Dans ce beau pays capricieux et compliqué, on se bagarre durement, mais jamais pendant les congés. Nous avons eu droit à quatre jours de repos, grâce à l'Ascension. C'est aujourd'hui que nous retrouvons nos ennuis, avec de sérieuses perturbations dans les services publics.
Le gouvernement n'aurait sans doute pas dû ajouter la décentralisation de l'éducation nationale à la réforme des retraites. Le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a imposé le fruit de sa réflexion personnelle et de ses convictions au malheureux Luc Ferry, qui ne tient plus debout que grâce à des béquilles, Nicolas Sarkozy et Jean-Paul Delevoye (ministre de la Fonction publique).
Les enseignants devraient tout de même se demander pourquoi ils passent leur temps à avoir la peau de leur ministre, qu'il s'agisse de M. Alègre ou de M. Ferry ; et si ce n'est pas parce que, justement, Jack Lang les a épargnés qu'ils ne lui ont pas fait la guerre ; s'il existe un pouvoir, de droite ou de gauche, qui puisse réformer l'Education nationale.
De même, M. Alègre devrait se souvenir de ce qu'il a enduré à la tête du ministère avant d'être « démissionné » par son ami de trente ans, Lionel Jospin : cela lui éviterait de paraître à la télévision pour condamner la réforme de M. Ferry. De même, M. Lang devrait en finir avec des interventions démagogiques : mais oui, dit-il, il a commencé des réformes et a ramené le calme chez les enseignants. Un vrai miracle.
Non. La question de fond porte sur le principe même de la réforme que tous les fonctionnaires rejettent au moyen d'arguments directement tirés de la propagande et de la désinformation. Le plus consternant, c'est de voir des jeunes gens de moins de vingt-cinq ans qui manifestent contre la réforme des retraites. Ils n'ont pas commencé à vivre que déjà ils songent aux conditions de leur fin de carrière. Ils sont vieux avant l'âge. D'ailleurs, la plupart rêvent d'un emploi dans la fonction publique. Quelle ambition ! L'idée que la vie est une aventure, qu'ils pourraient s'expatrier ou fonder leur entreprise ne leur traverse pas l'esprit. Ce qu'un jeune sait faire le mieux, aujourd'hui, c'est de hurler dans la rue, alors que la société française doit livrer une bataille prioritaire : celle du chômage. Comment peut-on être épouvanté par « l'horizon 2020 » ? Qui peut dire ce qu'il fera dans dix-sept ans ? Pourquoi ne dit-on pas que si nous retournons au plein emploi, nous n'aurons pas besoin de prolonger les carrières au-delà de 40 ans ? Et pourquoi, surtout, manifester pour que soient maintenus des avantages sociaux inégalitaires et s'efforcer tout en même temps d'entrer dans le système qu'on veut préserver contre toute logique ?
PS - Deux lectrices nous font valoir que, contrairement à ce que nous avons écrit, les fonctionnaires paient des impôts sur leurs primes. Nous faisions allusion aux pratiques qui avaient cours dans les cabinets ministériels avant que Lionel Jospin n'y mette un terme. Mais les primes ne sont pas incluses dans le calcul des points de retraite, ce qui n'est bon ni pour le salarié, ni pour la collectivité.
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