L ES différences hommes-femmes concernant la prévalence avec l'âge de l'arthrose en général et de la gonarthrose en particulier ont suggéré un effet hormonal. Mais les études épidémiologiques sur l'estrogénothérapie n'ont pas donné de résultats très probants. D'où l'idée de l'équipe australienne de A .E. Wluka et coll. (Victoria) de réaliser cette observation transversale. Les auteurs se sont appuyés sur l'IRM, technique simple, non invasive et reproductible, pour mesurer l'épaisseur et le volume du cartilage tibial supérieur. On sait qu'il existe une bonne corrélation entre les résultats donnés par ce moyen et l'amincissement de l'interligne articulaire visualisé à la radiographie.
L'étude a porté sur un 81 femmes de plus de 50 ans. Parmi elles, 42 ont eu une ETS pendant plus de cinq ans ; elles ont été comparées à 39 femmes n'ayant jamais eu ce traitement. Les estrogènes ont été pris par la bouche (n = 28), par voie transcutanée (n = 10) ou par implant sous-cutané (n = 4). Un questionnaire à remplir leur a été fourni.
IRM du genou
Une imagerie des genoux dans le plan sagittal par résonance magnétique a été réalisée ainsi que des radiographies et différents examens destinés à brosser le tableau de la vie génitale des femmes.
Les résultats montrent que les utilisatrices de l'ETS ont un cartilage au niveau du plateau tibial de 7,7 % plus important en volume que les femmes non traitées (2,98 ml versus 2,75 ml).
Les facteurs confondants ont été recherchés. C'est ainsi qu'il est apparu que la taille des os exerce l'effet le plus marqué sur le cartilage, représentant 12,5 % des variations de son volume. L'ajustement pour ce facteur fait augmenter la différence entre les groupes de 0,23 ml. D'autres facteurs influant sur le volume du cartilage ont été trouvés. Certains agissent en réduction : le nombre d'années depuis la ménopause (6,1 %), l'index de masse corporelle (1,4 %) et l'âge à la ménopause (1 %). A l'inverse, le tabagisme apparaît avoir un effet bénéfique (2,4 %). Par contre, l'activité physique n'a eu, à cet égard, aucun effet.
L'ajustement pour ces différents facteurs donne des volumes de 0,23 ml chez les non-utilisatrices de l'ETS et de 0,30 ml chez les utilisatrices (p = 0,008). Les différences persistent après l'exclusion des femmes présentant une arthrose.
Des récepteurs aux estrogènes sur les chondrocytes
Des données expérimentales indiquent que les estrogènes ont un rôle physiologique dans l'articulation normale. Des récepteurs aux estrogènes sont présents sur les chondrocytes. Les estrogènes agissent probablement au niveau de l'os sous-chondral et des chondrocytes, soit directement, soit indirectement en utilisant un second messager (par exemple en transformant le facteur de croissance bêta ou l'IGF). In vitro, il a été montré que des estrogènes modulent la production d'interleukine 6 par les chondrocytes. In vivo, l'administration d'estrogènes a des effets bénéfiques sur certains modèles animaux.
Ces résultats confortent les données épidémiologiques. Une métaanalyse de quatre études sur les risques d'arthrose de la hanche et du genou montrent un odds ratio de 0,76 chez les femmes prenant une ETS pour ce qui concerne le risque d'arthrose modérée à sévère.
Ces résultats ne laissent rien supposer des effets d'un traitement de substitution combinant estrogènes et progestérone, soulignent les auteurs. Cela a été peu étudié. Un seul travail suggère que le traitement combiné pourrait réduire l'effet protecteur des estrogènes seuls, mais cela reste à démontrer.
A. E. Wluka et coll. « Ann Rheum Dis », 2001 ; 60 : 332-336.
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