Livres
Le ministre de l'Education, Luc Ferry, qui s'était allié pour l'occasion à MM. Comte-Sponville et Jean-Didier Vincent, a ouvert le ban de la réflexion en s'intéressant à « l'Ennui à l'école » (voir « le Quotidien » du mardi 9 septembre). Aujourd'hui, c'est un ancien ministre de l'Education, Jack Lang, qui apporte sa contribution au débat national sur l'école qui vient d'être lancé par le gouvernement en publiant « Une école élitaire pour tous » (1). Un titre ambigu qu'il explique ainsi : « Je crois très sincèrement que nous ne gagnerons la bataille de l'intelligence que si nous sommes habités par une puissante ambition : faire l'impossible pour que les jeunes, tous les jeunes de notre pays soient parmi les mieux éduqués et les plus cultivés de la planète ». S'il se réclame - comme d'ailleurs M. Ferry - de « l'école républicaine », l'ancien ministre socialiste se démarque en affichant une vision « optimiste » de l'école, en soulignant qu'elle reste souvent « la seule institution qui résiste à la décomposition du tissu social » dans les quartiers difficiles.
Dans la première partie de son ouvrage - publié directement dans une collection de poche -, Jack Lang dresse une sorte de guide-catalogue de toutes les mesures entrant en application dans les classes à la rentrée 2003, décidées lors de son séjour, d'avril 2000 à mai 2002, Rue de Grenelle. Dans la seconde partie - un entretien avec Jean-Noël Mouret -, il tente d'expliquer ses choix en faveur du collège unique, contre le « pragmatisme » du gouvernement actuel, qui débouche, selon lui, sur une diversification-exclusion des élèves en difficulté. En déplorant notamment la remise en cause par son successeur des classes à projet artistique et culturel (PAC) qu'il avait lancées, il s'en prend au gouvernement Raffarin « briseur d'espoir », contestant « l'orientation automatique des enfants en difficulté vers la voie professionnelle » ; car, pour lui, « à terme, c'est toujours un choix sociologique de classe qui prédominera ».
Autre voix qu'on ne saurait ne pas entendre, celle d' André Antibi, directeur de l'Institut de recherches pour l'enseignement des mathématiques (IREM) à Toulouse, qui dénonce dans son ouvrage, « la Constante macabre » (2), le poids excessif de la note au sein d'un système qui sélectionne par l'échec et finit par décourager beaucoup d'élèves.
Tiré de son expérience de professeur, de formateur d'enseignants et fondé sur une série de 500 entretiens avec des enseignants, l'ouvrage met en cause le système éducatif français qui ne doit sa crédibilité, selon lui, qu'à cette « constante macabre », ce « pourcentage d'élèves qui doivent obligatoirement être en échec ». « Notre mission n'est pas de sélectionner, mais d'apporter le plus possible de connaissances au plus possible de personnes », écrit-il, ajoutant que ce qui motive le plus, c'est la réussite.
Le livre est préfacé et salué par des experts aussi divers que le recteur Philippe Joutard, qui a participé à la refonte des programmes du collège et de l'enseignement professionnel, Jean-Christophe Yoccoz, professeur au Collège de France, titulaire de la plus haute distinction en mathématiques, la médaille Fields, ou Hubert Curien, ancien ministre de la Recherche.
Les débats autour de l'école laissent souvent les parents pantois, qui ont du mal à s'y retrouver eux-mêmes dans leur rôle d'éducateurs de leurs enfants. Deux ouvrages enfoncent le clou.
C'est d'abord François Dumesnil, docteur en psychologie, qui, dans « Parent responsable, enfant équilibré » (3), renvoie les adultes sur les bancs de l'école en affirmant qu'il ne suffit pas de mettre un enfant au monde pour devenir parent, qu'être un bon parent n'est pas seulement une affaire d'expérience à la portée de chacun et ne se résume pas à appliquer des stratégies éducatives, à assumer une fonction de soutien ou d'entretien.
(dr)
Suivent presque quatre cents pages dans lesquelles il explore les multiples facettes du rôle parental avant de conclure que le rôle de parent renvoie plutôt à un état qu'il n'est possible d'incarner qu'au terme d'un cheminement personnel. Il ne suffit donc pas d'être un parent aimant pour être un bon parent, il faut en plus être « responsable » et avoir recours à la discipline et à l'autorité : on ne peut pas tout céder à son enfant, il faut le punir s'il dépasse les règles du cadre social...
Un ouvrage qui prend le contre-pied des théories qui ont contribué à placer l'enfant sur un piédestal, lui accordant tous les droits pour lui dénier celui d'être adulte.
Le propos développé par
Jacques-Antoine Malarewiczdans
« le Complexe du Petit Prince »(4) n'est pas si éloigné. Psychiatre et psychothérapeute spécialisé dans l'exploration des mutations de la constellation familiale dans la société contemporaine, il a pris comme point de départ le bouleversement qui s'est installé depuis quelques dizaines d'années dans les relations entre les générations : ce qu'on appelle l'« adultescence » ou l'« adulescence » précédant aujourd'hui une vieillesse qui est généralement niée ou ignorée.
