« Ariadne auf Naxos », de Richard Strauss, à l'Opéra de Paris

Ariadne étouffée

Publié le 18/01/2004
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CE DONT SOUFFRE LE PLUS cette nouvelle production de l'« Ariadne auf Naxos » de Richard Strauss et Hugo von Hofmannsthal, dont le snobisme parisien s'est aussitôt emparé en en faisant le must de la saison, ce n'est pas sa mise en scène branchée, mais sa direction musicale. Le chef israélien Pinchas Steinberg a de l'œuvre une conception essentiellement et inutilement symphonique et non instrumentale et théâtrale, comme il le faudrait.
De la distribution, bonne a priori, réunie pour l'occasion, on retiendra trop de chanteurs poussant au-delà de leurs possibilités pour passer un tissu orchestral trop épais et sonore. Natalie Dessay, pour qui le rôle de Zerbinette, qu'elle a beaucoup chanté de Vienne à New York et pour la première fois à Paris, est taillé sur mesure, s'en tire le mieux, ainsi que quelques chanteurs très expérimentés comme Graham Clark (Maître de danse), David Wilson-Johnson (Maître de musique) et Waldemar Kmentt (Majordome).
Le spectacle, s'il respecte les grandes lignes du livret, force beaucoup le trait dans son caractère bouffe que Strauss et Hofmannsthal ont dosé avec le bon goût qu'on leur connaît. Dans la seconde partie, l'Opéra se déroule bien à Naxos mais dans une Grèce contemporaine, dans la carcasse inachevée d'une de ces cages en béton à l'aide desquelles les Grecs ont défiguré leur pays. Ariadne y traîne son chagrin parmi les sacs de ciment, les trois naïades sont des voisines méchamment attifées et Zerbinette, en tenue de plage criarde, et sa troupe de comédiens sont des touristes en goguette. La porte est ouverte à tous les excès et personne ne s'en prive, surtout pas Natalie Dessay qui, forte de son infaillibilité dans la pyrotechnie vocale et avec son impressionnant talent de comédienne, tire le rôle vers des abîmes de vulgarité.

Opéra de Paris (08.92.89.90.90). Prochains spectacles : « Peter Grimes » de Benjamin Britten (Bastille, reprise), du 19 janvier au 7 février. « Les Capulet et les Montaigu » de Vincenzo Bellini (Bastille, reprise), du 2 au 17 février.

> O. B.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7458