risque ».
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