La réforme de l'assurance-maladie, à laquelle l'opinion n'est absolument pas préparée, risque de faire un «atterrissage très difficile» à l'été 2004.
Tel est le scénario noir redouté à l'UMP, où plusieurs députés confient que le chantier est encore plus explosif que celui des retraites dans la mesure où il concernera tous les Français, et sans délai. La menace serait d'autant plus lourde que plusieurs confédérations de salariés, qui n'ont toujours pas « digéré » la réforme des retraites, prépareraient une revanche sociale.
Alain Juppé, président de l'UMP, qui mesure sans doute mieux que personne le risque politique d'une telle réforme, a tiré les leçons de 1995. Son entourage confiait récemment à l'AFP que l'ancien Premier ministre veut très rapidement « engager le débat sur l'assurance-maladie pour pouvoir commencer à dégager des perspectives et pistes d'atterrissage possibles de cette réforme ». Autrement dit, il s'agit de préparer le terrain, prendre le pouls de l'opinion, et éventuellement lancer des ballons d'essai afin d'épauler et d'éclairer la démarche du gouvernement. Un pôle santé présidé par Philippe Douste-Blazy, secrétaire général de l'UMP, est chargé de nourrir la réflexion interne sur les grands sujets, comme l'organisation du système de soins en ville ou à l'hôpital.
La formation chiraquienne veut en tout cas apporter sa pierre au débat et conduire une « action pédagogique » intense auprès de l'opinion dans les premiers mois de 2004, ainsi que l'explique le médecin député (UMP) des Yvelines Pierre Morange (lire notre entretien). Le dossier est si sensible qu'il risque de diviser la droite entre « libéraux » et « modérés » lorsque viendra le temps des arbitrages sur la maîtrise des dépenses, les modes de responsabilisation des assurés, le financement ou la politique du médicament. Déjà, plusieurs députés centristes, anciens UDF ayant rejoint l'UMP, demandent à Alain Juppé davantage de débat « en amont » au sein du parti, notamment sur ces questions . Quant à la formation de François Bayrou, bien qu'elle soit partenaire de la majorité, elle devrait encore marquer sa différence sur la Sécu, après avoir critiqué un PLFSS 2004 « décevant ».
Le gouvernement campe sur sa méthode : un diagnostic « partagé » (bien que déjà retardé) dressé par le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance-maladie, des groupes de travail pilotés par le cabinet Mattei début 2004, une phase de concertation avec tous les acteurs avant des arbitrages politiques à l'été et une transcription législative à l'automne. Ce qui n'exclut pas aussi, à l'approche des échéances électorales, des initiatives de terrain symboliques, à l'instar de la visite de Jean-Pierre Raffarin, samedi dernier en Haute-Savoie, à la rencontre de médecins généralistes inquiets (voir page 2).
Ce processus idéal devra toutefois intégrer plusieurs paramètres encore inconnus, comme le résultat des élections régionales en mars et un éventuel remaniement ministériel. Et si le retour de la croissance n'est pas au rendez-vous au deuxième semestre, la tâche du gouvernement sera d'autant plus délicate. Dans ces conditions, l'accompagnement pédagogique de l'UMP risque d'être très précieux.
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