Un antagoniste de l'interleukine 1, IL1Ra, pourrait bientôt être utilisé dans le traitement des cancers. Cette molécule est capable d'inhiber la vascularisation de différentes tumeurs humaines dans le modèle murin. La molécule empêche ainsi la croissance des tumeurs et la formation de métastases.
L'ouverture de cette nouvelle voie dans la thérapie antitumorale est liée à la mise en évidence du rôle essentiel de l'interleukine 1 (IL1) dans l'angiogenèse des tumeurs.
On avait déjà supposé que l'IL1 possède une fonction qui lui permet de stimuler la formation de métastases. Cependant, aucune donnée ne permettait d'attribuer à cette cytokine un rôle dans le mécanisme de l'angiogenèse.
IL1 : vascularisation des cellules tumorales
C'est en utilisant des souris chez lesquelles les gènes codant pour l'IL1 alpha ou l'IL1 bêta ont était inactivés que E. Voronov et coll. ont pu établir que l'IL1 était effectivement nécessaire à la vascularisation des cellules tumorales.
Pour arriver à ce résultat important, les chercheurs ont injecté à des animaux normaux et mutés des cellules provenant de mélanomes humains. Chez les souris sauvages, cette expérience conduit à la formation de tumeurs létales. Chez les souris génétiquement modifiées n'exprimant plus l'IL1 bêta, la survie des animaux n'est pas affectée : les cellules injectées ne sont pas capables de donner naissance à une tumeur maligne, la croissance tumorale est inhibée et le pouvoir invasif de la microtumeur est nul.
En étudiant l'angiogenèse des tumeurs transplantées chez ces souris mutantes, Voronov et coll. ont constaté que l'absence d'IL1 bêta inhibe la vascularisation de tumeurs injectées en sous-cutanée. En ajoutant de l'IL1 bêta exogène dans le microenvironnement de la tumeur transplantée, le phénomène d'angiogenèse tumorale est partiellement restauré. Chez les animaux déficient pour l'IL1 alpha, une inhibition de la vascularisation des tumeurs est également observable, mais le phénomène est moins important. Ces expériences ont été répétées avec des cellules tumorales de différentes provenances (cancer mammaires et cancer de la prostate) : les mêmes résultats ont été obtenus dans tous les cas.
Lors d'expériences réalisées dans le but de comprendre la nature du mécanisme moléculaire par lequel l'IL1 agit sur l'angiogenèse tumorale, Voronov et coll. ont démontré que la cytokine contribuait à la production de facteurs impliqués dans la croissance des cellules endothéliales vasculaires et dans la nécrose des tumeurs.
La saturation des récepteurs inhibe l'activité de l'IL1
Finalement, les chercheurs ont voulu tester l'effet d'un antagoniste de l'IL1 sur l'angiogenèse tumorale. Cette molécule, IL1 RA, se fixe sur les mêmes récepteurs cellulaires que l'IL1, mais ne déclenche pas la cascade de réactions enzymatiques qu'entraîne la fixation de la cytokine. En administrant à des souris sauvages une quantité suffisante d'IL1 Ra, il est théoriquement possible de saturer les récepteurs à l'IL1 et donc d'inhiber l'activité de la cytokine. En utilisant des doses croissantes d'IL1 Ra, Voronov et coll. ont effectivement observé que cette molécule est capable de diminuer la croissance et l'angiogenèse tumorale de manière significative.
L'IL1 Ra est déjà utilisée pour réduire les inflammations dont souffrent les sujets atteints d'arthrite rhumatoïde. Cette molécule pourrait également être un médicament efficace pour le traitement du cancer, puisqu'en inhibant l'angiogenèse des tumeurs, elle pourrait permettre de juguler la progression de la maladie.
E. Voronov et coll., « Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée, www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.0437939100
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