S I les facteurs des cancers sont multiples, on sait que l'alimentation joue un rôle non négligeable. Selon plusieurs estimations, dans les pays développés, jusqu'à 30 % des cancers sont liés à des facteurs nutritionnels et pourraient donc être prévenus par un meilleur équilibre alimentaire. C'est ce que tend à mettre en évidence l'étude européenne EPIC (European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition), la plus grande jamais menée sur le sujet, puisqu'elle concerne plus de 500 000 sujets dans 10 pays. Lancée en 1991 par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC, Lyon), grâce à un financement de la Communauté européenne, elle cherche à établir les liens de cause à effet entre l'équilibre alimentaire, les données anthropométriques, l'activité physique, les facteurs hormonaux, les facteurs de prédisposition génétique et l'apparition d'un cancer.
Les premiers résultats, présentés à la Conférence internationale Nutrition et Cancer, à Lyon, portent sur les relations entre l'alimentation et les principaux cancers prévalents dans les pays industrialisés. Ils confirment l'effet protecteur des fruits et des légumes vis-à-vis des cancers du côlon et du rectum, et des cancers des voies aérodigestives supérieures mais ne le retrouvent pas pour les cancers de l'estomac et du poumon ; il est vrai que la durée de suivi des sujets est encore faible, ainsi que le nombre de cas de cancer survenus au cours de cette période.
Dans l'étude, le risque de cancer du côlon est clairement augmenté pour les amateurs de charcuterie et significativement diminué pour les consommateurs de poisson. La consommation de viande rouge n'apparaît pas associée au risque de développer un cancer du côlon ou du rectum mais les analyses n'ont pu encore prendre en compte la méthode de cuisson, ce qui doit être fait à l'avenir. Quant aux volailles, elles n'augmentent pas le risque de cancer et probablement le réduisent faiblement. Et si l'on note une association positive entre la consommation totale de viande et les cancers de l'estomac et des voies aérodigestives supérieures, cette association est faible et non significative. Là encore des analyses ultérieures sont au programme.
L'étude s'est également penchée sur l'alcool et le tabac, et souligne leur « effet dévastateur ». Le risque de cancer des voies aérodigestives supérieures est multiplié par plus de 8 pour celui qui fume plus d'un paquet de cigarettes par jour, par 9, pour celui qui consomme 60 g d'éthanol par jour (en gros, une bouteille de vin de 75 cl) et... par 50 pour celui qui accumule les deux plaisirs (ou besoins).
Ces mêmes cancers des voies aérodigestives voient leur incidence réduite de 50 % par une consommation quotidienne de 500 g ou plus de fruits et légumes.
Que ceux qui seraient tentés d'équilibrer les risques et les bénéfices préventifs ne s'y trompent pas. Le CIRC insiste sur le côté plurifactoriel de l'incidence des cancers dans ses rapports avec l'alimentation, sans oublier l'importance de l'activité physique et la prévention de l'obésité.
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