Il en résulte que
« les enfants et les adolescent sont "élevés" comme les petits princes qu'ils sont devenus »et qu'
« ils réclament tous les privilèges que leur donne leur jeunesse en même temps que ceux que peut leur apporter un âge adulte qu'ils anticipent volontiers ». Le problème étant qu'avec ces privilèges ils revendiquent et reçoivent une maturité qu'ils sont incapables d'assumer.
« Ils peuvent se sentir floués par des adultes qui les idéalisent pour mieux les copier tout en leur donnant le sentiment d'être autonomes ». D'où une souffrance construite sur une abondance qui cache souvent, en fait, une grande pauvreté affective.
Jacques-Antoine Malarewicz montre ainsi comment certaines formes de violence et de dépression, l'anorexie et la boulimie, sont liées à ce double culte de la jeunesse et de l'égalité.
Et dans cette revue éditoriale des livres tournant autour de l'éducation, on aurait garde d'oublier le dernier
Edwige Antier,
« Vive l'éducation ! »(5), dans lequel la pédiatre la plus connue de l'Hexagone, démontre ce qui doit changer pour que nos enfants retrouvent le goût d'apprendre.
« Comment l'école se débrouille-t-elle aujourd'hui pour écurer du savoir des enfants qui lui ont été confiés normaux à trois ans ? »
, se désespère-t-elle en effet. Et en démontant les mécanismes de l'éducation nationale depuis la crèche jusqu'aux bancs de l'université, elle se donne pour tâche de conseiller les parents afin qu'eux-mêmes puissent veiller à ce que leurs enfants ne soient pas atteints, de cours de soutien en redoublement, d'orientation en voie de garage, par la phobie scolaire.
Son ambition est vaste et sa tâche est rude, à la mesure des embûches que tout parent rencontre sur son chemin, qu'il s'agisse, ainsi qu'elle le résume, de concilier le travail et les besoins psychiques de son enfant, de découvrir la bonne école, d'engager un vrai dialogue avec les enseignants, de lui apporter un soutien scolaire éclairé, de le protéger d'un environnement naturellement plein de dangers et socialement empli d'angoisses et de nouveaux maux, le tout sans le surprotéger de façon à le lancer sur la voie de l'autonomie.
Le système marche mal, mais il appartient à chacun, éducateurs et parents, d'abattre les barrières et de se faire confiance.
(1) Folio, 768 p., 7,10 euros.
(2) Math'adore-VUPS, 159 p., 15 euros.
(3) Editions de l'Homme, 400 p., 22 euros.
(4) Editions Robert Laffont, 248 p., 19 euros.
(5) Editions Robert Laffont, 333 p., 18 euros.
Le b.a.- ba programmes
Les parents qui n'ont pu se rendre à la réunion d'information au début de l'année scolaire ou qui désirent plus de renseignements que ceux fournis par les maîtres des écoles disposent, avec « Qu'apprend-on à l'école maternelle ? » (1) et « Qu'apprend-on à l'école élémentaire ? » (2), des nouveaux programmes mis en place depuis la rentrée 2002, et qui seront complètement en uvre à la rentrée 2005.
Ces programmes fixent, par discipline et par niveau, les compétences précises devant être acquises à chaque étape importante du cycle élémentaire. Chaque fois sont distingués, d'un côté, les comportements et les savoir-faire (être capable de), de l'autre, les connaissances (avoir compris et retenu).
Préfacés par Luc Ferry, ministre de la Jeunesse, de l'Education nationale et de la Recherche, et par Xavier Darcos, ministre délégué à l'Enseignement scolaire, ces ouvrages sont en fait des documents d'application concrets de ces programmes qui précisent les intentions affichées par le gouvernement.
Cette édition est ainsi augmentée d'une version simplifiée, accessible à un large public, du livret « Lire au CP » qui identifie les principales difficultés de l'apprentissage de la lecture, leurs causes et les solutions permettant de les surmonter. Des fiches pratiques proposent aux parents des pistes pour accompagner les enfants qui découvrent l'écrit.
Un autre document, intitulé « La littérature au cycle des approfondissements », qui précise les desseins et les démarches de l'enseignement de la littérature aux jeunes élèves, est enrichi par des listes d'uvres de référence en littérature, en arts visuels et en musique.
(1) XO Editions/CNDP, 224 p., 6,90 euros
(2) XO Editions/CNDP, 352 p., 11,90 euros
Les droits et les obligations des moins de 18 ans
Destiné aux jeunes âgés de moins de 18 ans - mais aussi à leurs parents -, le « Code Junior a pour objectif de mieux faire connaître les droits des enfants et des adolescents, mais aussi leurs obligations, non seulement les règles, mais également leur application concrète dans toutes les situations du quotidien.
Ce guide rassemble donc les principales règles de droit concernant les mineurs (lois, décrets, arrêtés, circulaires, décisions de justice, etc.) par grands thèmes : la famille, l'école, la société, les textes fondamentaux relatifs aux droits de l'homme.
Ces règles de droit sont citées soit intégralement, soit par extraits. La règle est accompagnée d'un commentaire qui se veut le plus accessible possible aux mineurs comme aux adultes (les mots difficiles sont expliqués) et qui se fonde sur la jurisprudence la plus récente.
Réalisé par Dominique Chagnollaud, professeur à l'université de Paris-II, et Grégory Portais, cet ouvrage est destiné à accompagner le futur citoyen dans l'apprentissage et l'exercice de sa liberté.
Editions Dalloz, 551 p., 15 euros.
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