Anatomopathologie : le carcinome papillaire de la thyroïde

Publié le 24/10/2002
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PRATIQUE

OBSERVATION

Clinique

Femme de 35 ans présentant un nodule thyroïdien médio-lobaire gauche de découverte fortuite. A l'échographie, le nodule est isoéchogène, de 16 mm de diamètre. Le bilan hormonal thyroïdien est normal. La cytoponction du nodule à l'aiguille fine montre des aspects hautement suspects, évocateurs d'un carcinome papillaire (figure 1), imposant un examen histologique.
Décision de lobectomie gauche avec examen extemporané suivie, selon le résultat, d'une totalisation et d'un curage récurrentiel.

Macroscopie

Le nodule, situé à la partie moyenne du lobe gauche, bombe sous la capsule. A la coupe, il est ferme, rosé, de consistance grenue, limité par une capsule épaisse. L'examen extemporané conclut à un carcinome papillaire. Décision de totalisation avec curage récurrentiel gauche.

Histologie

Le nodule offre une architecture à la fois papillaire et vésiculaire. Les vésicules, de taille variable, coexistent avec des formations papillaires allongées et ramifiées. Les cellules tumorales sont cubo-cylindriques. Leur cytoplasme est pâle. Les noyaux, volumineux et clarifiés, sont tassés les uns contre les autres, chevauchés, en piles d'assiettes. La membrane nucléaire est épaisse, parfois déformée, crénelée, ou encochée. Certains noyaux, de forme ovalaire, sont incisurés (figure 2).
La tumeur infiltre la capsule du nodule avec extension dans le parenchyme adjacent. Le lobe thyroïdien droit est histologiquement normal. Présence d'une métastase ganglionnaire lymphatique sur 4 ganglions retrouvés à la dissection du curage récurrentiel.

Conclusion

Adénocarcinome papillaire infiltrant du lobe thyroïdien gauche de 16 mm de diamètre. Respect de la capsule du lobe. Présence d'un ganglion lymphatique métastatique sur 4 ganglions examinés dans le curage récurrentiel gauche. Intégrité du lobe droit.

L'ANAPATH S'EXPLIQUE

Parmi les tumeurs qui dérivent des cellules folliculaires (ou vésiculaires), les carcinomes papillaires sont les plus fréquents (80 %), suivis par les carcinomes vésiculaires (5 à 10 %). Ces cancers se différencient par des critères biologiques, anatomo-pathologiques et par leur voie de dissémination : lymphatique pour le cancer papillaire ; hématogène pour le cancer vésiculaire.

Définition OMS

Le carcinome papillaire de la thyroïde est défini par l'OMS comme une « tumeur épithéliale maligne présentant une différenciation folliculaire et comportant dans sa forme typique, des papilles et des vésicules, ainsi que des anomalies nucléaires caractéristiques ».

Les papilles

Les papilles (figure 2) sont centrées par un axe conjonctivo-vasculaire et tapissées par un revêtement uni stratifié de cellules cubiques ou cylindriques. Elles peuvent être ramifiées ou épaisses et globuleuses.
Les vésicules sont quasi constantes, intriquées aux papilles ou en plages séparées. Il existe cependant une variante de cancer papillaire d'architecture vésiculaire prédominante ou exclusive. Le diagnostic histologique, difficile, est alors porté uniquement sur les anomalies nucléaires.

Les critères nucléaires

Les critères nucléaires (figures 1 et 2) sont nécessaires et suffisants pour porter le diagnostic de cancer papillaire. Mais s'ils sont caractéristiques, aucun d'entre eux n'est pathognomonique. A l'inverse, ils ne sont pas forcément tous présents dans tous les carcinomes papillaires. Trois aspects principaux sont décrits :
- l'aspect en « verre dépoli » est présent dans 50 à 88 % des tumeurs. Il correspond à des noyaux volumineux et arrondis, à contours réguliers, apparaissant optiquement vides par margination et condensation de la chromatine autour de la membrane nucléaire qui est ainsi épaissie. Ces noyaux ont tendance à se chevaucher, formant des images en « piles d'assiettes » ;
- les incisures sont des fentes, uniques ou multiples, partageant des noyaux plutôt allongés selon leur grand axe. Les contours nucléaires sont déformés, crénelés ou encochés. Elles sont présentes dans la quasi-totalité des tumeurs ;
- les pseudo-inclusions nucléaires (figure 1), présentes dans 40 à 50 % des tumeurs, sont des invaginations intranucléaires du cytoplasme.
D'autres aspects peuvent être utiles au diagnostic : l'augmentation de la taille des noyaux ; les mitoses, en fait très rares ; les calcosphérites ou psammomes, quasi pathognomoniques, qui sont des calcifications arrondies, de structure lamellaire en « bulbe d'oignon », présentes dans 40 à 50 % des tumeurs.

FACTEURS PRONOSTIQUES

Le pronostic de ces tumeurs est excellent, mais les récidives locales et/ou les métastases sont possibles.
Cinq paramètres sont reconnus comme facteurs de mauvais pronostic : l'âge (supérieur à 40 ans chez l'homme et 50 ans chez la femme), la taille (supérieure à 4-5 cm), l'extension extrathyroïdienne, une résection chirurgicaleincomplète et la présence de métastases au moment du diagnostic.

Dr Bruno PETITJEAN Dr A. LOUBOUTIN-SANCHEZ Service d'anatomopathologie, CHI de Poissy

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7206