PRATIQUE
EXAMEN ANAPATH
Macroscopiquement
La pièce de gastrectomie partielle emporte une masse ovalaire, mesurant 4 x 3 cm, surmontée d'une collerette de muqueuse gastrique non ulcérée. A la coupe, la lésion tumorale est bien limitée, encapsulée, ferme, blanchâtre, remaniée dans sa partie superficielle par quelques suffusions hémorragiques.
A l'étude histologique
La lésion, de nature conjonctive, a un développement sous-muqueux. Elle présente un aspect assez polymorphe : dans certains secteurs, elle est constituée d'éléments fusiformes regroupés en faisceaux plus ou moins tourbillonnants (figure 1A)
tumeur stromale gastrique : contingent cellulaire fusiforme agencé en faisceaux (photo DR)
. D'autres territoires sont formés d'éléments cellulaires globuleux, de grande taille, à cytoplasme éosinophile ou vacuolisé
(figure 1B).
Les noyaux sont souvent volumineux, polylobés. Les mitoses sont rares (moins de 5 mitoses pour 50 champs à fort grossissement). Il n'y a pas de nécrose tumorale. La tumeur est limitée en périphérie par une fine capsule collagène. Elle a été enlevée en totalité par l'exérèse. En profondeur, la limite opératoire intéresse les faisceaux musculaires lisses de la musculeuse.
Etude immuno-histochimique
L'étude immuno-histochimique montre que la tumeur exprime de façon intense le CD34, le CD117 (figure 2) et la vimentine. Quelques cellules tumorales présentent une positivité focale avec l'actine du muscle lisse. La desmine (marqueur des cellules musculaires striées) et la PS100 (marqueur des cellules nerveuses et mélaniques) ne marquent pas la tumeur.
Conclusion
Tumeur conjonctive sous-muqueuse dont les caractères morphologiques et immuno-histochimiques sont ceux d'une tumeur stromale dans sa forme pléomorphe.
Cette lésion, encapsulée, a été enlevée en totalité. Elle reste dépourvue dans l'étendue des plans de coupe examinés de tout critère de malignité (diamètre < 5 cm, absence de nécrose, index mitotique faible).
L'ANAPATH S'EXPLIQUE
Estomac, grêle
Les tumeurs stromales sont définies actuellement comme des tumeurs conjonctives à cellules fusiformes et/ou épithélioïdes à potentiel évolutif incertain et exprimant l'anticorps CD117 (c-kit). Elles se développeraient à partir des cellules de Cajal présentes à l'état normal entre les couches circulaire interne et longitudinale externe de la musculeuse digestive.
Elles correspondent aux tumeurs mésenchymateuses le plus fréquemment observées au niveau du tractus digestif. Environ 1 000 nouveaux cas sont diagnostiqués par an en France. La moyenne d'âge au moment du diagnostic est d'environ 50 ans.
Ces tumeurs prédominent au niveau de l'estomac (de 60 à 70 % des cas), mais sont également observées dans le grêle (de 20 à 30 des cas) et plus rarement dans les autres segments du tractus digestif (< 10 % : côlon, rectum, anus, sophage).
Histologiquement, les tumeurs stromales sont constituées soit de cellules fusiformes souvent organisées en faisceaux anarchiques, soit de cellules rondes d'aspect épithélioïde (tumeurs anciennement dénommées léiomyoblastomes). Certaines tumeurs, comme dans la présente observation, sont polymorphes, comportant les deux contingents cellulaires.
CD34
L'immunohistochimie permet de confirmer le diagnostic : les tumeurs stromales expriment dans 60 à 70 % des cas le CD34 (marqueur des cellules souches myéloïdes, également exprimé par les cellules endothéliales et certains fibroblastes), et dans 90 à 100 % des cas le CD117 (c-kit). Une positivité pour l'actine du muscle lisse est notée dans 30 % des cas.
Environ de 20 à 30 % des tumeurs stromales sont malignes (grêle > estomac). Les tumeurs agressives s'accompagnent au cours de leur évolution de métastases hépatiques ou d'une extension péritonéale.
En dehors d'une invasion des organes adjacents ou de la présence de métastases au moment du diagnostic, il n'existe aucun critère formel de malignité de ces tumeurs dont l'évolution est difficile à prévoir.
Le pronostic dépend de leur localisation (meilleur pronostic pour les tumeurs gastriques que pour les localisations iléales ou coliques), de leur taille (moins bon pronostic si taille > 5 cm), de la présence de remaniements nécrotiques, et du nombre de mitoses (péjoratif si > 5 mitoses pour 50 champs).
Le traitement des tumeurs stromales est surtout chirurgical (exérèse complète), la chimiothérapie et la radiothérapie étant inefficaces.
Les tumeurs stromales agressives, avec métastases, seraient une indication au traitement par le STI 571 (Glivec®) qui est un inhibiteur sélectif des tyrosines kinases.
Glossaire :
- c-kit (CD117) : récepteur transmenbranaire tyrosine kinase impliqué dans l'hématopoïèse, la mélanogenèse et la spermatogenèse. Il est codé par le gène kit (4q11q22).
- Cellule de Cajal : cellule mésenchymateuse, exprimant le CD117, localisée dans la musculeuse du tube digestif ayant des fonctions de cellule pacemaker.
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