Parmi les facteurs associés au placement en institution d'une personne atteinte de la maladie d'Alzheimer, l'un d'entre eux - la malnutrition - a été peu étudié. Pourtant, la malnutrition apparaît fréquemment chez les personnes âgées et pourrait expliquer certaines entrées en institution. Elle est également associée à une mortalité accrue chez les patients qui présentent des troubles cognitifs.
Une étude (S. Andrieu et coll.) a été menée afin d'évaluer l'effet de la malnutrition sur le risque d'entrée en institution dans un échantillon de personnes démentes.
Une cohorte de 318 patients atteints de la maladie d'Alzheimer a été étudiée. Les patients, qui vivaient tous à leur domicile au début de l'étude, ont été recrutés au sein de consultations externes dans un service hospitalier spécialisé dans la maladie d'Alzheimer. A la visite initiale, l'examen clinique notait des altérations physiques, des troubles des fonctions cognitives, de l'humeur et du comportement des patients. Leur état nutritionnel était évalué à l'aide du Mini Nutritional Assessment (MA), de l'indice de masse corporelle (IMC) et de l'albuminémie. Les patients (67,2 % de femmes) ont été suivis pendant un an. Leur âge moyen était de 75,4 ans. Dix-huit pour cent d'entre eux vivaient seuls, 54,6 % avec leur conjoint et 19,9 % avec un membre de leur famille.
20 % en institution
Les résultats ont montré qu'au bout de un an, 20,1 % des patients étudiés étaient entrés en institution (hospitalisation de longue durée, maison de retraite) contre 79,9 % qui étaient toujours maintenus à domicile. Une analyse multivariée a montré qu'un score MNA < 25,5 (score médian de l'échantillon) et l'existence de troubles du comportement alimentaires étaient des facteurs de risque d'entrée en institution (p = 0,006). Les problèmes nutritionnels étant réversibles, on peut supposer que des patients ayant des scores MNA bas pourraient bénéficier de supplémentations alimentaires afin de prévenir leur entrée en institution. Mais dans ce cas, il serait intéressant de mesurer avec précision leur prise alimentaire.
Chez certains patients atteints de la maladie d'Alzheimer, la perte de poids apparaît au début de la maladie, voire même avant l'annonce du diagnostic. Une étude (White, 1996) a montré que la perte de poids entraîne une augmentation du risque de décès. Inversement, l'augmentation du poids corporel fait diminuer le risque de décès. « Les causes majeures de perte de poids sont le dégoût alimentaire, la dépression, la prise de médicaments (notamment de ceux qui entraînent des effets secondaires digestifs)... », a rappelé le Pr Bruno Vellas. Dans la maladie d'Alzheimer, le dégoût alimentaire est lié aux troubles cognitifs, à la confusion et aboutit à la fin de la maladie à une dysphagie. Les conséquences de la perte de poids sont les infections, l'atrophie musculaire et les ulcères de décubitus. D'où la nécessité de prévenir ces risques. Une autre étude, multicentrique, a été menée conjointement à Brescia, Barcelone et Toulouse afin d'éduquer les patients à l'aide d'un programme nutritionnel. Le groupe malade comprenait 150 patients et le groupe contrôle 74. Les résultats ont montré que, grâce au programme d'éducation, le poids restait stable dans le groupe d'intervention, mais diminuait dans le groupe contrôle. En outre, les résultats ont été similaires dans les trois pays. Ainsi, il apparaît particulièrement important de maintenir un état nutritionnel satisfaisant chez les patients atteints de maladie d'Alzheimer. Il faut recommander un suivi régulier dans ce sens et dépister la perte de poids pour mieux la prendre en charge.
D'après les communications du Dr S. Andrieu et du Pr B. Vellas (Toulouse, France)
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