PRATIQUE
OBSERVATION
Clinique
Un patient âgé de 37 ans souffre de troubles dyspeptiques avec épigastralgies qui justifient une fibroscopie gastrique avec biopsies antrale et fundique.
Examen microscopique
Le fragment biopsique concernant le fundus montre un infiltrat inflammatoire lymphoplasmocytaire minime à la partie superficielle du chorion, s'accompagnant de rares polynucléaires neutrophiles. Il n'existe pas d'atrophie glandulaire. Quelques rares bactéries de type Helicobacter pylori sont observées dans le mucus de surface.
Sur le fragment biopsique intéressant l'antre (figure 1A), le chorion est infiltré par de nombreux éléments cellulaires inflammatoires constitués par des lymphocytes, des plasmocytes et des polynucléaires neutrophiles. Plusieurs nodules lymphoïdes sont également visualisés au sein du chorion. Les cryptes gastriques sont allongées, bordées par un épithélium d'aspect régénératif, ne présentant pas de métaplasie intestinale, ni de dysplasie. Elles sont le siège d'une importante exocytose à polynucléaires neutrophiles (figure 1B). Les glandes antrales en profondeur ne sont pas atrophiques. De nombreuses bactéries de type Helicobacter pylori sont visibles sur la coloration de Giemsa lent (figure 2).
Conclusion
Muqueuse gastrique siège de lésions de gastrite chronique d'intensité légère (fundus) à modérée (antre) avec activité marquée (antre) sans atrophie glandulaire et sans dysplasie. Présence de nombreuses bactéries de type Helicobacter pylori.
L'ANAPATH S'EXPLIQUE
Le terme de gastrite
Le terme de gastrite est largement utilisé pour couvrir l'ensemble des pathologies diffuses bénignes de la muqueuse gastrique. Sur le plan symptomatique, il a été longtemps utilisé pour désigner des brûlures épigastriques ou autres symptômes de dyspepsie. Pour l'endoscopiste, il désigne le plus souvent des modifications muqueuses étendues ou diffuses quel qu'en soit le type. Le terme de gastrite désigne pour l'anatomopathologiste une atteinte inflammatoire de la muqueuse gastrique et traduit la réponse de l'estomac à toute agression.
Les gastrites sont classées sur le plan anatomopathologique en gastrites aiguës, subaiguës (granulomateuses) et chroniques. Les notions établies sur les gastrites ont été bouleversées par la reconnaissance de la responsabilité d'une bactérie spiralée, Helicobacter pylori, dans l'étiologie de la plupart des gastrites chroniques.
Les biopsies digestives
Les biopsies digestives sont indispensables pour confirmer le diagnostic de gastrite chronique, les aspects endoscopiques n'ayant, le plus souvent, que peu de spécificité. L'analyse des biopsies doit porter sur les différents constituants de la muqueuse gastrique :
- épithélium de surface : abrasions, décollements ;
- cryptes glandulaires : allongement des cryptes, aspect régénératif et basophile de l'épithélium, métaplasie intestinale ;
- glandes : atrophie, métaplasie intestinale ;
- chorion : densité et composition de la population cellulaire inflammatoire déterminant l'intensité de la gastrite (quantité de lymphocytes et de plasmocytes) et son activité (présence de polynucléaires neutrophiles) ;
- mucus de surface et cryptes : recherche d'une infection à Helicobacter pylori sur des colorations spéciales (Giemsa lent, violet de Crésyl) ou plus rarement par immunohistochimie.
Différentes classifications
Différentes classifications des gastrites chroniques ont été proposées depuis ces trente dernières années. Ces classifications ne sont pas toujours comparables entre elles car la terminologie et les critères utilisés sont souvent différents d'une classification à l'autre.
La dernière proposition, datant de 1990, est celle du Sydney System, qui comporte une partie endoscopique destinée aux gastro-entérologues et une partie histologique pour les anatomopathologistes. Cette dernière partie intègre trois grands paramètres de base caractérisant la gastrite : la topographie (antrale, fundique, ou diffuse antrofundique) ; la morphologie avec cinq paramètres gradables (inflammation, activité, atrophie glandulaire, métaplasie intestinale, Helicobacter pylori) ; et l'étiologie de la gastrite ( Helicobacter pylori, auto-immune, AINS...). Cette proposition du Sydney System a pour but d'homogénéiser les comptes rendus d'anatomie pathologique.
La gastrite chronique à Helicobacter pylori prédomine dans la région antrale et peut évoluer vers l'atrophie glandulaire. Elle doit être distinguée, d'une part, de la gastrite chronique atrophique d'origine auto-immune, responsable de la maladie de Biermer, prédominant au niveau du fundus et, d'autre part, de deux autres entités plus récemment décrites : la gastrite lymphocytaire (réalisant le plus souvent un aspect de gastrite varioliforme en endoscopie) et la gastrite réactionnelle (secondaire au reflux biliaire et aux AINS), qui sont classées parmi les gastrites chroniques du fait de leur évolution par poussées, mais qui ne se compliquent jamais d'atrophie glandulaire.
Les sujets porteurs d'une gastrite chronique atrophique sévère ont un risque élevé de dysplasie et de cancer gastrique.
En France, depuis la conférence de consensus de 1995, le traitement des gastrites chroniques à Helicobacter pylori associe un inhibiteur de la pompe à protons à deux antibiotiques (amoxicilline + clarithromycine) pendant huit jours puis l'IPP seul pendant un mois.
Glossaire
* Dans l'estomac, deux types principaux de muqueuse :
- muqueuse de type fundique correspondant anatomiquement au corps gastrique (faces + petite et grande courbures) constituée de glandes simples bordées par plusieurs types de cellules exocrines (cellules principales, cellules pariétales, cellules mucosécrétantes) ;
- muqueuse de type antrale correspondant à la portion horizontale de l'estomac et dont les glandes ramifiées sont bordées uniquement par des cellules à mucus.
* Métaplasie intestinale : remplacement partiel ou total des éléments épithéliaux normaux des cryptes gastriques par des cellules intestinales (entérocytes à plateau strié et cellules caliciformes).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature