De notre correspondante à New York
I L faut savoir que la relation entre les photorécepteurs de la rétine, neurones spécialisés divisés en bâtonnets et cônes, et l'épithélium pigmentaire rétinien adjacent contrôle non seulement la fonction normale de la rétine mais aussi la pathogenèse des dégénérescences rétiniennes héréditaires. Des anomalies moléculaires en cause ont été identifiées dans un certain nombre de maladies héréditaires des photorécepteurs ou de l'épithélium pigmentaire rétinien, qui provoquent une cécité.
Des expériences de thérapie génique ont donc été entreprises chez le rat et la souris affectés de maladies héréditaires des photorécepteurs, afin d'examiner si la délivrance du gène normal peut corriger le trouble. Les chercheurs sont parvenus à ralentir la dégénérescence. Mais, jusqu'ici, aucune expérience de thérapie génique n'a été tentée chez de plus larges modèles animaux de maladies héréditaires des photorécepteurs ou de l'épithélium pigmentaire rétinien.
Une équipe, dirigée par Jean Bennett (université de Pennsylvanie, Philadelphie), décrit une expérience de thérapie génique chez des chiens naturellement atteints d'une forme d'amaurose congénitale de Leber, la plus sévère des dégénérescences rétiniennes.
Cette maladie héréditaire rare cause une quasi-cécité dès le jeune âge et parfois même dès la naissance. Il n'en existe aucun traitement, comme pour les maladies dégénératives rétiniennes précoces apparentées.
Le gène RPE65
Trois gènes mutés connus peuvent être responsables d'amaurose congénitale de Leber. L'un d'eux, le gène RPE65, code pour une protéine qui intervient dans le métabolisme rétinoïde pour former le rétinal (ou aldéhyde de la vitamine A1), un composant de la rhodopsine. La rhodopsine est le pigment visuel contenu dans les photorécepteurs à bâtonnets, lesquels détectent la lumière et son mouvement. Les souris qui portent des mutations du gène RPE65 sont totalement déficientes en rhodopsine, ont des photorécepteurs à bâtonnets qui ne fonctionnent pas et présentent une lente dégénérescence de la rétine.
Acland, Bennett et coll. ont étudié des chiens naturellement porteurs d'une mutation homozygote du gène RPE65. Ils deviennent aveugles, ou presque, de la même façon que les enfants atteints d'amaurose congénitale de Leber.
Les chercheurs ont traité trois chiens (âgés de 4 mois) en administrant par voie intra-oculaire le virus adéno-associé recombinant portant le gène normal RPE65. La thérapie génique a été injectée dans l'œil droit, sous la rétine, et dans l'œil gauche, dans le vitré. La fonction visuelle a été testée 4 mois après le traitement par tests électrophysiologiques et tests comportementaux. Les chercheurs ont constaté que les trois chiens ont retrouvé une fonction visuelle normale de l'œil droit, mais pas du gauche. Par conséquent, l'injection du gène thérapeutique doit être faite sous la rétine et non dans le vitré. C'est la première démonstration qu'une thérapie génique peut restaurer la vision chez un large modèle animal de rétinopathie humaine.
En théorie, cette thérapie génique devrait aussi restaurer une certaine vision chez les hommes, observent les chercheurs. « Des études supplémentaires d'innocuité à long terme et d'efficacité doivent encore être effectuées avant de débuter des études cliniques », ajoutent-ils.
« Nature Genetics », mai 2001, p. 92.
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