Le comité de suivi amiante, créé le 23 février 2013 au sein de la commission des affaires sociales du Sénat, a rendu son rapport sur la mise en œuvre des 28 propositions formulées en 2005. L’Institut national de veille sanitaire (InVS) évalue le nombre de décès par mésothéliome entre 18 000 et 25 000 d’ici 2050, et celui des décès causés par un cancer bronchopulmonaire en lien avec une exposition à l’amiante entre 50 000 et 75 000, a rappelé la sénatrice écologiste Aline Archimbaud, présidente du comité de suivi. « Il faut donc tout faire pour qu’à ce drame de l’amiante ne s’ajoute pas un nouveau drame lié aux conditions du désamiantage », a-t-elle déclaré. Il reste 200 000 tonnes d’amiante en place, assure l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva).
Plus de la moitié des propositions (17) se sont traduites en acte, notamment dans le volet « protection des travailleurs » mais 7 propositions portant sur l’indemnisation des victimes, par les entreprises productrices, sont restées lettre morte, une concernant la qualification des diagnostiqueurs doit être mise en œuvre, et trois organisant la constitution de base de données sont en cours de réalisation.
Des avancées en santé publique... insuffisantes
Deux décrets ont renforcé la protection des travailleurs contre le risque amiante, à commencer par celui du 3 juin 2011 qui impose au propriétaire d’un bâtiment de réaliser des repérages et diagnostics amiante, pouvant conduire à la réalisation de travaux de retrait ou de confinement, si le volume d’amiante dépasse 5 fibres par litre d’air. Le décret du 4 mai 2012 transforme le code du travail en rendant obligatoire le contrôle de l’empoussièrement en milieu professionnel selon la méthode la plus performante (Meta) et fixe la valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) à 10 fibres par litre au 1er juillet 2015 (au lieu de 100 fibres actuellement).
Mais le comité trace plusieurs pistes d’amélioration, à commencer par l’abaissement du seuil d’amiante dans l’air déclenchant des travaux de 5 à 0,47 fibre par libre.
Il suggère plusieurs actions en direction des particuliers et pas seulement des professionnels, comme le renforcement de l’information en matière de gestion des déchets. Les collectivités locales sont incitées à réfléchir aux moyens d’organiser la collecte et le stockage à des coûts abordables pour ceux qui décident de réaliser seuls leurs travaux.
La procédure d’accès à un suivi post professionnel devrait être simplifiée et l’existence du dispositif devrait être obligatoirement expliquée aux travailleurs lorsqu’ils quittent leur emploi (ce n’est actuellement le cas que pour les agents hospitaliers et sociaux). L’accès au suivi post professionnel doit être un des axes du futur plan de santé au travail 2015-2019, estime le comité.
Il propose de créer une cellule d’aide aux employeurs publics pour retrouver des agents susceptibles d’avoir été exposés à l’amiante. Sur 6 790 personnes identifiées comme ayant travaillé sur le site de Jussieu entre 1966 et 1996, 1 700 n’ont toujours pas pu être contactées.
Les sénateurs suggèrent aussi de renforcer le suivi épidémiologique dans les zones à affleurement naturel d’amiante et pour les populations exposées au traitement de l’amiante.
Cap sur la prévention, proposée comme « grande cause nationale »
Le rapport insiste sur la prévention du risque amiante, et demande d’en faire une grande cause nationale afin de garantir une gouvernance transversale. Dans le détail, il préconise la mise en place d’une mission interministérielle temporaire pour remédier à l’absence d’évaluation des travaux de désamiantage dans toutes les branches. « Toutes les directions des ministères ne sont pas toutes également mobilisées sur la question de l’amiante », regrette Aline Archimbaud.
Le comité de suivi propose la création d’une structure de coordination interministérielle rattachée au Premier ministre pour traiter des produits cancérogènes, et la mise en place d’une stratégie nationale pluriannuelle de désamiantage des bâtiments publics, dotée de financements pérennes. Une filière de désamiantage devrait se dessiner à l’échelle nationale.
Des crédits devraient aussi être fléchés vers la recherche et une plate-forme internet, sous la tutelle du ministère de la santé, pourrait décliner toutes les informations au public.
Enfin, le comité distingue deux autres axes d’amélioration : l’amélioration du repérage amiante sur les chantiers de désamiantage, « maillon faible de la réglementation », et le renforcement de la protection des travailleurs exposés à l’amiante, via des actions de sensibilisation et la montée en puissance des CHSCT et de l’inspection du travail.
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