Vous pensiez avoir simplement « retenu un article ». Mais en aucun cas avoir signé un engagement définitif pour ce canapé en cuir. Mais vous avez signé un document, vraisemblablement un bon de commande et versé une somme d'argent pour le mettre de côté. Mauvaise nouvelle : il y a de fortes chances que vous soyez effectivement engagé. Car une signature engage toujours de manière ferme celui qui l'a donnée. Et le versement d'une somme d'argent - si minime soit-elle - implique souvent, sur un plan juridique, une volonté d'engagement, dont la nature variera selon que la somme d'argent sera considérée comme des arrhes ou comme un acompte.
Différence entre arrhes et acomptes
« Un acompte implique un engagement ferme et, par conséquent, l'obligation d'acheter pour le consommateur, explique l'INC, Institut national de la consommation. L'acompte est en fait un premier versement à valoir sur votre achat. Il n'y a, en principe, aucune possibilité de dédit et vous pouvez être condamné à payer des dommages et intérêts si vous vous rétractez. Le commerçant lui-même ne peut se raviser (même en remboursant l'acompte), faute de quoi il pourrait être obligé de payer également des dommages et intérêts.
Les arrhes n'ont pas la même signification et laissent une possibilité de se dédire - c'est-à-dire de changer d'avis en annulant sa commande -, la somme versée restant acquise au commerçant à titre de dédommagement. Le vendeur aussi peut se raviser, mais il devra alors rembourser le double des arrhes (art. 1590 du code civil) à son client, là encore à titre de dédommagement. »
Reste une question : comment savoir si l'on vient de verser des arrhes ou un acompte ? En effet, si le contrat souscrit est supposé préciser la nature de la somme versée (arrhes ou acompte), un tribunal peut être amené à considérer comme acompte ce qui avait été conçu comme arrhes, et vice versa. Il est, par exemple, probable qu'un juge considérerait comme acompte un versement effectué (bien que sous le nom d'arrhes) pour la commande d'un vêtement sur mesure.
Faute de précision, « les sommes versées d'avance sont des arrhes, ce qui a pour effet que chacun des contractants peut revenir sur son engagement, le consommateur en perdant les arrhes, le professionnel en les restituant au double » (art. L. 114-1 alinéa 4 du code de la consommation).
Votre commerçant détient des arrhes ou un acompte depuis plus de trois mois ? Vous êtes en droit de lui réclamer des intérêts au taux légal (article 131-1 du code de la consommation). Sachant que le temps est compté jusqu'à la réalisation de la vente ou de l'exécution de la prestation (ou si celle-ci n'est pas réalisée ou exécutée jusqu'à la restitution des sommes versées d'avance).
« Pour les ventes à distance, le délai est de trente jours à compter du paiement de la commande (art. L. 121-20-3 du code de la consommation), précise l'INC. Les intérêts doivent être déduits du solde à verser au moment de la réalisation ou ajoutés aux sommes versées d'avance en cas de remboursement. Cette réglementation ne s'applique pas aux commandes spéciales sur devis et aux ventes de produits dont la fabrication est entreprise sur commande particulière de l'acheteur. »
Vous vous trouvez engagé malgré vous et vous désirez ne pas effectuer l'achat ? « Vous pouvez demander l'annulation de la commande au commerçant, mais ce dernier n'est pas tenu de vous donner satisfaction, dans la mesure où un contrat a été passé et un acompte versé, explique l'INC. Si vous estimez que le vendeur a usé de manuvres frauduleuses pour se faire remettre une somme d'argent, vous pouvez porter plainte pour escroquerie auprès du procureur de la République du tribunal de grande instance dont vous dépendez - adressez-vous à votre mairie -, en vertu de l'article 313-1 du code pénal. »
Ce qu'est un avoir
Qu'est-ce qu'un avoir ? Un papier par lequel un commerçant reconnaît vous devoir de l'argent. Cette somme est, en principe, à valoir sur un achat futur. Il peut vous être proposé dans deux situations :
- soit parce le commerçant ne peut pas honorer la commande, auquel cas vous pouvez refuser cet avoir, et exiger le remboursement des sommes versées puisque c'est le commerçant qui est responsable de la mauvaise ou de la non-exécution du contrat. En outre, comme le précise l'INC, « sachez qu'est nulle la clause d'un contrat par laquelle le vendeur prévoit que l'acompte ou les arrhes versés ne sont pas remboursés en cas d'absence de livraison, de retard de livraison ou de livraison non conforme. Cette nullité résulte de l'article R. 132-1 du code de la consommation (2) ».
Si vous acceptez un avoir, vous faites donc un cadeau à votre commerçant puisque vous vous engagez à acheter pour le montant de l'avoir dans son magasin ;
- soit parce que vous avez changé d'avis. Le commerçant, qui n'est aucunement fautif, peut vous contraindre à respecter le contrat, c'est-à-dire à prendre livraison de l'article et à verser le solde du prix. Si vous n'aviez versé que des arrhes, il serait alors en droit de garder la somme correspondante à titre de dédit (art. 1590 du code civil). Mais si le vendeur accepte de vous consentir un avoir, sachez qu'il n'y est absolument pas contraint. C'est seulement la preuve qu'il a le sens commercial.
Conseils pratiques
Ne signez rien, ne versez rien, avant d'avoir pris une décision définitive.
De toute façon, arrhes ou acompte, ne versez qu'une somme minime (environ 10 % du prix global), on ne sait jamais ce qui peut arriver (la maladie, notamment, n'est pas considérée comme un cas de force majeure ; en clair, elle ne vous libère pas de vos engagements).
Sachez que si le bon de commande prévoit une indemnité à votre charge en cas de désistement, la même indemnité doit être prévue à la charge du commerçant si c'est lui qui est responsable de l'inexécution du contrat (impossibilité de vous livrer, par exemple), qu'il s'agisse d'arrhes ou d'acompte.
Conservez le double du contrat ou du bon de commande et le reçu de la somme versée ; vous posséderez une preuve de votre bonne foi en cas de litige.
A la commande, gardez trace du paiement que vous avez effectué, surtout si vous avez payé en espèces.
En cas de démarchage à domicile, le démarcheur a l'interdiction de percevoir une somme d'argent, sous quelque forme que ce soit, pendant le délai de réflexion de sept jours (art. L.121-26 du code de la consommation). Peu importe donc que ce soient des arrhes ou un acompte.
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