Rappelons que dans la maladie d'Alzheimer intervient une phosphorylation anormale de la protéine tau qui s'agrège en fibrilles. La glycogène synthétase kinase-3 (GSK-3) intervient dans la phosphorylation de la protéine tau. Et elle joue également un rôle dans la production de protéine bêta-amyloïde, qui se dépose pour former les plaques séniles.
Le travail de Phiel et coll. (Philadelphie) est réalisé dans des cultures cellulaires et sur des modèles de souris surexprimant le peptide bêta-amyloïde. Les auteurs confirment d'abord qu'une surexpression modérée de GSK-3 augmente la production de la protéine bêta-amyloïde. Puis qu'une réduction de la kinase GSK-3 par ARN interférents entraîne une diminution de cette protéine.
Ensuite, ils trouvent que l'ajout de lithium à des concentrations équivalentes à des doses thérapeutiques réduit la production de peptide bêta-amyloïde et la phosphorylation de tau.
Inhibition de GSK-3 non dénuée de dangers potentiels
Un motif de satisfaction des auteurs est que le lithium intervient sur le clivage du précurseur de la protéine bêta-amyloïde, sans affecter le processus de Notch, que l'on sait être important dans le métabolisme et le devenir des cellules nerveuses. La plupart des produits intervenant sur les voies métaboliques ciblées par Phiel et coll. ont un effet sur le processus de Notch. Un motif d'insatisfaction est, en revanche, que l'inhibition de GSK-3 n'est pas dénuée de dangers potentiels, comme l'induction de cancers intestinaux (par effets sur la bêta-caténine).
Les auteurs en tirent plusieurs conclusions.
Déjà, la GSK-3 représente une cible potentielle pour un traitement pharmacologique de la maladie d[212]Alzheimer. Ensuite, « le lithium protège les neurones des stimuli proapoptotiques et pourrait de ce fait diminuer les morts neuronales associées à la maladie d'Alzheimer ».
Pour autant que toutes ces données soient confirmées chez l'homme, le lithium est utilisé depuis plus de cinquante ans pour le traitement des troubles bipolaires, mais il doit l'être également dans le cadre d'une fenêtre thérapeutique serrée. Notamment, il est mal toléré chez les patients âgés (risque rénal).
L'usage du lithium est-il corrélé négativement avec l'apparition des démences ? Cela risque d'être difficile à déterminer à partir des études à long terme de patients prenant ce produit, indiquent des commentateurs de la publication de Phiel. Il faudrait des études spécifiques pour savoir si le lithium ou un autre inhibiteur des GSK-3 (comme le kenpaullone, cité dans le travail de Phiel) peut devenir un nouvel outil thérapeutique contre la maladie d'Alzheimer.
* « Nature », vol. 423, 22 mai 2003, pp. 435439, et commentaires, pp. 392-393.
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