L'hyperthermie maligne(HM) est une complication gravissime et rarissime de l'anesthésie générale qui, en dépit du diagnostic précoce et d'un traitement intraveineux par dantrolène, s'accompagne d'une mortalité supérieure à 5 %. Chez un sujet « susceptible », l'HM peut survenir chaque fois que des agents volatils halogénés ou la succinylcholine (agent myorelaxant dépolarisant) sont utilisés. On observe alors une augmentation du métabolisme primitivement musculaire, souvent accompagné d'une rigidité qui commence par un trismus. L'évolution se fait vers la destruction progressive du muscle squelettique et l'apparition de défaillances multiviscérales. Si les cas d'HM sont rares (une seule fois au cours d'une vie professionnelle), ils n'en demeurent pas moins préoccupants. L'idéal serait de pouvoir dépister les patients à risque mais l'unique moyen dont on dispose aujourd'hui est le tests de contracture sur biopsie musculaire (in vitro) et la recherche de mutations sur le gène RYR1 (présentes chez 20 à 40 % seulement des famille à risque).
Dans une lettre au « Lancet », des anesthésistes allemands proposent une technique moins invasive pour différencier les individus à risque d'HM des autres. L'idée est née de l'effet de la caféine sur le muscle squelettique des patients à risque d'HM (augmentation de la libération du calcium sarcoplasmique). Les chercheurs ont émis l'hypothèse qu'une injection intramusculaire de caféine chez ces personnes allait provoquer une réaction locale d'hypermétabolisme, matérialisée par une augmentation de la pression partielle en dioxyde de carbone (pCO2). L'expérience a été menée chez 12 sujets issus de familles à risque avec un test de contracture évocateur et une mutation RYR1. Les mesures de la pCO2 après injection de caféine étaient comparés à celles de sujets témoins en bonne santé (non testés) et de sujets non à risque testés. La mesure de la pCO2 était faite à l'aide d'un capteur enchâssé profondément dans l'un des chefs du quadriceps. Les sujets à risque d'HM ont obtenu des pics de pCO2 supérieurs aux autres (63 mmHg vs 44/42 mmHg). Leur vitesse d'augmentation de la pCO2 était également significativement augmentée (83 mmHg/h vs 1 à 2 mmHg/h). Chez tous les sujets, la pCO2 a retrouvé des valeurs normales dans les soixante minutes. Témoins de l'atteinte musculaire, les CPK sont passées de 56 U/l à 171 U/l vingt-quatre heures après l'injection chez les sujets à risque, alors qu'elles étaient inchangées dans les deux autres groupes. A noter que les sujets à risque n'ont (heureusement) pas présenté de manifestation systémique à l'issue de l'injection de caféine.
Pour les rapporteurs de l'étude, la production de CO2, directement liée au métabolisme musculaire, offre un moyen simple de diagnostiquer les patients à risque d'HM. « Des expérimentations chez l'animal seront menées pour évaluer la dose optimale de caféine à injecter et pour le positionnement du capteur de pCO2, envisagent déjà les investigateurs. Un essai multicentrique chez l'homme permettra secondairement de tester la sensibilité et la spécificité du test. »
Martin Anetseder et coll., « The Lancet », vol. 359, 4 mai 2002.
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